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Cartoscopie

Le tourisme construit-il durablement le monde ?

©Karine Hurel
Le 14 août 2018

En pleine expansion, l’activité touristique est un levier de croissance incontournable pour la plupart des pays, contribuant pleinement à la mondialisation économique et culturelle. Au risque d’être un facteur de développement peu durable.

Le tourisme a longtemps été considéré en France avec condescendance comme s’il s’agissait d’une activité de second rang, loin en image du sérieux de l’industrie ou de la primordiale agriculture. Reste qu’en 2017, ce secteur pèse plus de 7,3 % du PIB et 8 % de l’emploi national. Le pays peut également s’enorgueillir d’être la première destination touristique mondiale devant les États-Unis, l’Espagne et la chine avec 89 millions de visiteurs annuels.

Mais c’est à une autre échelle qu’il faut apprécier le phénomène. En 2017, plus 1,3 milliard de per-sonnes ont séjourné dans un pays étranger1. Ce chiffre a quasiment été multiplié par 3 en 30 ans et il pourrait dépasser le 1,8 milliard d’ici à 2030. L’activité touristique pèserait d’ores et déjà 10 % au PIB mondial et 1 emploi du 102.

La carte des déplacements touristiques internationaux montre à quel point le tourisme s’est globalisé. Peu de pays échappent à cette activité. Si le haut de la hiérarchie des pays accueillant le plus de touristes étrangers évolue peu, la tendance semble être à un renforcement de la concurrence entre pays : Asie et Afrique sur les 10 dernières années connaissent respectivement un taux de croissance de 6,6 et 6,8 % quand le monde est à 3,9 en moyenne, l’Europe à 2,5 et les Amériques à 4 %.

Nombreux sont les États a de plus en plus misé sur cette activité. On pense à la Grèce qui a vu le nombre de voyageurs passer de 15 millions en 2010 à 32 millions estimés en 20183. Mais le tourisme n’est pas l’apanage des pays en crise ou en développement : le Japon a ainsi multiplié depuis 2010 son taux de visiteurs par plus de 4. Cette activité constitue ainsi un levier de croissance incontournable pour la plupart des pays du monde.

Le tourisme est d’ailleurs un facteur considérable de mondialisation. Il contribue largement, au même titre que les réseaux numériques, à homogénéiser les pratiques, les attentes, les valeurs pour le meilleur comme pour le pire. C’est à la fois un ambassadeur et un marqueur de la société de consommation qui n’est évidemment pas sans poser question : en multipliant les déplacements dans le monde, en ayant un fort impact sur l’environnement, en renforçant la difficulté d’accès au logement pour les habitants des villes les plus attractives, en contribuant à l’acculturation de nombreuses communautés, le tourisme semble constituer un vecteur de développement peu durable, malgré ou tout simplement à cause de succès4.

La carte des déplacements touristiques internationaux

©Karine Hurel

1. D’après l’Organisation mondiale du tourisme (OMT)
2. Selon le World Travel & Tourism Council
3. Selon le ministère grec en charge de cette activité.
4. Même si paradoxalement certaines collectivités pour se développer, sortir de la crise ou simplement consolider leur croissance économique estiment sauver leur environnement grâce à l’activité touristique. Le cas de Bora-Bora en Polynésie française est emblématique de ce point de vue.

 

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