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Transition en montagne : quand le climat fait monter la température sociale

Le 12 mars 2025

Le changement climatique ne peut être considéré comme un événement à gérer ou comme un problème à résoudre. Il constitue le monde dans lequel nous vivons. La montagne, en raison de ses caractéristiques, est confrontée plus tôt que d’autres, ou avec plus d’intensité, aux effets du changement climatique qui peuvent compromettre son modèle de développement. Dans ces conditions inédites, comment appréhender des futurs qui ne dépendent pas des solutions existantes ? Alors que les réponses actuelles divisent, l’accentuation du réchauffement climatique laisse augurer l’augmentation des conflits en montagne. Dans ce contexte, s’organiser face au défi social et économique majeur que représente l’adaptation au réchauffement du climat paraît inévitable, quels que soient les efforts d’atténuation à réaliser.

Des changements au pluriel qui divisent au lieu de fédérer

Dans les Alpes et les Pyrénées françaises, la température a augmenté de + 2 °C au cours du xxe siècle, contre + 1,4 °C dans le reste de la France (source : Météo France). Les effets de ce réchauffement sont multiples et varient fortement selon l’altitude.

1 – Fonte des glaciers et hausse des risques naturels

Les glaciers ont reculé de façon spectaculaire dans les Alpes et les Pyrénées, modifiant ainsi le cycle de l’eau. Avec la hausse des températures en été, tout ce qui est habituellement tenu par la glace dans les couches profondes de la montagne est déstabilisé. Au-delà de la fonte des glaces, le changement climatique accentue la survenance de risques naturels d’ores et déjà omniprésents en montagne.

2 – En dessous de 1 500 mètres, la neige est moins présente

Les Alpes et les Pyrénées ont perdu près d’un mois d’enneigement ces cinquante dernières années. Si les concentrations de gaz à effet de serre restent élevées, la neige pourrait avoir quasiment déserté la moyenne montagne à horizon 2100.

3 – Des stations de montagne impactées

Avec le damage, la neige artificielle est devenue indispensable pour sécuriser la fiabilité des domaines skiables face aux variations d’enneigement. Les fenêtres de froid nécessaires à sa création en début de saison diminuant en raison du réchauffement climatique, des chercheurs du Centre national de recherches météorologiques (CNRM, Météo-France/CNRS) et de l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (IRSTEA) de Grenoble ont modélisé les perspectives d’enneigement dans les stations de ski, en intégrant le recours au damage et à la neige de culture. Voici leurs résultats pour les 129 stations des Alpes françaises étudiées :

  • jusqu’en 2050, quel que soit le scénario climatique, une couverture de l’ensemble des domaines skiables à 45 % par la neige de culture permettra de maintenir les conditions d’enneigement comparables à la situation de référence sans neige de culture (1986-2005) ;
  • après 2050, si le réchauffement planétaire n’est pas contenu et dépasse + 3 °C, la neige de culture ne suffira plus.

Quel sera à court et long terme l’impact pour l’exploitation des domaines skiables ? Quel sera le prix du confortement des activités de neige ? Comment aborder des périodes de transition ? Le consortium ClimSnow, composé de Météo-France, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) et Dianeige, propose aux collectivités et exploitants de domaines skiables, dans un cadre concurrentiel, de quantifier, à leur échelle, l’impact du changement climatique sur l’enneigement en stations de sport d’hiver.

Le changement climatique percute les grands équilibres des territoires de montagne. Mais au lieu de fédérer, la transition divise et les conflits gagnent les sommets.

4 – Régime des pluies, ressource en eau : des évolutions incertaines

De grandes tendances se dégagent : en hiver, les précipitations s’accentuent et augmentent le débit des rivières, avec une avancée du pic de fonte au printemps2. L’intensification des précipitations augmente les risques de crues et de glissements de terrain. En été, les pluies se font plus rares, les ressources en eau aussi.

Malgré les enjeux du cycle de l’eau en montagne, le sujet ne réussit pas à faire l’objet d’un débat apaisé en montagne. Les conflits autour des projets de stockage d’eau et les hésitations autour du transfert de la gestion du petit cycle de l’eau par les communes aux établissements de coopération intercommunale en 2026 ne facilitent pas la projection vers l’avenir.

