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Le droit souple et les ressources humaines dans l’administration : l’exemple des lignes directrices de gestion

Le 26 décembre 2023

Les lignes directrices de gestion (LDG) constituent l’une des innovations de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique1. Elles relèvent du « droit souple », sans force contraignante et obligation de normes. Au travers de ces LDG, les administrations doivent définir une stratégie pluriannuelle de pilotage des ressources humaines (RH), notamment en matière de gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences (GPEEC). Quel premier bilan peut-on tirer ?

Résumé

La loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 a instauré pour toutes les administrations l’obligation de définir des LDG. Si cette obligation est une obligation légale, les LDG, elles, relèvent du « droit souple », c’est-à-dire qu’elles ne revêtent pas de caractère impératif, mais ont pour principal objectif et intérêt d’orienter le comportement des organisations auxquelles elles s’adressent.

Au travers de ces LDG, les administrations doivent définir une stratégie pluriannuelle de pilotage des RH, notamment en matière de GPEEC.

Leur principale vocation est donc d’inciter l’ensemble des administrations à mettre en place des démarches de GPEEC considérées comme indispensables à une gestion dynamique et performante et dans une logique d’harmonisation des pratiques de toutes les organisations, qu’elles soient publiques ou privées. Les précédentes initiatives pour impulser de telles démarches n’ont toutefois pas eu les effets escomptés. Quels sont alors les intérêts et les limites de ces LDG ?

Les règles de droit souple échappent au formalisme qui s’impose aux normes juridiques.

La loi no 2019-828 du 6 août 2019, dite « loi de transformation de la fonction publique » a, dans son article 30, instauré les LDG dans les trois versants de la fonction publique : « L’autorité compétente édicte des LDG, après avis du comité social d’administration. Les LDG déterminent la stratégie pluriannuelle de pilotage des RH dans chaque administration et établissement public, notamment en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Les LDG fixent, d’une part, dans chaque administration, les orientations générales en matière de mobilité et, d’autre part, dans chaque administration et établissement public, les orientations générales en matière de promotion et de valorisation des parcours, sans préjudice du pouvoir d’appréciation de cette autorité en fonction des situations individuelles, des circonstances ou d’un motif d’intérêt général. Les LDG en matière de mobilité respectent les priorités énumérées au II de l’article 60. Ces deux catégories de LDG sont communiquées aux agents. » Les LDG constituent une illustration des règles de droit souple.

Qu’est-ce que le droit souple ?

Le droit souple, contrairement au droit dur qui se définit par son caractère obligatoire et contraignant, est constitué de règles non pas impératives, mais indicatives dont la vocation est d’orienter, proposer et recommander. Ces règles, de plus en plus nombreuses, se rencontrent dans les secteurs public et privé et dans toutes les branches du droit.

À titre d’exemples, les communiqués, recommandations de bonnes pratiques, avis, chartes, codes de bonne conduite, schémas, plans et les lignes directrices entrent dans cette catégorie du droit souple. Devant leur multiplication, le Conseil d’État a encadré cette pratique depuis 2013. Il propose à cet égard une définition2 du droit souple : « Il s’agit de l’ensemble des instruments répondant à trois conditions cumulatives :

  • ils ont pour objet de modifier ou d’orienter les comportements de leurs destinataires en suscitant, dans la mesure du possible, leur adhésion ;
  • ils ne créent pas par eux-mêmes de droits ou d’obligations pour leurs destinataires ;
  • ils présentent, par leur contenu et leur mode d’élaboration, un degré de formalisation et de structuration qui les apparente aux règles de droit. »

Les objectifs des règles de droit souple

Les principaux objectifs du droit souple sont, d’une part, de lutter contre l’inflation normative et la profusion de règles juridiques applicables dans tous les domaines et, d’autre part, le souci de simplification puisque les règles de droit souple échappent au formalisme qui s’impose aux normes juridiques. Les observateurs soulignent en outre que, malgré l’absence de caractère impératif qui les caractérise, les instruments de droit souple ont souvent prouvé leur efficacité. Ils soulignent notamment que le seul fait d’exprimer une analyse ou une orientation peut parfois suffire à influer sur le comportement des acteurs économiques.

C’est sans aucun doute l’objectif du législateur qui a instauré les LDG dans la fonction publique. Alors que le statut de la fonction publique est souvent critiqué pour sa rigidité, les LDG doivent permettre aux administrations, tant dans leur méthodologie d’élaboration que dans leur formulation, de définir des orientations et fixer le cadre des actions à mener adaptées à leurs situations et problématiques.

