Revue

Dossier

Les Entretiens Albert-Kahn, un écosystème innovant singulier

Le 11 février 2023

Le management des connaissances et la dynamique collaborative sont au cœur du laboratoire des Entretiens Albert-Kahn (EAK). C’est un écosystème innovant, car il favorise la circulation de connaissances au sein du département et harmonise les points de vue entre les élus et les agents.

Depuis toujours, la connaissance et l’information ont été un avantage clé. La dernière guerre a été gagnée par notre capacité à décoder les messages secrets allemands. À l’origine de la plupart des fortunes, il y a une innovation : Microsoft ou Bic en sont de bons exemples !

Ce qui est nouveau, c’est l’accélération du changement et du flux d’informations : alors que la masse de connaissances en circulation sur la planète n’augmentait que très faiblement au début du siècle, cette masse d’information est aujourd’hui en train de doubler chaque année. Le contenu en intelligence et en information des produits et des services augmente exponentiellement. Alors que dans les années 1960 le coût d’une voiture était à 70 % lié au processus industriel et commercial, avec seulement 30 % pour l’aspect informationnel ; aujourd’hui, les proportions s’inversent et c’est 70 % du coût d’une voiture qui devient informationnel : création et conception en amont, communication et publicité en aval.

Dès les années 1980, un certain nombre d’analystes et de consultants comme Daniel Bell et Alvin Toffler attirent l’attention sur l’émergence probable d’un nouveau type de civilisation où l’information jouerait le rôle qu’a joué le pétrole dans la société industrielle. Le développement fulgurant qu’a connu l’informatique et l’arrivée ces dernières années des nouvelles technologies de l’information (plus spécifiquement Internet) ont accéléré ce processus. Il existe aujourd’hui un consensus sur le fait que les pays et les entreprises les plus avancés sont rentrés de plain-pied dans la « société de l’information ». Plus de 50 % des travailleurs ont pour mission de créer, transformer et traiter l’information. De la même manière que la compétitivité dans la société industrielle est liée à l’optimisation du processus industriel, dans la société de l’information, elle est liée à l’optimisation du processus informationnel. Dans ce contexte, aucun individu, aucune entreprise, aucun territoire, aucun État-nation ne pourra rester longtemps compétitif s’il n’intègre pas rapidement les connaissances nouvelles qui s’élaborent un peu partout dans le monde, et qui visent à améliorer la création, la circulation et la communication de l’information.

Les trois grandes modalités de la connaissance

Le paradoxe de la société de l’information : nous avons conscience que la connaissance devient un enjeu stratégique, mais nous sommes de plus en plus noyés dans un flux croissant d’informations insignifiantes, contradictoires et incohérentes qui nous déstabilisent. Il faut distinguer une information d’un savoir et le savoir d’une connaissance. L’information en tant que telle n’a qu’une valeur très relative, car elle ne devient savoir opérationnel que si on en comprend le contexte et si on est dans un contexte où on peut l’appliquer. Par exemple, l’analyse boursière d’une entreprise n’est compréhensible que si on a un minimum de culture économique et n’est utilisable que si on est en position d’investir ou de vendre.

Un savoir devient une connaissance lorsque la compréhension en profondeur du contexte et des conditions de l’action crée une véritable dynamique chez celui qui connaît, et lui permet d’innover dans sa création et sa communication.

On peut distinguer trois niveaux dans l’intégration d’une connaissance : savoir, savoir-faire, savoir être.

Le savoir être du management des connaissances

1) Être prêt à remettre en cause sa représentation du monde et le système de croyance et de valeur qui va avec.

2) Explorer régulièrement les champs de connaissances nouveaux, ne pas rester figé dans sa spécialité.

3) Donner à chaque interlocuteur l’information la plus créative et la plus pertinente que l’on possède par rapport à la problématique, ne pas faire de rétention d’informations par omission ou falsification.

4) Avoir le courage de dire ce que l’on pense et d’affirmer son intime conviction même si cette information est à contre-courant.

5) Respecter, valoriser et reconnaître l’auteur d’une information.

6) Construire des logiques gagnant-gagnant en étant soucieux de valoriser son partenaire dans l’échange d’information.

