Les collectivités à l’heure de la maturité numérique

Le 16 septembre 2025

Le 4e Baromètre de la maturité numérique des territoires1 met en évidence une progression des collectivités dans l’usage responsable du numérique. Sur l’intelligence artificielle générale (IAG), l’usage par les agents, en dehors de quelques territoires novateurs, relève le plus souvent de l’initiative personnelle.

C’est un moment très attendu pour les élus et les agents des collectivités territoriales qui sont à la proue de la transformation numérique de leur territoire. La 4e édition du Baromètre de la maturité numérique des territoires a été rendue publique le 8 juillet par le réseau des Interconnectés, première association française de collectivités dédiée aux enjeux numériques. Ce baromètre a été réalisé en lien avec le cabinet EY Consulting, dont un des associés, Jean-Marc Eiclier, a livré les grandes tendances au cours d’un webinaire. Sept thèmes ont été sondés cette année : numérique responsable, services et relations usagers, conformité réglementaire, inclusion numérique, cybersécurité, services aux agents, et données et IA.

Une certaine homogénéité se dégage

« Sur l’ensemble des sept items, une certaine homogénéité se dégage », assure Jean-Marc Eiclier. « Les données et l’IA restent en retrait avec 36 % des collectivités qui y sont vraiment engagées, contre 35 % en 2023 sur le dernier baromètre. À noter le grand bond de la section concernant le numérique responsable, qui était en dernière place en 2023 avec 29 % de collectivités vraiment saisies par le sujet, elle occupe désormais la première place avec 59 % des collectivités oscillant entre des actions formalisées et des améliorations en cours. » L’autre information marquante, parmi des dizaines, notamment sur la cybersécurité, est que 38 % des collectivités sondées assurent que la mise en œuvre d’un plan de sensibilisation et de formation spécifique pour accompagner les équipes dans l’appropriation des systèmes de gestion de données et IA est en cours, 2 % qu’elle est effective et en amélioration continue. En la matière, ce sont les collectivités de plus de 200 000 habitants (60 %) qui sont les plus actives.

L’inclusion et le numérique responsable en progression

Céline Colucci, déléguée générale des Interconnectés, précise pour Horizons publics que ce baromètre « n’interroge pas l’ensemble des collectivités, mais bien les membres des Interconnectés, Intercommunalités de France et France urbaine spécifiquement. C’est pour nous un travail précieux qui nous permet d’orienter aussi nos priorités d’action ». À ses yeux, le niveau de maturité numérique des collectivités progresse : « La vision d’un numérique responsable qui intègre l’approche sociale, à travers le thème de l’inclusion numérique et l’approche environnementale du numérique, à travers celui du numérique responsable, au service des citoyens et du territoire est très largement partagée et progresse fortement », assure la déléguée générale. Qui assure cependant que « des marges de progression importantes » sont identifiées. « Quand on se penche sur la gouvernance et les budgets engagés, l’importance du portage stratégique et politique est confirmée. »

La taille des collectivités, point de vigilance

L’un des points de vigilance reste « l’écart trop important entre les collectivités selon leur taille », poursuit Céline Colucci. « Nous avons déjà engagé une formation spécifique aux enjeux de la donnée depuis l’année dernière : c’est une formation-action qui vise à permettre aux collectivités d’acquérir les compétences nécessaires pour mobiliser les données au service des politiques publiques et des métiers. Les résultats sont très encourageants. Nous avons aussi lancé cette année un groupe de travail spécifique pour identifier avec les collectivités concernées les leviers d’accompagnement pertinents. »

Cybersécurité, l’inconnue de la mise en application de NIS2

La cybersécurité fait aussi l’objet d’une analyse dans le baromètre : « La mise en conformité des collectivités à NIS2 (Ndlr, directive Network and Information Security, dont la mise en application permettrait à des milliers d’entités et donc de citoyens de mieux se protéger) va avoir un coût important pour les collectivités dont on ne sait à ce jour comment il sera financé. Pour autant, les collectivités prennent le sujet très au sérieux et chacune, selon ses possibilités, met en œuvre des actions concrètes », assure-t-elle. Quant à l’IA et à la data, le sujet reste clivant, « moins bien approprié par les collectivités ». Sur la data, « c’est une situation ancienne, mais les actions que l’on mène notamment en direction des petites collectivités pour une data au service du pilotage de l’action locale et les politiques publiques incitent les collectivités à bouger. Je fais le pari que l’arrivée de l’IA va aussi inciter les collectivités à se pencher à nouveau sur la question de la pertinence des données mobilisées ».

Les outils d’IAG grand public ne respectent aucune des règles de protection, notamment l’IA Act et le Data Act, nécessaires à un usage satisfaisant pour les services publics.

L’IAG questionne

Sur l’IA, « le baromètre montre que le sujet suscite beaucoup d’intérêt au regard de la nouveauté que représente l’IAG. L’IA analytique n’est pas nouvelle, c’est en réalité l’IAG qui questionne le plus. Les outils d’IAG grand public ne respectent aucune des règles de protection, notamment l’IA Act et le Data Act, nécessaires à un usage satisfaisant pour les services publics. Le contexte géopolitique nous engage aussi à porter une attention renouvelée à la souveraineté des solutions. Il faut donc engager une réflexion approfondie sur trois volets en matière d’IA : le choix de solutions et prestataires vertueux (éthique, règlement) et souverains ; un pilotage de haut niveau associant élus, directeurs généraux des services et les salariés ; viser des usages réellement utiles et éviter le gadget ». Pour conclure, « l’IA coûte aussi très cher, son impact financier et environnemental doit être évalué ».

  1. Publié par le réseau des Interconnectés, initié par Intercommunalités de France et France urbaine.
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