Le recours au droit souple pour instaurer les LDG et des démarches de GPEEC

Les LDG s’appliquent à l’ensemble de la fonction publique et portent notamment sur la définition d’une stratégie pluriannuelle de pilotage des RH, en particulier en matière de GPEEC. Les initiatives pour faire en sorte que les organisations publiques et privées mettent en place des démarches de GPEC/GPEEC ont été nombreuses au cours des quatre dernières décennies.

L’une des premières apparitions de la GPEEC dans la fonction publique remonte à 1989. La circulaire dite « Rocard », relative au renouveau du service public en date du 23 février 19893 présente la gestion prévisionnelle comme « l’instrument privilégié d’une politique de valorisation des RH, car elle seule peut assurer la cohérence entre l’évolution des missions, des métiers et des qualifications et les politiques de gestion du personnel (recrutement, formation, mobilité, qualifications, promotions, etc.) ». L’objectif phare de cette circulaire était de moderniser et dynamiser la gestion des RH en dépassant notamment la gestion purement statutaire et en développant une gestion plus centrée sur les métiers et les compétences. La circulaire affirmait à cet égard la nécessité de mettre en place dans toutes les administrations une GPEEC qui devait permettre « une allocation optimale des emplois aux besoins des différentes administrations en fonction des priorités définies par le Gouvernement ». Elle n’avait pas force de loi ni de règlement, mais énonçait des lignes directrices et des recommandations aux agents de l’administration d’État pour mettre en œuvre les politiques gouvernementales.

La nécessité de mettre en place une GPEEC est réaffirmée au début des années 2000. La loi organique relative aux lois de finances (LOLF) promulguée le 1er août 20014 vise à introduire une logique de performance et une obligation de résultat, dans des administrations gérées antérieurement selon une logique de moyens. La performance repose sur la cohérence entre la stratégie de l’administration et la gestion de ses RH. Il s’agit donc de mettre les choix de politiques générales et d’allocation des ressources en cohérence avec les ambitions stratégiques, et ce, dans une logique de programmation pluriannuelle. Au regard des enjeux et évolutions auxquels les administrations doivent faire face, la GPEEC apparaît comme une démarche incontournable « s’imposant » à tous les ministères pour poursuivre cet objectif de performance. Pour autant, cette nécessité impérieuse ne fait l’objet d’aucune obligation formelle et généralisée adressée aux administrations d’État. Les directives ont été données par chaque ministère en fonction de leurs besoins et priorités. C’est dans ce contexte que le référentiel interministériel des métiers de l’État (RIME) verra le jour en 2006. L’objectif principal du RIME est de rendre les emplois de l’État « plus lisibles au niveau interministériel et de forger un langage commun à tous les services, particulièrement nécessaire dans le cadre de la gestion prévisionnelle des RH, de la mobilité et de la valorisation des parcours professionnels ou de la mutualisation des prestations et dispositifs de formation ». Aujourd’hui, de nombreux ministères ont élaboré leur référentiel métiers. Mais si la démarche métiers et compétences constitue la première étape d’une démarche de GPEEC, peu de ministères peuvent se vanter d’avoir mis en place une véritable stratégie pluriannuelle de gestion de leurs RH.

Même s’il s’agit d’une obligation de « négocier » et non pas de « conclure », c’est bien une obligation légale qui s’impose aux entreprises concernées et qui les expose à des sanctions en cas de non-respect.

En 2005, la GPEC devient obligatoire dans le secteur privé. La loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 20055 instaure l’obligation de négocier des accords de GPEC dans les entreprises et établissements de plus de 300 salariés. Les objectifs de cette obligation sont d’inciter les entreprises à adopter une démarche d’anticipation, à traiter en amont par le dialogue social, les évolutions de l’emploi et éviter ainsi les plans sociaux. Cette obligation porte notamment sur l’information du comité d’entreprise (documents à fournir), la mise en place d’un dispositif GPEC (outils d’anticipation et outils d’accompagnement), les conditions d’accès et de maintien dans l’emploi des salariés âgés et de leur accès à la formation professionnelle. Même s’il s’agit d’une obligation de « négocier » et non pas de « conclure », c’est bien une obligation légale qui s’impose aux entreprises concernées et qui les expose à des sanctions en cas de non-respect.