7) Créer des espaces au niveau de l’individu et de l’entreprise qui permettent la prise de recul et la distanciation nécessaires pour créer du sens, développer des réseaux d’échanges amicaux et être créatif.

8) Valoriser, comptabiliser et rémunérer le capital immatériel des individus et de l’entreprise.

Le savoir

Dans le meilleur des cas, le savoir est clairement formulé et contextualisé dans l’ensemble des connaissances implicites nécessaires à sa bonne compréhension. Très souvent la contextualisation manque. Aujourd’hui, les savoirs évoluant très rapidement, ceux-ci sont souvent encore mal formulés au moment où ils sont les plus intéressants pour l’innovation, c’est-à-dire dans leur phase émergente. Un des enjeux du management des connaissances est la captation des savoirs dans leur phase d’émergence, leur reformulation afin de les clarifier, et leur recontextualisation afin de les rendre facilement opérationnels.

Le savoir-faire

Nous faisons constamment l’expérience qu’un savoir, même clairement explicité, ne garantit pas l’efficacité dans l’action. J’ai beau connaître la théorie de la navigation, cela ne fait pas de moi un bon marin. Le savoir-faire est le tour de main que j’acquière en mettant en œuvre mon savoir dans le cadre d’une action. Les nouvelles technologies de l’information, la réalité virtuelle et l’utilisation de l’image et la vidéo sont autant d’outils qui facilitent la transmission de ce savoir-faire encore faut-il qu’il ait été codifié et enregistré.

Le savoir être

Au-delà du savoir-faire, quand on analyse finement les raisons de l’excellence dans une matière, on découvre un véritable « savoir être ». Ce savoir être est souvent complètement implicite et donc non-dit. Il fait référence à un certain nombre de valeurs morales, éthiques ou esthétiques que la personne véhicule sans les avoir analysées. Ce sont des représentations du monde, des « paradigmes » qui sont transmis de manière informelle, le plus souvent par l’éducation familiale, ou qui sont élaborées plus ou moins inconsciemment par l’individu ou l’entreprise dans un désir de se dépasser. Ces dernières années on a vu des efforts croissants des entreprises les plus performantes au monde pour rendre explicite leur savoir être à travers des chartes de valeurs ou d’engagements les plus transparentes possibles.

C’est la capacité de créer des réseaux d’individus atypiques et innovants à l’intérieur et à l’extérieur de l’entreprise qui est la clé d’un véritable management des connaissances ancré sur une profonde dynamique.

Capitalisation, circulation et réseau

Le management des connaissances étant un champ de réflexion en pleine émergence, on mélange parfois les dimensions qui sont extrêmement hétérogènes. On peut distinguer trois problématiques essentielles : capitalisation, circulation, réseau.

Capitalisation

Il s’agit de capitaliser dans des bases de données les plus intelligentes possibles l’ensemble des connaissances que l’on aura identifiées comme étant importantes et signifiantes pour l’entreprise. Le management des connaissances vu sous cet aspect est souvent perçu comme une évolution du service de documentation modernisé grâce aux nouvelles technologies. L’information voit souvent sa pertinence et son actualité chuter avec le temps. Cette approche du management des connaissances est limitée : si elle a l’avantage de thésauriser méthodiquement l’information, elle a peu d’impact sur l’avantage concurrentiel et l’innovation.

Circulation

La capitalisation de l’information doit être mise au service de chacun à travers la circulation. La circulation est la problématique de l’accès direct aux données ainsi que de l’enrichissement des données à l’initiative de chacun. La circulation pose des problèmes technologiques qui sont de plus en plus facilement résolus par les nouvelles technologies de l’information, mais pose aussi des questions humaines qui trouvent leurs solutions dans un travail sur la culture et le management de l’entreprise. Les individus ont par atavisme l’habitude de garder l’information pour leur tribu, de protéger leur territoire par le secret et d’avoir des comportements mercenaires qui sont autant d’habitudes contraires à un bon management des connaissances en termes de circulation. On trouve dans la circulation les véritables enjeux du management des connaissances et c’est dans ce domaine où il reste beaucoup à faire, car l’implémentation des technologies les plus avancées dans l’entreprise ne garantit aucunement la circulation de l’information si les êtres humains n’en sont pas le moteur. C’est cette circulation qui permet à la base de données de s’enrichir constamment de manière pertinente et vivante.

