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DossierMartin Julier-Costes : « Les enjeux autour des décès se jouent aussi à l’échelle locale. »

Si la majorité des Français continuent à être inhumés, ils sont de plus en plus nombreux à choisir la crémation, signe d’un recul du religieux, détachement des racines, et prise en compte d’enjeux économiques et écologiques qui viennent là aussi modifier nos habitudes. Au point d’envisager peut-être, prochainement, de nouvelles pratiques comme l’humusation (laisser des microbes décomposer les corps en humus), ou l’aquamation (qui permet de dissoudre les corps dans une solution aqueuse) ? Entretien avec Martin Julier-Costes, spécialiste de la mort et des rites funéraires.
Martin Julier-Costes
Socio-anthropologue, spécialiste de la mort et des rites funéraires, Martin Julier-Costes est chercheur associé au laboratoire de sciences sociales Pacte, à l’Université Grenoble Alpes.
Au côté de la sécularisation de notre société, la crémation a connu aussi un essor très important, son taux en 1980 était de 1 %, il est aujourd’hui de 43 %.
Quelles sont les évolutions sociétales par rapport à la mort et au deuil que vous pouvez observer en tant que chercheur ?
C’est une question vaste, les chercheur·ses en sciences sociales s’accordent sur plusieurs transformations : démographiques, économiques, technologiques, médicales, sociales et religieuses. Grâce à une chute importante de la mortalité infantile et des progrès de l’hygiène et de la médecine, nous vivons plus longtemps et en meilleure santé, mais nous faisons face désormais au vieillissement de notre population qui engendre un nombre croissant de décès, plus de 630 000 en 2023. Les lieux du décès ont également changé, tout comme ceux de la naissance, du domicile aux structures médicalisées. Conjointement, leur prise en charge (ou en soin) s’est professionnalisée au point qu’il n’est plus possible de faire sans ces professionnels, de la naissance au décès. Ce mouvement va de pair avec la médicalisation de la mort, le médecin étant, par exemple, la seule personne habilitée à déclarer le décès, l’émergence des soins palliatifs ou encore les débats autour de l’aide médicale à mourir. Au côté de la sécularisation de notre société, la crémation a connu aussi un essor très important, son taux, en 1980, était de 1 %, il est aujourd’hui de 43 %. Un autre marqueur important est l’urbanisation de nos vies qui transforme nécessairement nos manières de signifier et de représenter la mort et nos liens avec les morts. La récente numérisation de nos vies s’étend également jusqu’au décès et au-delà, et pose des questions éthiques, morales et économiques qui sont encore peu débattues. En effet, à qui appartiennent les données ? Celles des vivants aux grands groupes (GAFAM), mais quand est-il lorsqu’on meurt ? Légalement toujours aux GAFAM. Quid du droit à l’oubli numérique ? Est-il possible de l’appliquer ? Au nom de quoi ? En somme, à qui appartiennent les donnes numériques post-mortem ?
Concernant le deuil, il est admis aujourd’hui qu’il est rendu moins visible, plus intime, alors qu’il était auparavant plus ostensible et ses expressions plus publiques. Cette invisibilisation est le corollaire de l’individualisme, qui – rappelons-le – est un choix social et collectif. Autrement dit, la norme actuelle du deuil nous impose de passer d’abord par l’intime, mais nous permet également de choisir qui l’on informe de son vécu et dans quels espaces (professionnels, amicaux, sportifs, associatifs, etc.). Chacun voudrait choisir sa trajectoire de deuil et l’accent est mis sur la singularité de la relation avec le défunt. Les formes du deuil se renouvellent donc, mais il reste un élément fondamental qui ne change pas, les personnes en deuil, hier comme aujourd’hui, sont traitées d’une manière particulière, elles sont comme mises de côté pendant un certain temps, on les assigne à un statut liminaire. Beaucoup évoquent ce sentiment d’être mis un peu à l’écart, on ne sait pas très bien comment leur parler, comment les aborder, se comporter avec elles.
Quels sont notamment les pratiques et les rites funéraires en plein essor ?