La loi du 3 août 2009, relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique6 constitue une nouvelle étape en matière de GPEEC dans la fonction publique en prévoyant l’élaboration de plans de gestion prévisionnelle des RH. L’un des objectifs de cette loi est d’offrir aux fonctionnaires les moyens de construire de véritables parcours professionnels, notamment en leur garantissant des droits nouveaux en matière de mobilité et d’accompagnement professionnel. Ces plans ne sont pas obligatoires, mais cette loi du 3 août 2009 place la gestion des RH au cœur de la réforme de la fonction publique.

La loi de transformation de la fonction publique du 6 août 20197 est donc la dernière réforme en date qui vise à moderniser la gestion des RH au sein de la fonction publique. Ces objectifs de modernisation de la gestion des RH et de mise en place de démarches de GPEEC dans les administrations sont loin d’être nouveaux comme en témoignent les quelques exemples d’initiatives que nous venons de rappeler. La méthode utilisée, en revanche, est plus novatrice. Elle ne se contente plus d’affirmer le rôle essentiel des RH en général et des démarches de GPEEC en particulier dans les modes de gestion des administrations publiques, elle instaure une obligation légale pour ces dernières de définir une stratégie pluriannuelle de pilotage des RH et de mise en place d’une GPEEC. Cette obligation s’applique aux trois versants de la fonction publique, y compris aux collectivités territoriales qui sont pourtant guidées par le principe de libre administration. Si elle n’a pas été considérée comme contraire à ce principe, c’est sans doute qu’elle n’implique pas une ingérence directe dans les décisions internes des collectivités concernées. En effet, les LDG qui doivent définir la stratégie pluriannuelle de pilotage des RH sont élaborées librement par chaque collectivité en cohérence avec ses orientations et priorités politiques. Rappelons, en outre, que s’agissant de droit souple, ces LDG, une fois fixées, ne constituent pas une véritable contrainte pour la collectivité qui les a définies. Quels sont alors les intérêts et avantages de ces LDG ?

Les objectifs et intérêts des LDG

Initier une réflexion sur la stratégie RH des administrations

La définition des LDG en matière de stratégie pluriannuelle de pilotage des RH implique en amont un état des lieux et une analyse sur la situation de l’organisation, ses orientations, priorités, forces et faiblesses au regard de ses RH. C’est sur la base de ces éléments d’analyse que doit être définie une stratégie qui va être déclinée en plans d’actions à mener pour mettre en cohérence stratégie et ressources disponibles à court et moyen termes.

Le premier intérêt que l’on peut voir dans cette obligation de définir des LDG porte donc sur le travail nécessaire à leur définition : même si, une fois fixées, les LDG ne revêtent pas de caractère impératif pour leurs auteurs, au moins auront-elles permis cette réflexion de fond et ouvert la voie à la mise en œuvre de démarches de GPEEC.

Une harmonisation des pratiques et une généralisation des démarches de GPEEC

Dès les années 2000, les ministères ont été invités à mettre en place des outils destinés à avoir une meilleure connaissance de leurs emplois et compétences afin de favoriser la mobilité interne. Le RIME devait ainsi favoriser le développement de la mobilité entre ministères.

Depuis une vingtaine d’années, la tendance est également au décloisonnement des trois fonctions publiques. L’objectif annoncé et régulièrement réaffirmé de réduction des effectifs de la fonction publique d’État s’est accompagné de mesures destinées à faciliter une meilleure circulation des fonctionnaires d’État vers les deux autres versants (fonction publique territoriale, en particulier).

Dans ce contexte, l’harmonisation des pratiques et outils RH de l’ensemble des administrations publiques devient un enjeu important d’autant que la gestion des effectifs et des compétences est cruciale pour chacune d’entre elles. Mais la recherche de l’harmonisation des pratiques dépasse les limites de la fonction publique. On constate une tendance récurrente à la recherche d’un rapprochement entre le secteur privé et le secteur public (transposition de réformes du privé dans le public, assouplissement des règles et modalités de recrutement de salariés du privé dans la fonction publique, etc.).