Un savoir devient une connaissance lorsque la compréhension en profondeur du contexte et des conditions de l’action crée une véritable dynamique chez celui qui connaît, et lui permet d’innover dans sa création et sa communication.

Réseau

De tout temps l’information la plus créative et la plus pertinente a été créée par des individus échangeant de manière informelle et transversale au-delà de leur discipline. Le management des connaissances implique au plus haut niveau de son efficacité un véritable management en réseau. C’est la capacité de créer des réseaux d’individus atypiques et innovants à l’intérieur et à l’extérieur de l’entreprise qui est la clé d’un véritable management des connaissances ancré sur une profonde dynamique. Le management des réseaux implique un savoir être de qualité chez chacun des membres du réseau. On comprend que l’information circule mieux chez des individus qui partagent un certain nombre de valeurs, sont affectivement liés, et ont un véritable respect de l’apport de chacun.

L’écosystéme innovant permet de créer une meilleure appréhension des enjeux sociétaux, de clarifier les leviers à activer et d’élaborer les postures à adopter pour faciliter la prise de décision.

Extrait de Saloff-Coste M., Écosystèmes innovants. Le futur des civilisations et la civilisation du futur, 2021, vol. 11, ISTE Éditions.

L’information est une caractéristique essentielle des écosystèmes d’innovation

L’innovation est en réalité une nouvelle information, de l’idée au concept informé, qui peut donner lieu à un usage. Ce qui distingue une idée d’une innovation est l’impact de l’innovation sur le monde. Au cœur de cet impact se niche la capacité de conceptualiser une information nouvelle, inexistante auparavant. Cette information peut être de différents types : technique, avec une nouvelle technique développée et protégée par un brevet ; une nouvelle manière de manager, de s’organiser ou de nouvelles formes et design. L’innovation est une philosophie, et la philosophie est au cœur de l’innovation. Innover consiste à développer de nouvelles idées dans le monde réel, ce que souhaite faire la philosophie. L’innovation commence donc par une capacité à philosopher et à prendre de la distance. Albert Einstein a ainsi su prendre du recul par rapport aux connaissances de son temps et a reconstruit sa manière de penser sur des prémisses différentes de celles de ses contemporains. Nous touchons ici à un nouveau concept extrêmement important : la capacité à créer des ontologies, de nouveaux systèmes sémantiques de signes et de concepts qui vont articuler de nouvelles formes de rationalité et montrer le monde de manière différente. L’innovation est le fait d’avoir de nouvelles idées et de les matérialiser. Pourquoi avons-nous de nouvelles idées, d’où viennent-elles ? Les innovations viennent d’un nouveau regard sur le monde capable de construire de nouvelles épistémologies, de nouvelles manières de connaître le monde, c’est-à-dire des ontologies. Il y a ici quelque chose de fascinant au cœur de l’innovation : cette production de nouveaux êtres au monde.

Le concept d’écosystème innovant doit se comprendre comme une tentative de signifier la complexité systémique des agents créatifs dans leurs interactions. Ce concept renvoie aux théories qui tentent de modéliser la complexité à partir d’une nouvelle approche épistémologique dite « systémique » par différenciation avec l’approche mécaniste traditionnelle. Des auteurs comme Edgar Morin, Joël de Rosnay et Peter Senge ont explicité en détail cette démarche novatrice dès les années 1990. Notre livre Le management systémique de la complexité1, publié dès les années 1990, s’inscrit dans ce contexte.

