IA, gestion de l’eau : comment les Entreprises publiques locales y font face

Congres des EPL
Le Congrès et le Salon des Epl se sont tenus du 12 au 14 décembre au Palais des Festivals de Cannes autour du thème « Libérez le potentiel de vos territoires ». De gauche à droite, Alain Guillotin, Patrick Perrot (en visio) et Chantal Cazals lors de l’atelier IA.
©©Emmanuel Nguyen Ngoc
Le 10 janvier 2024

Le dernier congrès de la Fédération des élus des Entreprises publiques locales (Epl) a eu lieu du 12 au 14 octobre 2023 à Cannes. L’occasion d’acter le passage de flambeau présidentiel de Patrick Jarry, ancien maire de Nanterre, à Philippe Laurent, maire de Sceaux et vice-président de l’Association des maires de France (AMF). Mais aussi de se pencher sur deux sujets où les Epl sont attendues au tournant : l’intelligence artificielle et la gestion de l’eau.

Il est une tradition au congrès des Epl : on y cause, entre autres, de management. La séance de 2023 a été consacrée à l’intelligence artificielle, sujet par essence clivant. Chantal Cazals, Associée à Cazals & Partners, a partagé les perspectives qu’offraient l’IA pour les entreprises mais aussi pour l’organisation de nos activités humaines. Le général Patrick Perrot, coordonnateur IA et stratégie de la donnée à la gendarmerie nationale, a interpelé le public : « N’ayez pas peur de l’IA ! Si tel est le cas, vous serez dans un état d’asservissement, notamment vis-à-vis des entreprises étrangères. Il faut donc sortir d’emblée d’une posture défensive ».

La gendarmerie nationale utilise l’IA dans plusieurs domaines, pour protéger les populations, notamment face à la montée en puissance de la cybercriminalité où les criminels semblent avoir pris un temps d’avance.

« L’IA est un outil mathématique pour nous comme les autres. Mais elle ne doit pas être utilisée à la légère. Ainsi, la formation des gendarmes est primordiale. Nous éditons en interne une newsletter expliquant les grands principes de l’IA aux gendarmes. Nous avons aussi créé une chaire IA et diversité. En effet, le 23 septembre 2021, la DGGN (direction générale de la gendarmerie) a signé un accord de coopération avec l’Institut Supérieur d’Électronique de Paris (ISEP). Les deux entités souhaitent ainsi réunir leur expertise, leur savoir-faire et leurs réseaux en liant l’intelligence artificielle et les enjeux de sécurité. Il est en effet temps de s’y préparer : selon la base de données Statista, ces dernières vont exploser, passant de 12 % en 2015 à 175 % en 2025 !

Possibilités et dangers de l’IA

« L’intelligence artificielle est une nouvelle opportunité pour aider les entreprises à se développer, même les plus petites », a expliqué de son côté Chantal Cazals. « Nous sommes là pour vanter les possibilités de l’IA mais aussi alerter sur ses dangers, notamment en matière de production de fake news. Pour les collectivités territoriales, l’enjeu est clairement identifié, celui de tirer un profit maximal des données dont elles disposent pour proposer aux administrés une ville intelligente et ainsi, agir bien en amont sur l’évolution fonctionnelle de la ville. Les Epl, qui sont le bras armé des collectivités, sont, elles aussi, directement concernées », poursuit-elle.

Pour Alain Guillotin, directeur général de Chartres Métropole innovation numériques, « l’IA a permis de diversifier les domaines d’activités de notre Société d’économie mixte, notamment d’arbitrage vidéo Pixellot dans le cadre de la diffusion de rencontres sportives, ou encore de développement informatique avec l’usage de ChatGPT, et de supervision de ses infrastructures afin d’estimer les degrés de gravité des pannes et superviser les flux des grandes entreprises ». Bien sûr, les trois intervenants ont répété que l’IA n’était qu’un outil qui n’avait pas vocation à se substituer à la conscience humaine…

« Nous sommes au bout du robinet »

Un autre débat était consacré à la gestion de l’eau à l’heure de la sobriété. Face à la répétition des épisodes de sécheresse, la prise de conscience que l’eau n’est en aucun cas une denrée inépuisable est actée. Marie-Laure Métayer, adjointe au directeur de la Direction de l’Eau et de la biodiversité au sein du ministère de la Transition écologique, a rappelé l’objectif : diminuer de 10 % la consommation dans notre pays d’ici 2030. Un défi ambitieux qui nécessite des adaptations systémiques sur l’ensemble du pays, quelle que soit sa typologie. « À charge aux bassins, outils décentralisés qui assurent la gestion de l’eau, et à l’ensemble des acteurs concernés d’impulser des dynamiques pour atteindre cet objectif », souligne Marie-Laure Métayer.

Les Epl sont directement concernées par ces enjeux, gestionnaires et usagers de la ressource en eau. Christelle Aillet, maire des Saintes-Maries-de-la-Mer et présidente de la Semis (Sem chargée de développer les activités touristiques du territoire), a insisté sur la nature de l’urgence : « Nous sommes au bout du robinet », a-t-elle expliqué.

Pour preuve : les deux campings gérés par la Semis ont été privés d’eau durant plusieurs jours en pleine période de canicule.

Prendre l’eau là où elle arrive et l’acheminer là où elle ne va pas

Avec plus de 60 années au service des territoires, la Sem compagnie des eaux de Gascogne (CACG) est reconnue pour la qualité de son expertise dans la gestion des ressources en eau, des aménagements et des ouvrages hydrauliques.

Expertise dont d’autres territoires profitent, comme à Mayotte où, comme le rappelle Marjorie Boulogne, secrétaire général de la CACG, la Sem est intervenue pour limiter les impacts de la crise de l’eau.

Les territoires ultramarins sont d’ailleurs plutôt en avance sur le sujet puisqu’à La Réunion, comme le rappelle Serge-Eric Hoareau, vice-président du Conseil départemental de La Réunion et président de la Saphir (Société d'Aménagement des Périmètres Hydroagricoles de l'Ile de la Réunion), « nous détenons des records mondiaux avec des pluies intenses durant de très longues périodes auxquelles succèdent de longues périodes de sécheresse ». Une quantité de pluie astronomique que les acteurs locaux peinent à stocker. La Sem a mis en place les conditions pour assurer la livraison de l’eau brut aux fermiers intercommunaux. L’objectif de la Sem est simple : ramener de l’eau là où l’on en a besoin, en veillant à assurer l’irrigation de l’ensemble de l’île via des initiatives innovantes, y compris dans le nord de La Réunion particulièrement sensible aux épisodes de sécheresse : « On demeure dans une démarche de sobriété : on prend l’eau là où elle arrive et on la pousse ensuite vers nos montagnes », conclut Serge-Éric Hoareau.

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