Comme nous l’avons vu, c’est la loi no 2005-32 du 18 janvier 2005 qui a instauré une obligation de négocier des accords de GPEC dans les entreprises privées de plus de 300 salariés. Ces dispositions ont été aménagées à plusieurs reprises, notamment par la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi8 et par les cinq ordonnances Macron du 22 septembre 20179. Ce sont ces dernières qui ont introduit la notion de « gestion de l’emploi et des parcours professionnels » (GEPP) parfois présentée comme la remplaçante de la GPEC10. Les employeurs privés ont maintenant l’obligation d’engager tous les trois ans « notamment sur le fondement des orientations stratégiques de l’entreprise et de leurs conséquences […], une négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels et sur la mixité des métiers […] » (C. trav., art. L. 2442–20).

Il nous semble que l’on peut faire un parallèle entre cette obligation de négocier des accords de GPEC/GEPP dans les entreprises privées et l’obligation de définir des LDG dans les administrations publiques.

Incitation au développement du dialogue social

Le dialogue social est un sujet majeur de la réforme de 2019, comme en témoigne le titre 1er « Promouvoir un dialogue social plus stratégique et efficace dans le respect des garanties des agents publics ». L’élaboration des LDG s’inscrit dans ce processus de promotion du dialogue social puisqu’il est stipulé que les LDG sont édictées après avis de l’instance représentative du personnel compétente.

Les administrations publiques sont tenues d’engager un dialogue avec les syndicats et les représentants des agents publics pour discuter des orientations stratégiques en matière de gestion des RH. Ce processus favorise donc la participation des acteurs du secteur public à la prise de décision et renforce le dialogue social. Même si leur avis n’est que consultatif, le processus de consultation en lui-même implique une plus grande transparence quant aux objectifs, priorités et mesures prévues en matière de RH. Cette transparence doit contribuer à renforcer la confiance des parties prenantes dans le processus de gestion des RH.

Transparence et équité dans les décisions liées aux évolutions de carrière

C’est l’un des changements majeurs apportés par cette réforme : les LDG doivent définir des orientations générales en matière de promotion et de valorisation des parcours professionnels notamment en matière d’avancement de grade et de promotion interne.

Cela signifie que l’administration définit, en amont, des critères généraux au regard desquels seront prises les décisions individuelles d’avancement et de promotion. Ces décisions individuelles sont donc censées s’inscrire dans un cadre plus général, être plus objectives et moins motivées par des considérations d’ordre personnel. Si elle constitue un intérêt certain du fait de la transparence qu’elle instaure, la définition de ces critères et la façon dont les décisions individuelles seront prises doivent faire l’objet d’une vigilance particulière.

En effet, en principe et du fait de leur absence de caractère impératif, les LDG ne peuvent faire l’objet d’un recours devant le juge administratif. Toutefois, pour être applicables et garantir une égalité de traitement entre agents, les LDG doivent offrir un cadre d’appréciation suffisamment clair. Leur application devient alors très délicate : elles ne doivent pas avoir de caractère impératif, mais leur respect s’impose à l’administration sous la réserve essentielle mentionnée « des situations individuelles, des circonstances ou d’un motif d’intérêt général » 11. Autrement dit, dans le cas où un agent attaquerait une décision qui ne respecterait pas les indications fixées par les LDG, l’administration devra être en mesure de justifier de circonstances particulières ou d’un motif d’intérêt général, ce qui relativise le caractère « non impératif » de ces LDG.

Les petites collectivités12

Comme déjà indiqué précédemment, la GPEEC n’est pas d’une grande réalité pour les collectivités employant moins d’une cinquantaine d’agents. Parler du renouveau de la GPEEC pour elles n’a pas vraiment de sens. Pour autant, certains observent quelques signaux d’évolution dans la prise en compte de la GPEEC.

« Avec les petites collectivités, la GPEEC vient d’elle-même et n’est jamais très loin, dès lors qu’on aborde les questions concrètes de RIFSEEP, de fiches de postes, de départs à la retraite et de démographie des agents. L’ancrage des démarches de GPEEC progresse mais passe par des chemins détournés. »

« Des réflexions émergent sur l’organisation, les besoins de compétences, sur les recrutements de catégories A et B. Les petites collectivités et les élus n’ont plus tendance à renouveler les choses à l’identique. Ils tendent à questionner et à repenser les conditions d’organisation et les activités. Ils sont également dans la volonté d’attirer des compétences nouvelles et recherchent des profils atypiques. On l’observe sur l’évolution du profil attendu des secrétaires de mairie. »

Les services/directions des RH sont aspirés par les urgences du quotidien et ont tendance à mettre le sujet de la GPEEC sous la pile des urgences opérationnelles alors que l’un des objectifs de la GPEEC est précisément de développer une culture de l’anticipation pour éviter de travailler dans l’urgence.

