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Expérimenter pour innover : les exemples de la City of London et de Ma course SNCF

Ma Course SNCF : voitures partagées avec chauffeur en milieu rural. Source : Direction Innovation et recherche, sncf.fr
Le 12 octobre 2021

De nouvelles approches de l’expérimentation se déploient depuis plusieurs années, notamment dans les domaines de l’urbanisme et des mobilités. Cet article revient sur deux exemples de projets d’innovation par l’expérimentation : des tests d’aménagements provisoires réalisés en 2010 sur le parvis de la cathédrale Saint-Paul à Londres par la City of London, et Ma Course SNCF, un service de transport à la demande (TAD) innovant porté par la direction Innovation et recherche de la SNCF, actuellement déployé au niveau d’un groupement de communes rurales de la Sarthe.

Résumé

Les démarches expérimentales sont aujourd’hui au cœur des processus d’innovation dans tous les secteurs d’activités. Cet article revient en particulier sur deux exemples sensiblement contrastés dans les domaines de l’urbanisme et des mobilités : des tests d’aménagements provisoires réalisés en 2010 sur le parvis de la cathédrale Saint-Paul à Londres par la City of London, et Ma Course SNCF, un service de transport à la demande (TAD) innovant porté par la direction Innovation et recherche de la SNCF, actuellement déployé au niveau d’un groupement de communes rurales de la Sarthe.

Sur la base de ces deux exemples, il entend démontrer l’intérêt de ce genre de démarche dans la mise en œuvre de projets publics innovants, et ce quels que soient le degré de maturité des innovations et l’envergure des expérimentations, depuis le test rapide et peu coûteux jusqu’au projet-pilote de grande envergure.

L’article insiste en particulier sur l’importance d’adopter une démarche structurée avec des dispositifs d’évaluation agiles, entendus ici comme véritables corollaires de l’expérimentation : la validation (on non) d’hypothèses consolidées tout au long du projet conduit, selon les auteurs, à tirer un maximum d’enseignements utiles à l’ensemble des parties prenantes.

Ce faisant, ils contribuent à « dérisquer » le processus d’innovation dans son ensemble et permettent d’envisager la pérennisation des aménagements urbains d’une part, ou le passage à l’échelle des services de mobilité d’autre part.

L’expérimentation a le vent en poupe dans les     secteurs de l’urbanisme et des mobilités. Depuis une quinzaine d’années, de nouvelles manières de faire la ville montent en puissance : urbanisme tactique, aménagements temporaires, occupations transitoires, chantiers participatifs, urbanisme bottom-up, etc. Ces démarches sont portées par une variété d’acteurs publics et privés, avec des modes opératoires et des finalités multiples. Cependant, elles partagent une philosophie commune : tester rapidement des aménagements, usages ou services par des actions rapides, dans une logique de transformation à moyen ou long terme : « short term action for long term change » 1.

Les pratiques expérimentales, qui permettent d’innover en testant des solutions en conditions réelles, au contact des usagers, sont donc en plein essor et leur intérêt est largement démontré. Elles sont d’ailleurs encouragées par les institutions publiques qui font évoluer les normes pour les encourager.

Le secteur des transports publics n’est pas en reste. Historiquement structuré par les relations entre autorités publiques et grands opérateurs de transport (SNCF, Keolis, RATP, Transdev, etc.), celui-ci est aujourd’hui bouleversé par l’essor des « nouvelles mobilités » et l’arrivée massive d’acteurs issus des géants du numérique ou de start-ups spécialisées. Leurs méthodes, imprégnées de culture digitale, sont fortement tournées vers l’expérimentation. Des dizaines de nouveaux services apparaissent et disparaissent chaque année : co-voiturage et autopartage, livraisons, véhicules autonomes, micro-mobilités, etc. Les usagers sont les testeurs, en conditions réelles, des services qui évoluent et gagnent en maturité au fil de l’eau.

La crise du covid-19 accélère par ailleurs l’adoption de ces méthodes agiles. L’urgence sanitaire, sociale et économique conduit à faire tomber des barrières techniques, organisationnelles et budgétaires et autorise la mise en place de mesures auparavant difficilement envisageables : réduction du stationnement urbain au profit de terrasses temporaires, création de « coronapistes » pour les vélos, déploiement de nouveaux services de logistique et livraison, de services publics mobiles, etc. De nombreux projets présentés au départ comme des expérimentations ont fait la preuve de leur pertinence et sont aujourd’hui en voie de pérennisation.

