La BnF lance une consultation pour créer un Conservatoire national dédié à la presse

Laurence Engel
Pour Laurence Engel, présidente de la Bibliothèque nationale de France, la création de ce nouveau Conservatoire national de la presse s’inscrit dans la transformation permanente de son institution.
©Léa Crespi
Le 9 juillet 2020

Confrontée à une saturation de ses espaces de stockage et pour préserver une collection de titres de presse menacés de disparaître, la Bibliothèque nationale de France s’est donnée sept ans pour mener à bien la construction d’un Conservatoire national de la presse et un Centre de conservation en dehors de Paris (2 heures maximum en train, 3 heures maximum en voiture).

 

Ce nouveau chantier, estimé entre 70 et 90 millions d’euros, prévoit d’associer étroitement une collectivité territoriale autour d’un projet culturel et éducatif fort orienté sur la mission, la richesse et la diversité des 247 000 titres de presse, depuis La Gazette de Théophraste Renaudot publié en 1641 jusqu’aux titres les plus récents. Les collectivités intéressées ont jusqu'à mi-octobre pour se manifester. Le site retenu sera annoncé début 2021, pour une inauguration prévue en 2027.

 

Laurence Engel, l’actuelle présidente de la BnF, s’est confiée à Horizons publics sur les caractéristiques et les enjeux de cet Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI), l’ancrage territorial du projet, la dimension innovante et technologique de ce nouveau pôle et la stratégie de transformation de l’une des plus anciennes institutions culturelles françaises.

Quels sont les enjeux de cet appel à manifestation d’intérêt (AMI) pour la BnF ?

Il y a tout d’abord un enjeu « physique » qui répond à une réalité historique : les réserves sont aujourd’hui saturées face à l’explosion de la production éditoriale. La saturation des espaces de stockage sur nos différents sites parisiens rend nécessaire la construction d’un nouveau bâtiment, avec le choix stratégique de s’implanter en dehors de Paris. Nous devons lancer ce grand chantier pour augmenter nos capacités de stockage mais aussi offrir à certaines collections – par exemple les collections de presse, très fragilisées - des conditions de conservation optimales.

Nous entrons dans un nouveau cycle de construction et ouvrons une nouvelle page de notre histoire, comme cela avait été le cas avec le chantier lancé il y a 30 ans par François Mitterrand, pour la construction de la grande bibliothèque qui porte aujourd’hui son nom.

Le deuxième enjeu est culturel : nous souhaitons réunir sur un même lieu l’ensemble de notre collection consacrée à la presse, qui abrite 247 000 titres. C’est la collection la plus consultée par le public et l’une des plus importantes au monde, et la création de ce nouveau lieu aura pour vocation de faire vivre ce patrimoine. Le troisième enjeu est technologique, ce nouveau centre sera doté des dernières technologies innovantes en matière de conservation - notamment des magasins robotisés à « oxygène raréfié ». Le site comprendra aussi des ateliers de restauration et de numérisation et nous y utiliserons tous les résultats de nos recherches, par exemple le recours à l’intelligence artificielle pour optimiser la gestion de nos collections.

Quel type de territoire ou de collectivité recherchez-vous pour ce nouveau site ?

Nous avons des contraintes de localisation et d’espaces qui sont précisées dans l’AMI. Nous recherchons un territoire situé à 2 heures maximum en train et 3 heures maximum par la route de la capitale. Les collections seront amenées à bouger entre ce site et les salles parisiennes de lecture. En termes de foncier, nous recherchons une parcelle de 15 000m² minimum, avec la possibilité d’extension du foncier si besoin. Nous recherchons un partenaire financier mais surtout une collectivité locale avec laquelle construire un partenariat sur le long terme.

Ces collections, notamment les collections de presse, peuvent favoriser l’invention d’un projet avec une vraie dimension culturelle, chacun apportant son savoir-faire, son expertise pour faire vivre le site. La BnF se projette sur le long terme, c’est plus qu’un projet d’implantation, c’est un nouveau pôle territorial et culturel de la BnF pour valoriser la profondeur historique des collections. Une centaine d’agents rejoindront ce nouveau site à l’ouverture.

En quoi la création de ce nouveau pôle s’inscrit-il dans la transformation et la modernisation de la BNF ?

La BnF est innovante depuis 1537 si je puis dire, le dépôt légal étant la première innovation. Aujourd’hui, le numérique constitue évidemment la dimension la plus immédiatement innovante de nos activités. Le référencement, les notions de catalogue et de fichier propres au monde de la conservation documentaire sont proches de la mécanique numérique : l’immersion depuis 20 ans dans cet univers était en somme naturel et nous conduit à sans cesse innover, avec par exemple data.bnf.fr (passage du numérique au web sémantique), le recours aux algorithmes de l’IA pour moderniser certaines de nos pratiques… Ce sont autant de blocs d’innovation qui contribuent à la transformation numérique de nos activités et de nos métiers.

La BnF est devenue un outil technologique avec 6 millions de documents dans sa bibliothèque numérique, 40 millions de documents dans ses magasins physiques, livres, photographies, objets …. La création de ce nouveau Conservatoire national de la presse s’inscrit dans cette transformation permanente.

La création d'un Conservatoire national de la presse

La collection de presse de la BnF est l’une des plus anciennes et des plus riches au monde. Elle compte 247 000 titres dont le plus ancien, La Gazette de Théophraste Renaudot, débute en 1631. Ce fonds historique s’est largement développé à travers le dépôt légal et les acquisitions, reflétant fidèlement l’histoire de la presse en France et à travers elle l’histoire du pays lui-même, celle du lien entre pouvoir et information, formation et éducation des citoyens. La BnF souhaite mettre en valeur cette collection de presse, dont les apports restent aujourd’hui primordiaux tant en termes de transmission d’une mémoire, que de compréhension du monde et d’éducation à l’information.

Ce conservatoire national de la presse sera un lieu unique en France, rassemblant des collections exceptionnelles dans des conditions de conservation optimales. Le projet permettra également d’accélérer la numérisation de ces documents souvent fragiles et de faciliter leur consultation et leur rayonnement, à l’heure où les grandes questions de société sont plus que jamais d’actualité.

Extrait de l’appel à manifestation d'intérêt (AMI)

 

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