Manifeste : de quoi FP21 est-il le nom ?

Lors du lancement officiel de l’association FP21 en février 2017, Annick Girardin alors ministre de la Fonction publique avait souligné « c’est, à ma connaissance, la première fois dans l’histoire de la fonction publique française que de jeunes agents publics décident de créer une association spécialement dédiée à la question de la jeunesse dans la fonction publique ».

FP21 est, en effet, la première association – et, à notre connaissance, la seule – qui valorise et donne un cadre de rencontres, d’inspirations et de réflexions aux jeunes agents publics. L’objectif n’est pas d’exclure ou d’initier une forme de prosélytisme générationnel : l’association est ouverte à tous les agents ! Le critère d’âge (jeunes agents de moins de 35 ans) vise à faciliter le renouvellement de la gouvernance et à conserver l’ancrage de l’association dans les idées, attentes et préoccupations des primo-entrants dans la fonction publique issus des nouvelles générations.

Mais pourquoi donner la parole aux jeunes agents ? En premier lieu, parce que nos générations ont une conscience accrue de leur responsabilité face aux maux de notre temps. Nous sommes nés à la fin des années 1980, dans les années 1990 ou au début des années 2000 pour les plus jeunes d’entre nous. Nous savons, par exemple, que nous vivrons de plein fouet les effets du dérèglement climatique et que nos générations et les futures devront regorger de créativité, de pédagogie mais aussi d’abnégation pour répondre aux défis écologiques, démocratiques et sociaux propres à notre époque. Au regard des imbrications fortes et complexes entre l’administration, la vie politique et la société, le rôle des agents publics dans le développement de services publics plus durables et respectueux de notre écosystème et de l’humanité est primordial. À ce titre, FP21 a développé en 2021 des liens avec le ministère de la Transition écologique dans le cadre de travaux relatifs à la transformation publique durable des services publics pour ne citer qu’un exemple.

De plus nous savons, par nos échanges quotidiens avec des fonctionnaires titulaires et contractuels, que les jeunes agents se sentent plus souvent bridés ou n’osent pas être force de propositions lorsqu’ils débutent leur carrière dans la fonction publique. D’abord, parce qu’ils ne maîtrisent pas toute la culture informelle qui structure l’administration – les « non-dits » – mais aussi parce que le conformisme est encore plus valorisé que l’innovation dans les structures publiques, notamment en début de carrière. Cette autocensure – consciente ou non – des jeunes agents fait partie des raisons d’être de FP21. Si les agents publics n’osent pas toujours s’étonner, proposer des idées nouvelles dans leurs organisations, ils savent qu’ils trouveront chez nous un espace pour les travailler, les approfondir et les confronter avec d’autres points de vue.

FP21, c’est ainsi et surtout une méthode qui repose sur l’intelligence collective de ses membres dans le but d’élaborer des propositions pragmatiques et réalisables visant à nourrir les débats sur l’avenir de la fonction publique. Pour ce faire, nous procédons principalement par des enquêtes comme celles que nous avons réalisées lors du premier confinement sur les conditions de travail des agents pendant cette période singulière ou encore celle que nous avons réalisée en juin 2021 sur la première prise de poste dans la fonction publique.

Les membres du réseau de FP21 ont fait connaître à la nouvelle équipe leurs sujets d’intérêts ce qui a conduit à installer un cycle de groupes de travail internes inauguré en juin 2021 avec le thème de l’innovation managériale, qui préoccupe particulièrement les membres de notre réseau. En effet, un agent sur deux qui nous rejoint indique avoir besoin d’être outillé sur ce sujet. L’objectif global de ces groupes de travail ? Tenter de créer, à partir de constats et d’expériences concrètes, une vision collective des enjeux et construire des propositions que nous présentons dans le cadre d’auditions organisées par les ministères et par les parlementaires notamment à l’occasion des réformes relatives à la fonction publique. À cet égard, nous nous sommes dernièrement positionnés sur l’avenir des concours, la transformation publique durable, l’égalité professionnelle ou encore les besoins de formation des agents.

En plus d’être un espace de réflexion, nous cherchons à faire de FP21 une organisation qui incarne les tendances que nous souhaitons voir pleinement advenir dans l’administration avec l’idée forte de tendre vers l’exigence d’une posture professionnelle individuelle et collective centrée sur la congruence.

Nous œuvrons également pour un rapprochement entre les agents publics et le monde de la recherche et de l’innovation. Cet aspect se matérialise notamment par la mise en place de rendez-vous mensuels inspirants – les « Petits-déj FP21 » – au sein desquels des innovateurs publics et des chercheurs échangent avec les membres du réseau sur des enjeux de l’action publique tels que le gouvernement ouvert, le management dans l’incertitude, les sciences comportementales ou encore l’approche inclusive. De même, nous travaillons pour une administration plus ouverte sur la société civile et notamment sur les acteurs du monde associatif et du champ de l’économie sociale et solidaire (ESS) ce que révèle notre partenariat avec French Impact.