Les pratiques expérimentales, qui permettent d’innover en testant des solutions en conditions réelles, au contact des usagers, sont donc en plein essor et leur intérêt est largement démontré. Elles sont d’ailleurs encouragées par les institutions publiques qui font évoluer les normes pour les encourager. Une section entière est, par exemple, consacrée aux nouvelles dispositions réglementaires sensées « favoriser les expérimentations des nouvelles mobilités » dans la récente loi d’orientation des mobilités2, et de nombreux organismes publics tels que le Centre d’etudes et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’energie (ADEME) ou l’atelier parisien d’URbanisme (APUR) publient des guides, boîtes à outils ou recherches sur ces nouvelles méthodes3.

Si ces pratiques expérimentales sont encouragées et valorisées, il n’est pas toujours aisé pour les professionnels de l’action publique de les mettre en œuvre. La culture et les modes de management des organisations sont parfois davantage tournés vers la mise en œuvre de services opérationnels ou d’aménagements pérennes. Dès lors, expérimenter se réduit souvent à essayer quelque chose de nouveau sans réelle méthode, avec un prototype considéré comme une fin en soi ou un outil de communication. Cela conduit de nombreuses expérimentations à rester sans suite. Or, pour que l’expérimentation participe pleinement du processus d’innovation, il est important d’adopter un « état d’esprit » expérimental. Cela suppose de considérer l’expérimentation non pas comme une fin en soi mais comme une démarche structurée jalonnée d’échecs et d’apprentissages. C’est en substance ce qu’avançait Thomas Edison, père de l’expérimentation industrielle et prolifique inventeur de, entre autres, l’ampoule électrique et le téléphone, quand il déclarait : « Je n’ai pas échoué mille fois, j’ai simplement appris mille façons de ne pas faire une ampoule. »

Pour illustrer notre propos, nous avons choisi de présenter dans la suite de cet article deux exemples tirés de nos expériences professionnelles de designer-ingénieur et docteure en urbanisme engagés dans des projets d’innovation par l’expérimentation. Ces exemples sont contrastés en termes de secteur d’activités, d’envergure et de démarche. Ce faisant, ils donnent à voir la diversité des approches possibles et l’intérêt des démarches expérimentales quelle que soit l’ampleur des dispositifs mis en place.

Tests d’aménagement du parvis de la cathédrale Saint-Paul à Londres : des expérimentations rapides en phase amont

Cette démarche expérimentale a été conçue par la City of London, dans le cadre du réaménagement du parvis de la cathédrale Saint-Paul et des espaces publics environnants, projet-phare pour la préparation des Jeux olympiques de 2012.

La démarche a ici été conduite en phase amont, pendant les études de programmation visant à définir les principes d’aménagement, avant la conception par les architectes et paysagistes. Celle-ci a été proposée car il n’existait alors pas de consensus politique et technique sur le devenir des espaces : verdissement ou usage intense, création de zones de repos, installations d’œuvres d’art ou d’espaces de jeux, ouverture d’un jardin historique, etc. Des études avaient certes été réalisées, mais elles n’avaient pas permis une prise de décision éclairée par les parties prenantes. Une concertation publique « classique » avait aussi été menée, mais elle n’avait pas permis de cerner finement les besoins des habitants, et encore moins ceux des nombreux visiteurs et travailleurs qui n’avaient pas pu y participer. Afin d’alimenter les débats, un projet d’expérimentation a donc été mis en place avec l’objectif d’explorer, en conditions réelles et au contact des usagers, plusieurs hypothèses sur un temps court.

Les expérimentations ont été conçues dans une optique de « prototypage rapide », c’est-à-dire en recherchant le moyen le plus simple, le moins couteux et le plus efficace pour tester les hypothèses. Concrètement, quatre aménagements temporaires ont été mis en place sur un même espace pour des durées allant de trois jours à un mois. Les installations ont été réalisées par les équipes de la mairie en utilisant un maximum d’éléments disponibles sur catalogue ou chez les services techniques (miroirs de voirie, rouleaux de gazon, chaises longues, etc.). Les prototypes n’avaient alors pas vocation à être photogéniques ou communicants, mais bien à tester in situ les différents usages possibles de l’espace.

Un protocole d’évaluation de l’expérimentation a été conçu en amont. Les hypothèses à tester, les prototypes associés et les méthodes de mesure ont été clairement définis. Ces dernières combinaient méthodes quantitatives (comptages, mesures de temps passé), entretiens semi-directifs et captation vidéo. Ce protocole permettait de comparer l’impact des prototypes sur les comportements et les usages des utilisateurs, et de valider ou d’invalider les hypothèses de départ. Il a, par exemple, révélé que, contrairement aux intuitions initiales, quatre fois plus de personnes s’arrêtaient dans l’espace réunissant les installations artistiques que dans l’espace vert, ou encore que les enfants de l’école voisine avaient besoin d’un jardin sécurisé pour jouer après le temps scolaire (50 enfants par jour dans le jardin historique ouvert temporairement). Cette structuration de la démarche et les nouvelles données générées ont permis de faire émerger un consensus : le verdissement n’a été retenu qu’en partie ; des installations artistiques et ludiques ont été proposées ; le jardin historique a été réouvert, des assises mobiles ont été proposées. Ces éléments sont aujourd’hui présents dans l’aménagement pérenne du parvis. Il est intéressant de noter qu’ici, les parties prenantes et usagers n’ont pas été associées à la conception de la démarche. Les usagers étaient uniquement testeurs des prototypes. La démarche a néanmoins généré beaucoup de retours et de réactions.