5 – Forêts, prairies : des écosystèmes en mutation

L’assèchement des sols liés à la hausse des températures fragilise les forêts sur les terrains à forte pente qui assurent un rôle de protection des biens et des populations contre l’érosion et les glissements de terrain. Par ailleurs, cet assèchement augmente le risque incendie dans les massifs forestiers. Mais surtout, les températures plus clémentes favorisent les parasites allant jusqu’à menacer d’extinction complète certaines essences dont l’épicéa.

6 – L’agropastoralisme fragilisé

Activité agricole très présente en montagne, l’élevage est affecté par le changement climatique. D’ores et déjà, on trouve moins d’herbe dans les alpages à certaines périodes et de plus en plus de zones où les points d’eau se tarissent. Ces phénomènes incitent les filières fromagères et l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) à revoir les dispositions des cahiers des charges de certaines appellations d’origine contrôlée.

Des écarts entre haute et moyenne montagne

Les trajectoires divergent entre la haute montagne et la moyenne montagne. La haute montagne est confrontée à des enjeux de protection des biens et des personnes, et ce, dans un contexte d’attractivité renforcée par le changement climatique (recherche de fraîcheur l’été et recherche de garantie neige l’hiver). Alors que la moyenne montagne et ses vallées doivent quant à elles faire face à l’augmentation des sécheresses tout en étant soumises aux injonctions paradoxales de la diversification économique.

Ainsi, et malgré des conditions d’enneigement favorables pour l’ensemble des massifs à Noël 2024, la haute montagne et ses grands domaines skiables semblent avoir bénéficié du report de la moyenne montagne. Au 31 décembre 2024, les premiers étaient en avance sur toutes les périodes de la saison hivernale (+2,4 %) alors que les autres reculaient, hormis pendant les fêtes (– 2,8 %). « Il commence à y avoir un bout de fracture, dans la tête des gens, et la recherche de garantie neige. D’où l’attentisme pour réserver dans les stations de charme », indique Denis Maurer de G2A Consulting, qui tient l’observatoire touristique de l’Association nationale des maires de stations de montagne (ANMSM). Cela s’accompagne d’une montée en gamme « structurelle » de la demande. Rarement la clientèle CSP+, voire « CSP++ », selon G2A Consulting, n’avait autant anticipé ses réservations3.

La conflictualisation de la transition

Le tourisme est une activité économique majeure des territoires de montagne : 350 stations de ski, 18 000 emplois directs ou indirects, 120 000 emplois dépendant de l’ouverture des domaines skiables en hiver, 20 milliards d’euros de retombées économiques à l’année liés au tourisme, 19 % de la clientèle touristique française, 27 % des nuitées marchandes internationales, sans oublier les 60 000 exploitations agricoles et 18 % des élevages de France en montagne4.

Le changement climatique percute ces grands équilibres. Mais au lieu de fédérer, la transition divise et les conflits gagnent les sommets. L’irruption d’Extinction Rébellion sur la scène montagnarde a suscité l’intérêt des médias nationaux tout en clivant les populations locales. Au-delà de la mobilisation elle-même, ces conflits sont révélateurs des enjeux locaux :

  • maintien des habitants malgré le coût de la vie et particulièrement le logement ;
  • adaptation de l’activité économique pour maintenir durablement les emplois et les services (y compris publics) ;
  • maintien de la culture locale et de son identité.

L’accentuation du réchauffement climatique laisse augurer l’augmentation de ce type de conflits. Il s’accompagne de l’explosion des procédures contentieuses devant les tribunaux, qui constituent un prolongement des conflits territoriaux devant le juge administratif, en particulier celui de Grenoble. Ces conflits témoignent des tensions engendrées par les défis auxquels la montagne est confrontée et rappelle que la transition est un concept au faux air de consensus. Y compris dans une commune comme La Clusaz en Haute-Savoie, siège de la première zone à défendre (ZAD) en montagne, qui avait pourtant fait le choix de faire évoluer son modèle économique en initiant une sortie progressive du « tout ski » et du « tout tourisme » 5.

Loin d’une transition sereine

Les enjeux sociaux et économiques rendent difficile la redirection des stratégies locales en montagne. Certains habitants du territoire sont très attachés à une histoire, d’autres moins, mais, dans l’ensemble, le sujet ne laisse pas indifférent, particulièrement lorsque des décisions sont prises pour changer de modèle.