Dernier point et non des moindres, FP21 tient à maintenir et développer un volet international permettant d’initier des dialogues extrêmement riches d’enseignements sur des thématiques ciblées en mode « regards croisés » ou de façon plus classique dans le cadre de groupes de travail internationaux dont le but est la création d’un projet, d’une vision ou d’une réflexion commune dans une démarche d’amélioration continue des fonctions publiques. Nous pouvons citer l’exemple du projet de coopération franco-québécois qui vit depuis 2017 entre le Forum des jeunes de la fonction publique québécoise et FP21 avec le soutien de la DGAFP.

Notre association a aussi une particularité dont nous sommes fiers : rassembler des agents de toutes les fonctions publiques – étatique, territoriale, hospitalière, parlementaire, sui generis – titulaires et contractuels, tous statuts confondus. Nous contribuons par ce fait à la création et au développement d’une culture commune au sein de la fonction publique en initiant les rencontres, l’entraide et le partage de pratiques entre les différents acteurs de l’action publique.

Dans le prolongement, nous avons pour objectif de lancer en 2021 l’expérimentation du programme « Mentors FP21 » qui vise à accompagner les jeunes agents dans leur prise de poste et dans leur progression de carrière via la mise en relation avec un « mentor » expérimenté. Ce dernier pourra suivre un programme de conférences dédié ayant vocation à accélérer l’acquisition de connaissances transversales sur les rouages de la fonction publique, les mobilités inter-administrations ou externes, les reconversions, la chefferie de projet, etc. Nous espérons que cette proposition ira dans le sens d’un renforcement du sentiment d’appartenance et de la solidarité entre les agents publics.

Ces missions que se donnent FP21 concourent toutes à une autre qui est celle d’améliorer l’attractivité de la fonction publique en valorisant ses métiers et la pluralité des parcours professionnels. Si par endroits les administrations, établissements, structures, institutions et collectivités publiques peuvent encore peiner à attirer des talents, c’est entre autres raisons parce qu’elles sont fréquemment méconnues du grand public. Les agents publics sont peu incités à intervenir publiquement pour évoquer leurs métiers et la richesse de leurs carrières. FP21 mène – souvent en partenariat avec des médias spécialisés du secteur public – des opérations de communication pour encourager les prises de paroles des agents sur l’histoire de leurs parcours et leur vision du service public. Sur ce sujet, plusieurs membres du réseau de FP21 participeront d’ailleurs à une campagne de valorisation des parcours dans la fonction publique hospitalière portée par le Centre national de gestion au cours de l’année 2021. Plusieurs directeurs d’hôpital du réseau ont accepté de parler de leur métier dans le cadre de podcasts, articles et vidéos réalisés cet été et nous sommes régulièrement sollicités pour intervenir dans des écoles et des colloques.

Nous sommes également engagés pour que les administrations publiques soient plus inclusives et accessibles à celles et ceux qui souhaiteraient la rejoindre. Si nous n’apprécions pas particulièrement le mot « diversité » qui nous apparaît parfois galvaudé par un usage excessif sans définition précise de la notion, nous pensons que l’administration doit développer son savoir-faire pour détecter, attirer, recruter et faire grandir des talents aux parcours et expériences de vie hétéroclites. Nous avons la conviction que la multiplicité des points de vue sur l’action publique permet de l’enrichir et de sortir de certaines représentations erronées.

S’il fallait définir FP21, c’est avant tout un état d’esprit marqué par la quête des possibles pour l’action publique. L’innovation publique fait partie de notre ADN et nous cherchons sans cesse à questionner nos pratiques, nos croyances et nos automatismes pour proposer des solutions novatrices et audacieuses. Dans cette optique, nous avons des liens étroits avec les principaux acteurs de l’innovation et de la transformation publiques et nous menons des actions de détection des pratiques innovantes au sein de notre réseau, dans une logique « bottom-up ». C’est notamment le cas dans le cadre de notre événement annuel, les Avant-premières de l’action publique, qui met en lumière des agents qui portent des projets précurseurs comme vous pourrez le découvrir dans ce numéro hors-série. En 2021, les Avant-premières auront lieu en novembre pendant le Mois de l’innovation publique organisé par la DITP avec laquelle nous collaborons depuis plusieurs années.

Pour conclure, de quoi FP21 est-elle le nom ? D’une équipe de vingt jeunes agents bénévoles qui tentent modestement, à leur niveau, de développer des synergies, de confronter des points de vue, de favoriser l’entraide et la confiance entre agents, d’apporter des contributions neuves aux travaux institutionnels. Une équipe de jeunes agents qui travaillent avec plusieurs centaines d’autres jeunes agents – mais aussi de moins jeunes – dans l’espoir de faire vivre les valeurs du collectif et de l’engagement pour une fonction publique désirable.

Signataires du manifeste : Ahmed Saidani, Johanne Fora-Porthault, Tony Brando, Driss Bennis, Lucila Modebelu, Barbara Wallon, Thibaut Houriez, Vanessa Marel et Aimy Genechesi.