Cette expérimentation est intéressante à plusieurs titres. Tout d’abord, la démarche a été conduite en phase très amont, afin d’explorer le champ des possibles. Ensuite, elle a été réalisée dans une économie de temps et de moyens mais a généré un fort retour sur investissement. Enfin, elle a permis d’avancer dans le processus de conception en consolidant des hypothèses innovantes qui n’auraient pas été retenues dans un processus de conception classique, car perçues comme trop risquées.

Ma Course SNCF : un projet-pilote pour un modèle hybride de mobilité dans un territoire rural

Porté par l’accélérateur de la direction innovation & recherche du groupe SNCF, le programme TECH4MOBILITY, au sein duquel sont incubées les solutions de mobilités collectives de demain pour les territoires peu denses, Ma Course SNCF est une solution expérimentale de mobilité partagée financée à 100 % par la SNCF. Celle-ci est déployée depuis février 2021 et pour un an sur cinq communes rurales de la Sarthe, et s’adresse à environ 15 000 habitants4 répartis sur un territoire de 100 km².

Ma Course SNCF : voitures partagées avec chauffeur en milieu rural.

Source : Direction Innovation et recherche, sncf.fr

La direction Innovation et recherche du groupe SNCF, désireuse de développer de nouvelles solutions de transports collectifs dans les zones rurales, est à l’origine du projet. Courant 2019, elle a fait appel à Kisio études & Conseil, filiale de Keolis, pour réfléchir à un service innovant de TAD dans les environs de Montval-sur-Loir, entendu comme service intermédiaire entre la voiture et le transport collectif mis en œuvre sur réservation des utilisateurs5.

Pour concevoir ce service expérimental, le principe retenu a été de partir du territoire, de son fonctionnement et des usages de ses habitants. Une première phase d’enquête mêlant analyse des traces GPS et données socio-économiques, immersion terrain et entretiens avec les riverains et les acteurs locaux, a permis de faire émerger un certain nombre de problématiques locales (dépendance automobile, isolement, inégalités d’accès aux technologies numériques, etc.). Celles-ci ont alimenté une démarche de design de service au cours de laquelle des concepts de TAD innovant ont été imaginés.

Ces concepts ont ensuite été mis à l’épreuve du territoire au cours d’une première phase de tests rapides. Des prototypes graphiques ont été designés puis présentés sur le terrain aux différents publics-cibles : personnes âgées, adolescents, parents d’enfants en bas âge, etc. Sur la base de leurs retours, un tri a pu être effectué entre les concepts a priori pertinents, ceux qui méritaient d’être retravaillés et ceux qu’il convenait au contraire d’abandonner. Des éléments de valeur qui n’avaient pas été anticipés par l’équipe de conception ont également émergé. Finalement, pas moins de sept services de TAD ont été retenus :

  • un service porte à porte pour desservir la gare TER de Château-du-Loir ;
  • un service zonal, c’est-à-dire sans itinéraire de référence, pour se rendre de n’importe quel point du territoire à n’importe quel autre point du territoire ;
  • un service de desserte des infrastructures sportives ;
  • un service d’accompagnement pour les démarches du quotidien (marchés, démarches administratives, rendez-vous médicaux, etc.) ;
  • un service pour accéder aux activités culturelles et de loisirs (bibliothèque, cinéma, manifestations culturelles ou musicales) ;
  • un service de livraison de courses et de petits colis ;
  • un service de véhicules en autopartage.

À la suite de cette phase amont de design de services, l’expérimentation a été conçue techniquement avec SNCF Innovation et recherche, Kisio Études & Conseil, l’éditeur de solutions de TAD Via et un exploitant de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC), avec l’objectif d’aboutir à un service pilote, déployé en conditions réelles, pour une durée d’un an. Au final, le pilote Ma Course SNCF se présente comme un service de transport innovant qui utilise des interfaces low-tech accessibles au plus grand nombre (en particulier, une réservation possible via une centrale d’appel), mobilise une technologie d’algorithme de groupage adaptée aux spécificités des espaces ruraux, et s’organise autour d’un semainier qui précise les différents lieux accessibles par jour et par créneau horaire : par exemple, desserte de la gare en début et fin de journée, accès aux infrastructures sportives et de loisirs à la sortie de l’école et les mercredis après-midi, livraison de courses à domicile le vendredi matin, etc.