C’est le cas à Faverges-Seythenex en Haute-Savoie. Malgré l’accompagnement du plan Avenir montagnes ingénierie de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), la commune n’a pas réussi à adopter un nouveau modèle pour la station de la Sambuy crée en 1960. Le 14 juin 2023, le conseil municipal a décidé « d’arrêter l’exploitation des remontées mécaniques et du domaine skiable de la station de la Sambuy après la saison estivale 2023 ». Depuis, la décision divise. Tout comme le projet de reconversion du site « axé sur un retour à la nature ». Les opposants à la décision se mobilisent et des habitants, réunis en association, cherchent à se faire entendre pour convaincre les élus de revenir sur leur décision.

Les enjeux sociaux et économiques rendent difficile la redirection des stratégies locales en montagne. Certains habitants du territoire sont très attachés à une histoire, d’autres moins [...].

La station de Metabief : un exemple de station en transition ?

Située dans le Doubs, la station de moyenne montagne de Métabief est gérée par le Syndicat mixte du Mont d’Or. Après dix ans d’investissements importants, le syndicat a pris un virage historique, avec le soutien du programme Avenir montagnes ingénierie de l’ANCT, en envisageant la fin du ski alpin à l’horizon 2030-2035. « Ce qui se passe à Métabief, c’est ce qu’il va falloir faire ailleurs en France », avait déclaré, le 20 février 2023, Christophe Béchu, l’ancien ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Le 13 septembre 2024, le Syndicat mixte du Mont d’Or a décidé de suspendre, dès l’hiver suivant, l’exploitation des cinq remontées mécaniques, privant ainsi la station d’une partie de son domaine et certains acteurs socioprofessionnels de leur activité. Cette décision a déclenché la colère d’une partie des commerçants, ainsi qu’un bras de fer judiciaire avec l’une des communes membres du syndicat.

Un avenir incertain pour la station de l’Alpe du Grand Serre

Face à l’aggravation de la situation devenue trop lourde pour son budget, le conseil communautaire de la Matheysine a décidé, le 4 octobre 2024, de ne pas donner suite à la régie intéressée, mettant fin à l’exploitation de la station de l’Alpe du Grand Serre située en Isère. Le vote a été un électrochoc : une mobilisation citoyenne a permis d’organiser une collecte de fonds, de fédérer des partenaires et de convaincre les élus de redélibérer le 22 octobre 2024. À la majorité, les élus ont voté le maintien de l’activité pour la saison hivernale 2024/2025. Pourtant, de grandes incertitudes subsistent quant à la poursuite de l’exploitation au-delà de la saison.

S’organiser face au défi social et économique majeur que représente le changement climatique

L’accentuation du réchauffement climatique laisse augurer l’augmentation des conflits. Quelles solutions y apporter ? L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a mené une comparaison internationale sur la manière dont les enjeux sociaux sont intégrés dans les politiques climatiques6. Son rapport établit qu’il est urgent de s’organiser face au défi social majeur que représente l’adaptation au réchauffement du climat, inévitable quels que soient les efforts d’atténuation. La mission met en avant la nécessité de mieux caractériser les risques sociaux liés au changement climatique, afin d’améliorer leur prise en charge et les actions de prévention. Elle recommande de tenir davantage compte des modes de vie et des risques sociaux liés au changement climatique dans les décisions. Enfin, en matière de gouvernance, elle préconise de renforcer la place faite au champ social dans les instances de coordination et d’élaboration des décisions.

Dans son rapport Les stations de montagne face au changement climatique7, la Cour des comptes souligne elle aussi que la France aurait intérêt à promouvoir une organisation fédérant l’ensemble des acteurs concernés autour d’une gouvernance élargie. Tout en reconnaissant que la gouvernance des stations est complexe, la cour estime que le cadre s’avère trop étroit pour englober tous les enjeux des territoires et trop centré sur les seules remontées mécaniques.

S’appuyer sur la connaissance des risques et l’histoire locale pour mobiliser un récit qui crée de l’engagement

Bien qu’elle soit présente en montagne, la culture du risque est confrontée à la difficulté d’intégrer les nouvelles connaissances liées aux enjeux climatiques et d’être partagée avec les populations. Deux raisons peuvent l’expliquer : le sentiment d’être peu exposés à titre personnel et « l’efficacité » des démarches visant à minimiser les enjeux en agitant parfois la menace du déclinisme (« le tout ski c’est fini, mais sans le ski tout est fini »).