Les limites des LDG

La définition des LDG : un exercice complexe

L’année 2020 ayant été considérablement perturbée par la crise sanitaire, les conditions dans lesquelles se sont déroulées la préparation et la mise en œuvre de ce chantier n’ont pas été particulièrement favorables. Malgré les aides pratiques, guides et autres assistances mises à leur disposition, de nombreuses administrations se sont trouvées en difficulté pour mener ce projet, notamment les petites et moyennes collectivités dans la fonction publique territoriale.

Le manque de temps et de ressources adaptées (quantitatives et qualitatives) ne leur ont donc pas permis de prendre le recul nécessaire pour mener sereinement l’étape préalable d’état des lieux et d’analyse de leur situation dont nous avons vu qu’elle constituait pourtant l’intérêt majeur de la démarche. Le résultat est que, dans de nombreux cas, la définition des LDG correspond plus à une contrainte (supplémentaire) dont il a fallu s’acquitter qu’à une réelle réflexion structurante sur les enjeux et stratégies à mettre en œuvre en matière de RH.

Le manque de temps et l’insuffisance des ressources constituent les principaux facteurs d’empêchement.

La mise en œuvre des LDG : confrontation entre nécessité et réalité

Une étude publiée par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) en mai 202213 faisait apparaître que la GPEEC était jugée incontournable par les collectivités territoriales, car transverse à la stratégie RH, mais qu’elle n’apparaissait qu’au 5e rang de leurs chantiers prioritaires. Le manque de temps et l’insuffisance des ressources constituent les principaux facteurs d’empêchement. Les réformes se succèdent et monopolisent le temps et l’énergie des équipes RH qui par ailleurs doivent faire face à des difficultés de recrutement récurrentes. La professionnalisation des agents des services RH est en outre variable en fonction de la taille des administrations et toutes ne disposent pas des compétences nécessaires à la conduite de tels projets.

À cela s’ajoute le manque d’outils mis à disposition des administrations pour leur permettre de mettre en place des démarches de GPEEC. Les systèmes d’information de gestion des RH (SIRH) dont le cœur de métier est la paie et la gestion des carrières n’offrent pas forcément les fonctionnalités nécessaires. Cette situation aboutit au paradoxe suivant : les services/directions des RH sont aspirés par les urgences du quotidien et ont tendance à mettre le sujet de la GPEEC sous la pile des urgences opérationnelles alors que l’un des objectifs de la GPEEC est précisément de développer une culture de l’anticipation pour éviter de travailler dans l’urgence (pilotage des réorganisations, remplacement de personnels, reclassements, etc.).

  1. L. no 2019-828, 6 août 2019, dite de « transformation de la fonction publique ».
  2. https://www.conseil-etat.fr/actualites/etude-annuelle-2013-le-droit-souple
  3. Circ. 3 août 1989 : JO 24 févr. 1989 (https://www.vie-publique.fr/discours/224964-circulaire-michel-rocard-23021989-renouveau-du-service-public).
  4. LO no 2001-692, 1er août 2001, relative aux lois de finances, dite « LOLF ».
  5. L. no 2005-32, 18 janv. 2005, de programmation pour la cohésion sociale.
  6. L. no 2009-972, 3 août 2009, relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.
  7. L. no 2019-828, 6 août 2019, de transformation de la fonction publique.
  8. L. no 2015-994, 17 août 2015, relative au dialogue social et à l’emploi.
  9. Ord. no 2017-1385, 22 sept. 2017, relative au renforcement de la négociation collective ; Ord. no 2017-1386, 22 sept. 2017, relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales ; Ord. no 2017-1387, 22 sept. 2017, relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail ; Ord. no 2017-1388, 22 sept. 2017, portant diverses mesures relatives au cadre de la négociation collective et Ord. no 2017-1389, 22 sept. 2017, relative à la prévention et à la prise en compte des effets de l’exposition à certains facteurs de risques professionnels et au compte professionnel de prévention.
  10. « La GEPP a-t-elle remplacé la GPEC ? », LHRH Conseils mai 2022.
  11. « Les lignes directrices de gestion, à manier avec précaution », Gaz cnes août 2020.
  12. Vers de nouvelles pratiques de GPEEC dans les collectivités territoriales, étude, 2022, CNFPT, p. 12.
  13. Vers de nouvelles pratiques de GPEEC dans les collectivités territoriales, op. cit.
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