La mobilité bas carbone, un enjeu indispensable pour les collectivités locales

Environnement
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Le 27 février 2020

Un « guide pour une mobilité quotidienne bas carbone » a été publié en février par le think tank The Shift Project à destination des collectivités locales en première ligne pour relever le défi de la transition écologique.

 

Ce guide, qui s'appuie sur l'étude de la politique de mobilité de cinq territoires (Communauté d’Agglomération de la Région Nazairienne et de l’Estuaire (CARENE), Communauté Urbaine d’Arras, Communauté Urbaine de Poitiers, Grenoble-Alpes Métropole, Eurométropole de Strasbourg), met en évidence l’importance de construire un système alternatif au « système voiture » et les clés pour y parvenir.

En France, les transports sont la première source d’émissions de gaz à effet de serre, avec près de 31% des émissions totales du pays. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce ne sont pas les poids lourds qui polluent le plus, mais les voitures individuelles. Face à ce constat, le think tank The Shift Project, qui œuvre en faveur d’une économie libérée de la contrainte carbone, a réalisé un rapport pour les collectivités : « Guide pour une mobilité quotidienne bas carbone ». Il se concentre sur les modes de déplacements et expose des mesures pouvant être mises en place d’ici cinq à dix ans. “Nous ne faisons pas de politique, mais nous donnons une boîte à outil pour les élus”, précise Laura Foglia, cheffe de projet du guide chez The Shift Project et ingénieure spécialisée dans la planification des transports.

Dans un contexte d’urgence écologique et d’élections municipales, se préoccuper de la mobilité des Français et de son impact est un enjeu majeur pour les pouvoirs publics. Le guide peut d’ailleurs accompagner la mise en place de la loi d’Orientation des Mobilités.

Votée fin 2019, elle prévoit de sortir de la dépendance automobile, accélérer la croissance des nouvelles mobilités, réussir la transition écologique et programmer les investissements dans les infrastructures de transport. Tout un programme qui comprend notamment l'interdiction des ventes de voitures à énergies fossiles carbonées (essence ou diesel) d'ici 2040 et la mise en place d’un plan vélo.

Il apparaît donc indispensable que les collectivités se dirigent vers cette transition, surtout dans les territoires où la voiture ne peut pas être une option.

Repenser les villes à moyenne densité

Cette situation, les habitants des zones à moyenne densité la connaisse bien. L’urbanisation et les déplacements ont été construits autour de l’utilisation de la voiture. Résultat : ils pratiquent l’autosolisme, et sans s’en rendre compte, participent à une source importante de pollution. Les solutions apportées par le guide demandent une restructuration du territoire et une modification des modes de vie habituels des usagers.

« C’est pour ça qu’il faut commencer maintenant, explique Laura Foglia. Il faut avoir une vision systémique, c’est-à-dire non seulement mettre en œuvre des mesures, mais aussi concevoir une politique de mobilité en même temps que la réflexion sur l’espace urbain. Nous voyons encore trop souvent des villes et des agglomérations qui acceptent des centres commerciaux à l’extérieur des villes et qui disent ensuite qu’il n’y a personne dans les transports en commun. »

Guide pour une mobilité bas carbone

Des retours d’expériences utiles pour trouver des solutions

Pour apporter des alternatives, le guide s’est basé sur des études de cas. Cinq politiques de mobilité ont été étudiées. Dans la Communauté d’Agglomération de la Région Nazairienne et de l’Estuaire (CARENE), la Communauté Urbaine d’Arras, la Communauté Urbaine de Grand Poitiers, Grenoble-Alpes Métropole et l’Eurométropole de Strasbourg. Pour être efficaces, selon le guide, les solutions apportées doivent être aussi globales que l’est le « système voiture » aujourd’hui. Cela passe par une redensification des villes, pour pouvoir développer des modes de transports comme le vélo et la marche, mais aussi par une fiscalité qui incite à les utiliser. Des contraintes comme la réduction des places de stationnement et de la vitesse en ville sont aussi préconisées. En réponse à ces changements, des politiques de développement et d’incitation à l’utilisation des transports en commun et au covoiturage sont encouragées. Les collectivités sont aussi invitées à accompagner les citoyens et les entreprises pendant le processus par la communication et la sensibilisation. Par exemple, les employeurs regroupant plus de 100 salariés sur un site doivent obligatoirement mettre en place des Plans de mobilité (PMD) pour les trajets domicile-travail. Dans les faits, seul 8% d’entre eux sont en règle. Expliquer aux employeurs, comme aux salariés, les avantages d’un tel service permettrait à cette politique d’être plus durable.

Difficultés administratives et idéologiques

Les études de cas du guide ont également permis de relever des difficultés dans l’application de certaines mesures. Par exemple, l’agglomération de la CARENE (44) souhaitait créer 200 kilomètres d’itinéraires cyclables. Mais celle-ci n’est pas compétente sur tout le territoire en matière d’aménagements. Ce sont les communes qui doivent financer les projets dans la plupart des cas. À cause de ressources financières insuffisantes, les travaux sont en attente.

Outre les complications administratives, la sensibilisation et la communication vers les habitants est un levier à ne pas négliger. « Des études ont prouvé que les propriétaires sous-estiment le budget qu’ils consacrent à leur voiture. S’ils savaient réellement l’impact qu’à leur véhicule sur leurs dépenses et sur la consommation de carbone, ça permettrait de changer les comportements. C’est important d’avoir cet accompagnement et cette prise de conscience, explique Laura Foglia. Il y a un travail à mener sur l’imaginaire. Il faut faire en sorte que ces mobilités, ces nouveaux modes de vie, deviennent désirables. Mais pour ça il faut du temps »

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