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L’institut d’Auvergne-Rhône-Alpes du développement des territoires, un acteur universitaire qui scrute l'innovation territoriale

Le 14 décembre 2019

L’Institut d’Auvergne-Rhône-Alpes du développement des territoires (IADT) a été créé en 2013 à l’initiative conjointe de collectivités territoriales et d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche clermontois, tous animés par un projet original de créer, au sein d’une même structure, un pôle de formation et de compétences dans les domaines de l’ingénierie du développement des territoires1.

Une interface pour la formation et l’ingénierie publique

Cette structure réunit aujourd’hui plusieurs acteurs de l’enseignement supérieur du site clermontois : l’université Clermont-Auvergne et l’école VetAgro Sup, et collabore régulièrement avec AgroParisTech ou l’École nationale supérieure d’architecture de Clermont-Ferrand. La gouvernance est adossée à un groupement d’intérêt public (GIP) qui associe les deux premiers établissements et la région Auvergne-Rhône-Alpes, ainsi que les conseils départementaux de l’Allier et du Puy-de-Dôme2. Le statut de GIP permet de piloter et d’organiser efficacement la coopération des institutions publiques en présence, établissements d’enseignement supérieur travaillant dans les domaines de l’ingénierie publique et collectivités territoriales.

Les objectifs de ce projet sont, d’une part, de mutualiser les ressources et les moyens pédagogiques au sein d’une maison commune pluridisciplinaire accueillant plus de 200 étudiants en licence professionnelle ou master, relevant de champs disciplinaires variés (architecture-aménagement, droit public, économie, géographie et aménagement, management et sciences de gestion) et se préparant aux métiers du développement des territoires. En 2018, un nouveau master, dédié aux territoires et pilotage des systèmes éducatifs a été accueilli au sein de l’Institut d’Auvergne-Rhône-Alpes du développement des territoires (IADT). Unique en France et fruit d’un partenariat avec l’INSPE3 de Clermont et le rectorat d’académie, il reçoit, en formation continue, une petite vingtaine de cadres de l’Éducation nationale pour être formés aux enjeux de pilotage et de territorialisation de l’éducation.

Dès l’origine, le GIP a souhaité mettre l’accent sur les outils et usages numériques mais aussi sur les méthodes de formation encourageant la créativité (méthodes participatives, innovation par le design de services, etc.). À ce titre, une semaine commune à toutes les formations accueillies est organisée en début d’année universitaire pour aborder des problèmes concrets proposés par des collectivités territoriales et des associations, et pour mettre en œuvre de nouvelles méthodes d’animation ou de recueil de besoins des usagers dans la « fabrique des villes » comme dans les défis du développement des zones très peu denses.

Plus généralement, l’IADT permet de mutualiser les offres de stages et d’emplois, de mieux connaître le devenir des diplômés et de leur proposer une plus grande ouverture internationale (partenariats avec des universités belge, grecque, italienne, espagnole, portugaise ou québécoise).

D’autre part, et en parallèle, il s’agit de développer une interface conçue en étroite relation avec les besoins et projets des collectivités locales et des acteurs socio-économiques. Cet outil dynamique repose sur une activité de formation continue (y compris les élus), mais aussi une fonction d’animation stratégique, de recherche-action-formation, de diffusion-valorisation des travaux scientifique et de co-construction avec les collectivités d’offre de stages, de projets tuteurés ou d’expertise, ainsi que d’organisation de rencontres participatives, associant scientifiques, élus, socio-professionnels et citoyens.

Des projets au cœur des enjeux des ruralités

Parmi les projets dont l’IADT est partie prenante, plusieurs concernent les espaces ruraux.