Parallèlement, un protocole d’évaluation a été co-designé pour permettre le suivi de cette expérimentation. Plus d’une centaine d’hypothèses ont été générées, priorisées et phasées avec les parties prenantes du projet lors d’ateliers dédiés. Celles-ci différaient sensiblement selon les interlocuteurs, avec, par exemple, beaucoup d’hypothèses d’ordre technologique pour le représentant de la start-up Via, et d’autres plus axées sur les usages du service et l’impact local pour les représentants du territoire. Les indicateurs et mesures permettant de valider ou non les hypothèses, reposant à la fois sur des données quantitatives (données remontées par la solution logicielle, données de réservation, données SNCF, etc.) et qualitatives (enquêtes auprès des conducteurs, voyageurs, partenaires locaux, etc.), ont été collectivement définis. Cela a permis de garantir une création de valeur pour toutes les parties prenantes de l’expérimentation.

Contrairement à de nombreuses expérimentations qui ne sont évaluées qu’à leur toute fin par un retour d’expérience, les hypothèses ont ici été phasées et sont évaluées mensuellement (avec un suivi de certains indicateurs critiques en temps réel), permettant ainsi une évolution du design de l’offre en fonction des données analysées. Le semainier a, par exemple, été actualisé avec la création d’une offre pour les scolaires entre 12 h 00 et 14 h 00, et la tarification a fait l’objet d’évolutions. Il est de plus à noter que cette expérimentation a été l’occasion d’un nouveau partenariat local entre la SNCF et Esprit béguinage, foncière concevant des espaces d’habitat pour les personnes âgées, qui a souhaité faire bénéficier ses résidents de ce service. Ce cadre de travail agile dans lequel la validation (ou non) d’hypothèses sert à apprendre et générer de nouvelles pistes permet de tirer un maximum d’enseignements sur toute la durée de l’expérimentation.

Coconstruire et porter un tel protocole d’évaluation présente donc deux vertus principales : apprendre et dérisquer le projet le plus rapidement possible, et générer de la valeur pour toutes les parties prenantes, condition nécessaire à la viabilité future du service en vue notamment d’une généralisation sur des territoires comparables.

Enseignements pour l’innovation publique

à travers la présentation de ces deux exemples contrastés aussi bien sur le plan méthodologique que sur celui de l’envergure de la démarche, nous souhaitons mettre en avant plusieurs enseignements qui nous semblent utiles pour les professionnels engagés dans la mise en œuvre de projets publics.

L’expérimentation n’est pas forcément complexe ou coûteuse. Elle peut être menée à toutes les étapes du processus d’innovation, depuis les phases très amont de programmation ou de définition du problème, jusqu’aux phases en aval de design et de conception des solutions. Différentes formes d’expérimentations peuvent être menées pour accompagner la maturation des innovations, depuis le test rapide et peu coûteux jusqu’au projet-pilote de grande envergure.

Pour tirer le maximum d’une expérimentation, il est nécessaire d’adopter une démarche structurée mais néanmoins aisée à mettre en œuvre. Celle-ci peut largement s’inspirer de la méthode scientifique résumée en trois points par Stephan Thomke6, professeur à Harvard et spécialiste de l’expérimentation :

  1. Formulation d’hypothèses testables ;
  2. Mise en place d’expérimentations rigoureuses ;
  3. Apprentissage porteur de sens.

Dans le cas de projets complexes impliquant de nombreuses parties prenantes, le co-design de la démarche nous semble être une des clés pour embarquer tous les acteurs du projet (y compris, le cas échéant, les usagers). De la sorte, le processus génère de la valeur pour tous les acteurs et permet d’avancer vers des innovations viables.

Enfin, l’expérimentation doit être entendue comme un processus ouvert et itératif. L’échec fait partie du jeu et doit être accepté. Ce faisant, l’expérimentation permet de « dérisquer » le processus d’innovation et d’avancer vers la pérennisation des aménagements (pour l’urbanisme) ou le passage à l’échelle des services (pour les mobilités).

  1. Lydon M., Tactical Urbanism, 2015, Island Press.
  2. L. no 2019-1428, 24 déc. 2019, d’orientation des mobilités.
  3. Par exemple, CEREMA, « Aménagement provisoires pour les piétons : tester pour aménager durablement », Les Cahiers du CEREMA mai 2020.
  4. SNCF, « Ma Course SNCF : nos voitures partagées avec chauffeur en milieu rural », 16 avr. 2021, https://www.sncf.com/fr/innovation-developpement/innovation-recherche/ma-course-sncf
  5. Le Breton E., « Le transport à la demande comme innovation institutionnelle », Flux janv.-mars 2001, p. 58-69.
  6. Thomke S., “ExperimentationWorks”, Harvard Business ReviewPress 2020.
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