Bien que sécularisée, notre société compte beaucoup de croyants, et les grandes religions monothéistes restent des références majeures lorsqu’on parle de rites funéraires. À leur côté, et avec l’essor de la crémation, on observe une tendance à la personnalisation des obsèques pour les cérémonies civiles, l’enjeu principal du rite funéraire étant de représenter l’identité de la personne décédée. Avec des outils identiques (musiques, diaporama, prises de paroles, etc.), le rite funéraire civil insiste sur la singularité du défunt en évoquant ses différentes facettes afin que l’assemblée les reconnaisse. Comme le disait l’anthropologue, Louis-Vincent Thomas1, ces rites funéraires personnalisés visent le réconfort des vivants avant tout et se préoccupent moins collectivement du devenir du mort dans l’au-delà, question alors reléguée dans la sphère intime. Autrement dit, dans une société d’individus, les rites funéraires contemporains célèbrent l’individu. Les pompes funèbres l’ont d’ailleurs très bien compris et vendent des rites à la carte, plus personnalisés en fonction des choix du défunt et des familles. Conjointement, on constate que plusieurs rites peuvent être réalisés pour un même défunt. Son identité étant constituée de plusieurs cercles d’appartenance, les membres de ces derniers se réuniront au décès lors du rite officiel (institué), mais pourront également réaliser des rites plus privés ou semi-publics, à son travail, son club de sport ou son loisir, dans tel groupe d’amis. Ces différentes ritualisations sont à considérer comme complémentaires et tout aussi significatives, entre celles instituées et les autres, plus instituantes.
Pourquoi la mort est-elle encore trop souvent un point faible des politiques publiques ?
Les politiques publiques ne peuvent pas tout, nous sommes passés d’un modèle où les familles étaient très présentes (veillées, prise en charge du corps, funérailles, etc.) à un modèle où des professionnels, formés et payés pour, s’occupent et prennent soin de nos mourants et de nos morts. Je constate donc que nous leur accordons notre confiance pour des moments majeurs de notre existence (naissance, la fin de vie, le décès, la mise en terre, la crémation et les rituels). Ces professionnels assurent ainsi des fonctions anthropologiques essentielles : faire disparaître les corps, organiser et réaliser les funérailles. Je me permets un aparté ici : nous avons applaudi les soignants lors de la pandémie, mais nous avons oublié les salariés du funéraire. Heureusement que ces hommes et ces femmes étaient là pour prendre en charge nos morts en 2020 et 2021. Idem pour les attentats du Bataclan ou à Nice, ce sont eux qui ont ramassé les corps et en ont pris soin.
Toutefois, le politique n’est jamais loin puisque ces professionnels font appliquer la loi et les réglementations funéraires votées et préconisées par les politiques. Même si on le sait moins, une collectivité a obligatoirement un service dédié au cimetière. Ce dernier est très réglementé : faites parler les conservateur·rices de cimetières et les fossoyeur·ses, le juridique fait pleinement partie de leur travail. Idem concernant les crématoriums, leur gestion dépend des élus locaux, qui ont donc la main sur ces sujets.
Pour aller plus loin sur ces sujets, il faut lire le travail de thèse d’Alèxe Duvaut2 qui renvoie notamment à la définition du service public et son action lorsqu’on parle de « la mort ». Est-ce qu’il s’agit de la fin de vie ? Pour l’heure, ces questions dépendent du ministère de la Santé. Du funéraire ? Cela dépend sur certaines questions de la santé, mais pour d’autres du ministère de l’Intérieur. Doit-on également intégrer le deuil et son accompagnement en matière de politiques publiques ? Pour la caisse d’allocation familiale (CAF), la réponse est « oui » puisque ses agents accompagnent les familles confrontées à un décès, mais ceci ne couvre pas toutes les situations de décès. Récemment, les députés ont également planché sur les congés deuil, dont certains ont bénéficié d’un allongement. Tous ces exemples démontrent donc bien que les politiques publiques ne sont pas si absentes que ça…
On entend souvent qu’il n’y a plus de place dans les cimetières, mais c’est aussi une question de gestion des personnels et du budget vis-à-vis des concessions arrivant à terme. Nombreuses sont les mairies à ne pas s’être préoccupées du renouvellement des concessions pendant plusieurs années, voire des décennies.
Quelles sont les initiatives de l’État et des collectivités pour faire autrement ?
