Web
ActualitésFonction publique : un guide pour recruter à l'ère des réseaux sociaux et de l'IA

Comment l'intelligence artificielle (IA) transforme-t-elle le recrutement dans le secteur public ? Quels sont les principaux défis RH liés à l'intégration de l'IA dans la fonction publique ? Comment la présence sur les réseaux sociaux, en particulier LinkedIn, peut-elle améliorer l'attractivité des employeurs publics ? Quels sont les avantages d'un environnement de travail qui encourage la culture numérique et l'innovation pour l'attractivité du secteur public ? Quelles sont les attentes des jeunes générations vis-à-vis de l'IA dans leur futur environnement de travail ?
Profil Public, la plateforme d'emploi qui modernise le recrutement dans le secteur public, vient de lancer un nouveau guide destiné aux employeurs publics pour recruter à l’ère des réseaux sociaux et de l’IA dans la fonction publique,
Ce guide apporte des éléments de réponse à toutes ces questions bien dans l'air du temps. Il est le fruit d'une enquête menée par les équipes de Profil Public auprès de plus de 300 candidats et de témoignages d'employeurs publics et d'experts. Les auteurs identifient notamment cinq grands défis RH à l'ère de l'IA et des réseaux sociaux, chaque défi est illustré par des exemples inspirants pour passer à l'action.
«L’intelligence artificielle, l’automatisation et les médias sociaux offrent des opportunités inédites pour fluidifier l’expérience candidat, gagner en visibilité et mieux répondre aux besoins des candidats. Mais moderniser ne veut pas dire renoncer aux valeurs du service public. Au contraire, c’est en les mettant en avant avec des pratiques de recrutement transparentes et inclusives que nous réussirons à relever le défi de l’attractivité de la fonction publique», écrit Sigrid Berger, administratrice territoriale, fondatrice de Profil Public, en introduction du guide.
L'objectif de ce guide est bien d'explorer comment l'intelligence artificielle (IA), l'automatisation et les réseaux sociaux peuvent moderniser les pratiques de recrutement tout en valorisant les valeurs du service public.
Ce qui ressort de l'enquête réalisée auprès de plus de 300 candidats, et cela n'étonnera personne tant le constat est partagé, c'est que près de la moitié d'entre eux (49%) ne sont pas du tout ou pas vraiment satisfaits de l'expérience candidat dans la fonction publique. Les technologies numériques peuvent-elles contribuer à améliorer ce mauvais chiffre alors que l'attractivité des métiers de la fonction publique connaît un passage à vide ? C'est tout le propos de ce guide qui incite les employeurs publics à s'emparer des réseaux sociaux, LinkedIn en premier, et de l'IA pour moderniser et transformer la façon de recruter dans le secteur public. Et il y a urgence à la lecture du grand entretien avec Yann Ferguson, sociologue à l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) et directeur scientifique du LaborIA, qui figure en introduction du guide et destiné à éclairer les enjeux de l'IA dans le secteur public. En effet, sur les attentes des jeunes générations, le défi est immense :
«C’est auprès des plus jeunes que l’usage de l’intelligence artificielle est le plus marqué. En France, 70 % des utilisateurs de ChatGPT ont moins de 25 ans. Pour 65 % d’entre eux, la place de l’IA dans leur futur environnement de travail pèsera lourd dans le choix de leur premier employeur. La raison est simple : la moitié reconnaît qu’il leur serait difficile de se passer de l’IA pour certaines tâches», explique le sociologue.
Parmi les autres grands enjeux RH soulevés par l'IA, Yann Ferguson évoque l'essor du phénomène de "shadow AI" à savoir des usages cachés par les agents publics d'outils non validés par les directions des systèmes d'information (DSI) et la formation à l'IA, avec notamment la nécessité d'apprendre à mieux formuler les requêtes, d'être capable de contrôler et d'évaluer les réponses produites par l'IA. Autre enjeu RH important et spécifique à la fonction publique, c'est l'importance d'intégrer la dimension éthique dans les systèmes IA : «dans le secteur public, cette exigence éthique est fondamentale. Elle est au cœur de la mission de service public et elle fonde le sens que les agents donnent à leur travail, guidés par l’utilité sociale de leur action. Lorsqu’un système d’IA porte atteinte à ce sens – par des biais, un impact environnemental mal maîtrisé, ou l’usage de solutions non souveraines – c’est toute la chaîne qui se dégrade : la qualité du service, l’engagement des agents, et in fine, la confiance des citoyens.»
Cinq grands défis RH à l'ère de l'IA et des réseaux sociaux
Le guide identifie cinq grands défis RH à l'ère des réseaux sociaux et de l'IA : dynamiser sa présence sur les réseaux sociaux, intégrer l’IA au quotidien métier, automatiser ses processus RH, former son collectif de travail et bâtir un environnement de travail attractif.