Le troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3) souligne la nécessité de mettre à jour les référentiels de la prévention des risques naturels, notamment par la réévaluation des niveaux d’aléas pris en référence pour chaque territoire, en cohérence avec la trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (TRACC) et la révision des plans de prévention des risques naturels sur la base d’une méthodologie renouvelée. Le PNACC-3 prévoit également la mise à jour de 100 % des plans locaux d’urbanisme (PLU) d’ici 2030 pour intégrer ladite trajectoire de réchauffement dans les documents de planification.

Au-delà des risques, La Fabrique des transitions8 insiste quant à elle sur la nécessité de définir une trajectoire « historique » du territoire, permettant de faire émerger un récit et une culture partagée autour des marqueurs propres à chaque territoire : l’identité locale, l’histoire et l’héritage, les attachements, les liens, la projection vers l’avenir.

Créer un « réflexe adaptation »

Pour parvenir à des plans d’adaptation pertinents et opérationnels, les acteurs de la montagne vont devoir réaliser de nouvelles démarches stratégiques. Ainsi, l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE)9 estime qu’il est nécessaire de se poser la question de ce qui va évoluer avec le climat ? Par exemple, ce qui pourrait affecter la continuité de l’activité au niveau local. L’adaptation s’avère donc être tout autant un défi organisationnel de « conduite du changement » qu’un défi scientifique et technique.

Pour parvenir à des plans d’adaptation pertinents et opérationnels, les acteurs de la montagne vont devoir réaliser de nouvelles démarches stratégiques.

Il n’y a pas de réponse automatique et « sur étagère » : adapter son organisation aux impacts du changement climatique est le fruit de choix stratégiques qui doivent être portés par les décideurs. Pourtant, et malgré la fragilisation de l’équilibre économique des territoires supports de station de ski, la Cour des comptes, dans son rapport du 6 février 2024, estime que les politiques d’adaptation restent en deçà des enjeux. En s’appuyant sur les travaux de la cour, le PNACC-3 cherche à généraliser un « réflexe adaptation » dans tous les investissements publics et toutes les aides publiques à l’investissement10. L’opérationnalisation de cette ambition est essentielle pour :

  • arrêter d’investir dans des infrastructures, des bâtiments ou des équipements qui ne seront pas adaptés pour faire face aux conséquences du changement climatique ;
  • saisir les meilleures opportunités dont on dispose en profitant des investissements déjà prévus pour renforcer le niveau d’adaptation.

Pour aller plus loin, I4CE identifie quatre modalités génériques pour progressivement généraliser ce schéma de prise en compte de l’adaptation à tous les investissements concernés par les impacts du changement climatique :

  • prendre en compte l’adaptation dès la conception des futurs programmes ;
  • adapter les normes et les référentiels à l’évolution des risques et des connaissances ;
  • déployer une approche de « stress tests » au prisme du + 4 °C et de « tracc proofing » (vérification de la compatibilité avec la TRACC) au cas par cas des grands projets ;
  • contractualiser les investissements sur la base des stratégies d’adaptation : stratégies de gestion patrimoniale, stratégies de territoires ou de filières.

Avoir un « bon » plan

On attribue à Antoine de Saint-Exupéry la citation suivante : « Pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir, mais de le rendre possible. » Transposée à la montagne, cette citation met en évidence les paradoxes qui s’y expriment face au changement climatique : les causes et les effets sont bien identifiés, mais les réponses ne sont pas systématiquement opérationnelles.

Engager la transition en montagne, c’est difficile mais nécessaire pour réduire les risques dont les conséquences sont déjà là.

En fixant les objectifs à atteindre, les moyens nécessaires et les étapes de réalisation, la planification apparaît comme une réponse aux enjeux de transition en montagne, même si elle ouvre un débat sur la temporalité au regard de l’urgence à agir. The Shift Project et le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) ont ouvert la voie au niveau national avec une approche par filière économique. Quels que soient les domaines sectoriels et les territoires, un « bon plan » semble devoir réunir certaines conditions pour relever le défi de l’adaptation :