Aux côtés de ce qu’il fait déjà, l’État et ses représentants pourraient, par exemple, considérer que « la mort » ne soit plus être considérée comme un marché. En effet, depuis 1993 et la loi Sueur3, « la mort » est un marché comme un autre, c’est-à-dire qu’il dépend des règles de la concurrence, du libre marché, de la spéculation financière, des fonds de pension, etc. Ceci est légal. De grands groupes se partagent la moitié du chiffre d’affaires annuel, l’autre moitié étant aux indépendants et une toute petite part au public (société d’économie mixte [SEM], société publique locale [SPL], régie) et il n’est contesté nulle part qu’effectivement le coût des obsèques a augmenté. Face à ce constat, le collectif Pour une sécurité sociale de la mort plaide pour un financement des obsèques mutualisé, tout comme on peut le faire depuis longtemps, avec la naissance, notamment. Les collectivités de leur côté peuvent aussi prioriser leurs actions avec un service doté d’un minimum de fond et de personnel, par exemple, pour gérer les concessions arrivant à terme et ainsi gérer les emplacements disponibles, pour entretenir le cimetière comme un espace paysager à part entière, pour réfléchir à sa délégation de service public si elle possède un crématorium ou encore autoriser l’utilisation de sa salle communale à des célébrations d’obsèques comme elle peut le faire pour des mariages ou des naissances.
Nous explorons notamment dans ce dossier des expérimentations menées par des collectivités locales pionnières visant à mieux prendre en compte ces changements (Lyon, Nantes, Brest et Paris) : comment réinventer les obsèques (rites et pratiques) et comment intégrer les nouvelles pratiques (essor de la crémation) et intégrer les enjeux écologiques et la justice sociale. Quel regard portez-vous sur ces expérimentations ?
Ces expérimentations sont récentes et assez inédites dans le paysage funéraire français. Il est rare que des élus locaux se saisissent de ces questions et en fassent un marqueur fort de leur mandature, d’autant plus ici qu’il s’agit d’allier justice sociale et écologie. C’est une manière assez habile de lutter contre la marchandisation de la mort en proposant et en valorisant le service public et de sensibiliser à l’impératif écologique autour d’un enjeu commun, les morts. Il faut toutefois recadrer ces initiatives au niveau national, les initiatives de Lyon, Nantes et Paris sont très intéressantes, mais reste assez esseulées. Ces collectivités le savent et jouent à la carte de la visibilité afin de sensibiliser d’autres collectivités sur ces sujets en leur prouvant qu’il est possible d’avoir une action auprès de leurs administrés. Ajoutons tout de même que les collectivités prennent déjà à leur charge, par exemple, les obsèques des « indigents », définit comme « sans ressource », et sont obligées d’appliquer la loi zéro phyto4 pour entretenir leurs espaces verts, dont le cimetière fait partie. L’avenir nous dira si les initiatives à Lyon, Nantes et Paris sont crédibles aux yeux des professionnels et du marché, et validées par les citoyens.
Nous abordons également le modèle économique et le marché du funéraire aux mains d’opérateurs privés, avec la création d’une SPL par la ville de Paris qui propose une tarification sociale pour rendre les rites funéraires plus accessibles. Cet enjeu de justice sociale va-t-il devenir plus important à l’avenir ?
L’exemple parisien illustre bien les ambivalences et les contradictions du paysage politico-funéraire français. La ville de Paris crée aujourd’hui une SPL pour contrer les privés, mais elle avait, quelques années plus tôt, confié la gestion du crématorium du Père-Lachaise à un gestionnaire privé, Funécap, avec une délégation de service public particulièrement longue par rapport aux pratiques courantes. Cette « perte » pour le public a fait grand bruit dans le secteur, mais c’est bien la ville de Paris qui, comme elle en a le droit, a choisi un délégataire privé, alors que le crématorium était historiquement rattaché au service public. Ceci démontre que les collectivités ont un poids très important en matière funéraire et que le jeu politique et économique se déroule dans un contexte de marché. Comme il l’a d’ailleurs toujours assumé, c’est un sénateur socialiste, Jean-Pierre Sueur, qui a œuvré à faire passer la loi de libéralisation des obsèques en 1993 et notamment à abroger « le monopole communal des pompes funèbres ». Ce dernier l’a encore célébré et vanté lors de l’anniversaire des trente ans de la loi au Sénat en septembre 2023. Lors des débats à cette occasion, peu dans l’hémicycle ont remis en cause la loi, c’était même l’inverse, la majeure partie s’en félicitait tout en valorisant le bénéfice pour les familles.