- Dynamiser sa présence sur les réseaux sociaux : LinkedIn est devenu un espace clé pour le recrutement, y compris dans la fonction publique. Pourtant, la visibilité des employeurs publics reste souvent en deçà de son potentiel. Le guide encourage à dépasser la simple diffusion d'offres d'emploi pour valoriser la marque employeur à travers le storytelling, les témoignages de collaborateurs et une communication moins institutionnelle, plus engageante et ciblée. L'exemple de la vidéo virale "La chaise de Tours" ou de la stratégie "Mon métier, c'est Marseille" illustrent une communication plus créative et plus authentique pour attirer l'attention. Le guide propose également de s'appuyer sur un réseau d'agents ambassadeurs.
- Intégrer l’IA au quotidien métier: L'IA offre de nouvelles perspectives pour les RH, notamment un recrutement plus efficient, une marque employeur renforcée et une gestion des compétences améliorée. Elle peut aider à anticiper les besoins et automatiser des tâches répétitives et chronophages. Cependant, son déploiement est encadré par des enjeux éthiques et réglementaires majeurs, notamment l'AI Act européen qui classe certaines pratiques RH, comme le recrutement, parmi les systèmes "à haut risque", imposant ainsi plus de transparence et de contrôle humain. Il est aussi indispensable de lutter contre les biais algorithmiques, de garantir la protection des données et de maintenir l'humain au cœur des décisions. L'IA doit être un outil d'appui et non un substitut aux professionnels RH, dont l'expertise reste irremplaçable, en particulier pour évaluer la motivation et l'adéquation à un poste. Des initiatives existent, comme l'adaptation d'outils de mise en correspondance candidats/postes ou l'automatisation de tâches répétitives au Ministère des Armées et au CHU d’Angers. Le guide souligne ainsi l'importance de concilier innovation technologique et valeurs du service public.
- Automatiser ses processus RH: L'automatisation vise à simplifier les recrutements, souvent longs et fastidieux dans le secteur public, à fluidifier le tri des candidatures et à assurer un meilleur suivi des postulants. Le manque de réactivité et l'absence de réponse aux candidats non retenus nuisent à l'attractivité. Le numérique et l'IA permettent d'accélérer la diffusion des offres et d'envoyer des retours automatiques, tout en cherchant à humaniser la démarche. Cependant, la digitalisation doit d'abord passer par une réflexion de fond sur le sens du métier et une redéfinition des processus avant d'automatiser. L'IA générative peut notamment aider à traiter des données textuelles non structurées, comme des notes d'entretien, pour optimiser la publication d'annonces et affiner les recherches de candidats. L'automatisation libère du temps pour permettre aux gestionnaires RH de se recentrer sur l'accompagnement humain.
- Former son collectif de travail: La transformation numérique et l'essor de l'IA bouleversent les métiers RH, rendant la formation essentielle. Elle doit permettre aux professionnels de comprendre l'IA, ses apports et ses limites, et de monter en compétences pour limiter les risques de fractures internes. Une formation massive est nécessaire pour l'ensemble du collectif de travail. Les agents doivent notamment apprendre à formuler de bonnes requêtes (prompting) et à évaluer de manière critique les réponses de l'IA. L'intelligence émotionnelle et la pensée critique deviennent des qualités précieuses. Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) propose des modules de formation, comme le MOOC gratuit "Les fondamentaux de l'IA" et de nombreuses ressources en ligne sont disponibles.
- Bâtir un environnement de travail attractif: Encourager la culture numérique en outillant et formant les agents est un marqueur fort d'attractivité. Cela crée un environnement stimulant valorisant l'apprentissage continu et l'innovation. Pour les candidats, notamment les jeunes, cela signale un cadre propice à l'évolution professionnelle et à l'exercice de missions avec des outils adaptés. L'intégration de l'IA dans les environnements de travail futurs pèsera lourd dans le choix du premier employeur pour 65% des moins de 25 ans, comme souligné au début de cet article. Pour attirer des profils numériques recherchés, il est essentiel de valoriser le sens de la mission publique. Bâtir un espace de travail numérique souverain, sécurisé et respectueux des données est également un levier puissant.
Ce guide est une ressource précieuse pour les employeurs publics, tout comme les candidats en recherche d'emploi. C'est aussi un appel clair à la modernisation des pratiques RH dans la fonction publique : les employeurs publics doivent s'adapter aux nouvelles attentes des candidats en matière de digitalisation des pratiques RH et de communication sur les réseaux sociaux.