  • le programme de recherche pour et sur le développement régional (PSDR) Inventer (« Inventons nos territoires de demain ») dans ce numéro d’Horizons publics, qui vise à formaliser les dynamiques d’évolution des territoires ruraux et métropolitains, en prenant appui sur la gouvernance alimentaire ;
  • dans un autre domaine, le projet Témoin (« Accueillir et transmettre en milieu rural : ouvrir vers des initiatives novatrices ») réunit l’association Installer en Massif central, l’IADT et Sol et civilisation. Financé, dans le cadre de la convention de Massif central, par l’État, l’Union européenne, les conseils régionaux Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté, et par le département de la Corrèze, cette recherche-action tente de faire émerger des réponses innovantes afin de faciliter les projets de transmission des exploitations agricoles dans le Massif central et de pérenniser la vie des territoires et leur attractivité ;
  • financé par la région Auvergne-Rhône-Alpes et piloté par INRAE4 (laboratoire ecosystèmes et sociétés en montagne de Grenoble) en partenariat avec les UMR PACTE et Territoires, le projet Amorce (« Adaptation des territoires de montagne et du tourisme face au changement climatique ») s’intéresse aux difficultés rencontrées par les territoires de moyenne montagne, ancrés sur le développement du tourisme hivernal, face au changement climatique. L’IADT, propose des projets collectifs en immersion pour les étudiants et porte des ateliers participatifs et de sessions de formation sur l’accompagnement de la transition touristique ;
  • à l’échelle européenne, l’IADT est aussi un des partenaires d’un programme Erasmus+ dédié à l’entreprenariat en lien avec la culture et le patrimoine rural : « Entrepreneurship Education and Cultural Heritage Creative Management for Rural Development » ;
  • le programme POPSU5 cofinancé par Clermont-Auvergne métropole et par le Plan urbanisme-construction-architecture, du ministère de la Transition écologique et solidaire et du ministère de la Cohésion des territoires et des relations aux collectivités, fait interagir des chercheurs issus du groupe Ressources de l’École nationale d’architecture de Clermont-Ferrand, ainsi que de l’UMR Territoires, avec les services d’ingénierie de la métropole et les élus locaux. L’IADT apporte un soutien dans la valorisation des divers travaux qui portent à la fois sur les représentations de la métropole depuis et vers l’extérieur, les types de collaborations et de solidarités existant entre la métropole et les territoires ruraux périphériques (par exemple, à propos de la santé et de la capacité à organiser les parcours de soins des patients), ou sur les espaces et pratiques des bords de ville.

Un partenariat privilégié : l’UMR Territoires

Créée en 2017 de la fusion de l’UMR Metafort et de l’équipe universitaire CERAMAC, l’UMR Territoires regroupe une centaine de membres, sous les tutelles AgroParisTech, INRA, IRSTEA, université Clermont-Auvergne et VetAgro Sup (https://umr-territoires.fr).

Unité de recherche pluridisciplinaire, elle associe des chercheurs en sciences humaines et sociales et en sciences biotechniques. L’idée centrale partagée est qu’il existe une multiplicité de configurations (locales et régionales) et de trajectoires (individuelles et collectives) conduisant à une coexistence de « modèles » et de stratégies menées au sein des territoires. L’UMR interroge la capacité à agir des acteurs mais aussi la conception et la conduite de l’action publique.

L’expérimentation FACTEUR

En région Auvergne-Rhône-Alpes, partant du constat que les territoires éloignés des pôles universitaires, ont des besoins en ingénierie et en qualification des acteurs socio-économiques et un manque de connaissance et d’accès aux ressources universitaires mobilisables au service de l’innovation, de la formation tout au long de la vie ou de la culture scientifique, l’IADT en étroite collaboration avec l’équipe d’inTERface portée par la communauté université Grenoble Alpes, a proposé au conseil régional de mettre en place un dispositif expérimental intitulé « FACTEUR » (pour fond d’amorçage pour la coopération entre territoires et établissements universitaires et de recherche).

En complément de démarches en termes d’offre universitaire en direction des territoires, il est apparu absolument nécessaire de changer de logiciel pour renforcer le pouvoir d’agir des acteurs ruraux6, et de promouvoir une approche par la demande exprimée par les acteurs locaux ; les ressources universitaires (stages étudiants, projets collectifs tuteurés, projets industriels, expertises et recherche-action, formation des élus, etc.) pouvant alors mieux se déployer dans les territoires. Dans la phase d’expérimentation, quatre EPCI pilotes (Saint-Pourçain Sioule Limagne, Ambert Livradois-Forez, Val du Dauphiné et Val de Drôme) ont été choisis et bénéficierons donc de ce « fond d’amorçage » cofinancé par la région, les établissements universitaires et les collectivités, pour s’engager dans cette voie du transfert de connaissances, de formation et d’ingénierie, inaugurant une nouvelle forme de partenariat entre écosystèmes scientifiques métropolitains et ruralités éloignées.

Dans cette approche renouvelée de territoires ruraux « apprenants » ou « capacitants », les premières demandes portent, par exemple, sur l’accessibilité des zones d’activités économiques pour différents modes de transport, sur l’offre d’accueil et la stratégie d’attractivité (notamment pour les étudiants et jeunes couples), sur la promotion et la valorisation du bois local, sur la gestion du foncier et les documents d’urbanisme, sur des projets d’habitat relais, sur l’égalité d’accès des citoyens aux ressources naturelles, administratives et numériques, sur la constitution d’un schéma de développement des services publics commun avec les communes, etc.

  1. https://www.iadt.fr
  2. Le président du GIP est Jean-Pierre Brénas, conseiller régional, et le président-délégué, Mathias Bernard, est président de l’université Clermont-Auvergne.
  3. Institut national supérieur du professorat et de l’éducation.
  4. Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (anciennement l’INRA : Institut national de la recherche agronomique).
  5. Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines.
  6. Alix-Tabeling G., Beaucher R., Loisel M., Rio N., Riou G. et Vincent S., « Futur “agenda rural” : hors-sol ou plein champ ? », Lagazette.fr 24 juill. 2019.
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