Le cadre de la loi semble donc encore très solide, mais on observe aussi que les collectivités ont des marges de manœuvre importantes en la matière. Avec la décentralisation, le poids des métropoles et une population vieillissante, les enjeux autour des décès se jouent aussi à l’échelle locale et certain·es élu·es ont décidé d’activer ces leviers, comme on l’a évoqué plus haut.
Au côté des collectivités, il faut également citer les initiatives citoyennes comme la création du Collectif de la sécurité sociale, l’émergence des coopératives funéraires et les associations comme Jalmalv, Vivre son deuil, Empreintes, Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), Humusation France, Humo sapiens, initiatives qui visent toutes à faire changer les regards sur « la mort » (fin de vie, décès et deuil).
Autre enjeu, la transition écologique qui devient aussi très importante : comment les collectivités locales peuvent-elles intégrer ces enjeux écologiques ?
Oui, la préoccupation est croissante, mais on part de loin d’une certaine manière. Bien que plusieurs initiatives soient médiatisées, l’impératif environnemental en matière funéraire n’est pas encore une priorité. Les débats sur la terramation (la transformation du corps en humus, comme alternative à l’inhumation ou la crémation) sont très intéressants, mais encore peu significatifs au regard des pratiques au national. L’extension aux cimetières de la loi Labbé (« zéro phyto »), qui interdit depuis 2021 l’utilisation des produits phytopharmaceutiques dans les espaces verts et la voirie, a eu cependant une réelle incidence. Elle a engendré une certaine prise de conscience, on se rend compte que les cimetières sont des espaces qu’il est possible de (re)naturaliser et où on peut valoriser la biodiversité, avec des partenariats avec la ligue de protection des oiseaux (LPO), par exemple. On cite aussi régulièrement, et à juste titre, le cimetière naturel de Souché, à Niort (Deux-Sèvres) où les personnes qui acceptent de s’y faire inhumer signent une charte les engageant à ne pas faire appel à de la thanatopraxie (donc aux produits chimiques de conservation), à ne pas être habillées de certaines matières non biodégradables, à ne pas avoir de chaussures, pas de caveau, à ce que le bois de leur cercueil ne soit pas traité. Cela n’est légal que si c’est une alternative, pas une obligation. Dans le même esprit, différentes collectivités ont décidé aussi de faire des cimetières des espaces de verdures, des parcs, des « poumons verts ». L’Île-de-France a, par exemple, mené une étude d’envergure sur la biodiversité avec l’étude Cimetières vivants5. On peut citer également l’enquête des services funéraires de la ville de Paris en 2017 et celle de 2024, sur l’empreinte carbone des rites funéraires mandatée par la chambre syndicale nationale de l’art funéraire (CSNAF). Une recherche académique, le programme F-Compost, financé par l’Agence nationale de la recherche, vient d’ailleurs de démarrer sur le compostage animal en vue de transférer la technique aux êtres humains. On observe donc clairement un élan.
Notons que cet élan est alimenté par des mouvements citoyens, tels que les coopératives funéraires, certains indépendants et les associations Humusation France et Humo sapiens, qui œuvrent à faire advenir soit l’humusation pour la première, soit plus largement la terramation pour la seconde. La terramation renvoie à la transformation du corps en humus, il s’agit de participer au cycle du vivant, tout en proposant une autre manière d’appréhender la mort. L’idée est que le corps, après le décès, puisse encore être utile et contribuer à régénérer la terre. L’humusation est l’une des déclinaisons techniques possibles, mais elle n’est autorisée nulle part. Les procédés hors-sol et en sous-sol par contre sont légalisés dans plusieurs états états-uniens, en Angleterre et plus récemment en Allemagne.
Enfin, quel rôle peuvent jouer les collectivités locales pour renouveler les politiques funéraires ?