  1. Être cohérent dans les ordres de grandeur : raisonner sur des pas de temps qui soient homogènes avec les sujets à traiter (une remontée mécanique s’amortit sur une vingtaine d’années, un parking sur une trentaine d’années et une station d’épuration sur une quarantaine d’années) et sur des échelles de valeurs cohérentes (la moyenne annuelle des investissements cumulés les domaines skiables était de 316 M€ HT entre 2019 et 2022 et font travailler indirectement 120 000 emplois).
  2. Être capable de fonctionner en mode dégradé : en se laissant des marges de manœuvre, du « mou » dans la corde, du « slack organisationnel », le plan va augmenter la robustesse en résistant aux adversités qui vont de toute façon se produire. En s’adaptant aux crises, il permet, en outre, d’implémenter des changements pertinents et réorienter ce qui se passe.
  3. Fonctionner avec une approche incrémentale : en privilégiant une démarche d’apprentissage, d’évaluation et d’ajustement en continu, elle permet de préserver des marges de manœuvre pour tenir compte des évolutions du contexte, des connaissances et du retour d’expérience.
  4. Laisser de la place à la subsidiarité : donner les grandes lignes et la direction générale, et s’appuyer sur les expertises existantes ou futures qu’il va falloir mobiliser.
  5. Recourir à une approche systémique : quand le climat change, tout change. Chaque acteur à un degré de coordination qui est à sa main : il va falloir décloisonner, agir à la bonne échelle et en interaction avec les voisins.
  6. Être acceptable, voire désirable : face à l’augmentation des conflits liés aux projets en montagne, le meilleur moyen de réduire les oppositions et de faire émerger des solutions robustes est de créer des consensus dans la population. Mais c’est long et cela nécessite parfois des compromis. Pour cela, il est recommandé de ne pas attendre les procédures administratives d’enquête ou de concertation.

Face aux conflits inhérents, l’enjeu est de s’appuyer sur les dissensus pour imaginer collectivement des solutions soutenables permettant de vivre et travailler en montagne.

En conclusion : la transition c’est du changement, et le changement ça s’accompagne !

La fonte des glaciers, la diminution de l’enneigement, la préservation de la biodiversité, le partage de l’eau, l’artificialisation des sols ou la difficulté à se loger génèrent des conflits en montagne qui peinent à se traduire en vision partagée. Face aux enjeux hétérogènes, les actions mises en œuvre ne sont pas toutes opérationnelles et nourrissent de nouvelles formes de mobilisation collective en montagne. Engager la transition en montagne, c’est difficile mais nécessaire pour réduire les risques dont les conséquences sont déjà là. C’est devoir arbitrer entre plusieurs enjeux : économiques, sociaux, environnementaux, politiques, culturels, etc. Face aux conflits inhérents, l’enjeu n’est pas d’éviter à tout prix que n’émerge un débat public autour du changement de modèle de développement territorial en montagne ; c’est, au contraire, le favoriser et s’appuyer sur les dissensus pour imaginer collectivement des solutions soutenables permettant de vivre et travailler en montagne.

  1. Laurent Badone est également consultant et formateur à l’Institut national des études territoriales de Strasbourg (INET).
  2. Hock, R. et Golam R., ‘’High Mountain Areas’’, in Pörtner H.-O. et al., The Ocean and Cryosphere in a Changing Climate. A Special Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change, 2019, IPCC ; Laurent L. et al., ‘’The Impact of Climate Change and Glacier Mass Loss on the Hydrology in the Mont-Blanc Massif’’, Scientific Report 2020, vol. 10, 10420.
  3. Chandellier A., « Année record pour le ski : l’écart se creuse entre haute et moyenne-montagne », mon-sejour-en-montagne.com 31déc. 2024.
  4. Source : « Avenir montagnes ingénierie », agence-cohesion-territoires.gouv.fr 24 juin 2021.
  5. Chambru M., « Extinction Rebellion à La Clusaz, quand la ZAD gagne la montagne », The Conversation 5 janv. 2022.
  6. Allot F. et Erpelding-Parier E., « Les enjeux sociaux du changement climatique : un éclairage international pour une feuille de route nationale », igas.gouv.fr 16 déc. 2024.
  7. C. comptes, Les stations de montagne face au changement climatique, rapp., 6 févr. 2024.
  8. Lire l’article dans ce numéro de Benoît Nenert et Anne-Louise Nègre de La Fabrique des transitions, « La transition des stations de ski n’aura pas lieu… celle du territoire de montagne peut-être », p. 62-69.
  9. Association experte de l’économie et de la finance pour faire avancer l’action contre les changements climatiques.
  10. Dépoues V. et Dolques G., Le réflexe adaptation dans les investissements publics en pratique. Pistes pour 2025 et perspectives, janv. 2025, I4CE.
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