Les collectivités, comme les professionnels du funéraire, appliquent la loi. Certain·es élu·es font du funéraire un marqueur de leur mandat, mais ils ou elles sont encore rares. Notons également que les collectivités peuvent tout à fait faire pencher la balance du côté qu’elles estiment pertinent puisqu’elles en ont les compétences. Nous l’avons vu plus haut avec le cimetière (et notamment l’application de la loi Labbé), mais sur le foncier, c’est elle là encore qui s’occupe des concessions et leur reprise quand elles sont échues. On entend souvent qu’il n’y a plus de place dans les cimetières, mais c’est aussi une question de gestion des personnels et du budget vis-à-vis des concessions arrivant à terme. Nombreuses sont les mairies à ne pas s’être préoccupées du renouvellement des concessions pendant plusieurs années, voire des décennies. Une collectivité définit également ce qu’elle souhaite faire valoir dans sa délégation de service public pour un crématorium et la panoplie est large. Autre exemple, avec la loi 3DS6, l’argent issu de la valorisation des métaux des crématoriums doit être désormais destiné à l’intérêt général, afin de « financer la prise en charge des obsèques des personnes dépourvues de ressources suffisantes ou faire l’objet d’un don à une association d’intérêt général ou à une fondation reconnue d’utilité publique ». À Lorient, par exemple, c’est plus de 40 000 euros et pour la Métropole d’Aix-Marseille-Provence, c’est plus de 90 000 euros en 2023. Autrement dit, on peut observer que les collectivités ont du pouvoir, celui déjà de faire appliquer la loi, mais faut-il encore s’en saisir et prendre le temps de réfléchir à une réelle politique funéraire à l’échelle locale.
Certain·es élu·es font du funéraire un marqueur de leur mandat, mais ils ou elles sont encore rares.
Un droit funéraire à moderniser
Dans son rapport Des droits gravés dans le marbre ? La personne défunte et ses proches face au service public funéraire, publié le 26 octobre 2021, Claire Hédon, la Défenseure des droits, dressait le constat d’un droit funéraire complexe, mal connu des collectivités et des familles et ayant peu évolué depuis plusieurs décennies. Il nous semble intéressant, dans le cadre de ce dossier, de revenir sur ce rapport7 en publiant un extrait du résumé.
« La règlementation funéraire est ancienne et mal connue des familles ou des proches concernés, comme des collectivités. L’inhumation révèle souvent dans l’urgence le régime juridique d’une sépulture, parfois en terrain commun, ou d’une concession funéraire, dont l’acquisition et la durée sont régies par des règles strictes très souvent méconnues. La crémation, de plus en plus fréquente, repose aussi sur des règles souvent ignorées.
Or, cette règlementation, d’inspiration napoléonienne, se révèle peu adaptée aux évolutions de la cellule familiale, et correspond de moins en moins aux attentes des proches du défunt, qui souhaitent voir les services publics « à leur chevet » et à leurs côtés dans leurs démarches, plutôt qu’en simples gestionnaires des cimetières. Ces constats ont conduit la Défenseure des droits à formuler des propositions pour mieux respecter la volonté des personnes défuntes et les droits de leurs proches, et pour mieux lutter contre les inégalités sociales, notamment en assurant aux personnes précaires l’accès à des obsèques dignes.
Elle appelle à une simplification du droit funéraire, qui permettrait un meilleur accompagnement des familles et soulagerait les collectivités locales.
Pour améliorer les relations des familles et des proches avec leur collectivité et le service public funéraire, elle recommande notamment d’harmoniser les dispositions du code général des collectivités territoriales afin qu’une seule et même référence soit utilisée pour désigner la ou les personnes chargées de prendre les décisions nécessaires au devenir du corps d’un défunt ; de mettre à la charge des communes une obligation d’information à destination des héritiers ou successeurs pour toutes les opérations touchant à une sépulture en terrain commun, et précisant, au moment où une personne y est inhumée, que dans certaines conditions le corps pourra faire l’objet d’une crémation administrative […]. »
- Vincent L.-V., Anthropologie de la mort, 1988, Payot, Bibliothèque scientifique.
- Duvaut A., « Questionner le renouvellement des politiques funéraires », Horizons publics janv.-févr. 2025, no 43, p. 60-70.
- L. no 93-23, 8 janv. 1993, mod. le titre VI du livre III du Code des communes et relative à la législation dans le domaine funéraire, dite « loi Sueur ».
- L. no 2014-110, 6 févr. 2014, visant à mieux encadrer l’utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national, dite « loi Labbé ».
- Rideau P., Cimetières vivants. Étude de la biodiversité des cimetières franciliens, rapp., 2023, Institut Paris Région.
- L. no 2022-217, 21 févr. 2022, relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite « loi 3DS ».
- https://www.defenseurdesdroits.fr/rapport-des-droits-graves-dans-le-marbre-la-personne-defunte-et-ses-proches-face-au-service-public