D’après nos connaissances, le terme « écosystème d’innovation » apparaît pour la première fois dans la Harvard Business Review sous la plume de Ron Adner en 2006 dans l’article “Match Your Innovation Strategy to Your Innovation Ecosystem” 2. En 2018, Masaharu Tsujimoto et al. considèrent dans “A Review of the Ecosystem Concept. Towards Coherent Ecosystem Design” 3 qu’il existe environ 90 articles académiques traitant du sujet. En 2019, Ove Granstrand et Marcus Holgersson dans “Innovation ecosystems : A Conceptual Review and a New Definition” 4 en considèrent 120. Dans cet article, les auteurs soulignent que le concept d’écosystème innovant est devenu populaire dans les quinze dernières années tout en créant un débat sur la pertinence et la rigueur intellectuelle du concept. Dans cet article, ils proposent une définition mise à jour à partir de l’ensemble de la littérature étudiée : « Un écosystème d’innovation est l’ensemble évolutif des acteurs, des activités et des artefacts, ainsi que des institutions et des relations, y compris les relations complémentaires et de substitution, qui sont importants pour la performance innovante d’un acteur ou d’une population d’acteurs. » 5 Ils soulignent que l’approche systémique a maintenant une longue tradition pour étudier les phénomènes complexes dans un champ très large de disciplines. Dans les études sur l’innovation, le concept d’écosystème d’innovation a été largement utilisé sous des qualificatifs différents comme les « systèmes nationaux d’innovation » 6 ou « sectoriels » 7. Le concept d’écosystème est aussi repris dans différentes approches économiques : les écosystèmes de l’innovation, les écosystèmes des entreprises, les écosystèmes des plateformes, les écosystèmes technologiques, les écosystèmes entrepreneuriaux et les écosystèmes de la connaissance8.

Comme le souligne Pierre Giorgini dans sa trilogie Le monde qui vient, nous basculons significativement d’une économie exocontributive mimétique où les opérateurs anonymes sont pilotés deus ex machina, à une économie endocontributive basée sur l’autonomie, la responsabilité, la proactivité et la créativité de chacun. Dans l’unité de la diversité, l’être humain devient auteur souverain et sujet singulier au sein de la noosphère des écosystèmes innovants planétaires. Dans une perspective judéo-chrétienne, on peut voir symboliquement l’objectivation existentielle de la promesse christique de la valeur identitaire de chacun à travers son « âme » et l’inscription éternelle de son « corps de lumière » dans le « ciel ». Dans une perspective postmoderne, le sujet révélé dans son altérité radicale s’inscrit dans le « champ de consistance », selon Gilles Deleuze. Dans la vision intégrative d’Ervin Laszlo, l’information est préservée dans le champ Akashique. Spinoza, quant à lui, défend l’éternité de l’altérité du sujet dans sa dimension atemporelle en expliquant que « la substance est ce qui est en soi et est conçu par soi » (Éthique I, définition 3).

D’un point de vue historique, il est frappant de constater que de toutes les cultures émanent des témoignages d’individus ayant atteint un haut niveau de sagesse. Parfois, ces personnages sont eux-mêmes considérés comme fondateurs de civilisations. Leurs discours sont gardés précieusement avec la trace de leurs faits et gestes. Au-delà des particularismes culturels, ces témoignages ont une profonde cohérence structurelle les uns avec les autres. Cette cohérence a été longuement rendue explicite par Carl Jung qui a fondé sur cette base la notion d’« inconscient collectif ». Des auteurs aussi éminents qu’Aldous Huxley ou Mircea Eliade ont poursuivi par la suite ce travail qui a donné lieu, dans le monde entier, au développement de la « psychologie transpersonnelle ». Des physiciens comme Fridjof Capra ont par ailleurs montré que les descriptions de la réalité faite par ces « sages » à partir de leur expérience mystique vécue, collent étrangement à la réalité décrite théoriquement par la physique moderne. Ainsi, il devient apparemment clair que l’une des tâches les plus importantes à laquelle nous devrions consacrer notre intelligence et nos moyens est l’exploration du développement de notre conscience ! Frédéric Laloux, ancien partenaire senior chez McKinsey & Company, dans le livre Reinvinting organizations9, explicite en détail les implications d’une vision intégrative et systémique sur les organisations. Le livre, préfacé par Ken Wilber, raconte l’émergence d’une manière radicalement nouvelle de concevoir les entreprises. Il ne s’agit pas d’un modèle théorique ou d’une utopie : le livre décrit une réalité qui prend forme sous nos yeux, pratiquée par un nombre croissant d’entreprises et d’associations, d’écoles et d’hôpitaux. Il s’attache à expliquer, de manière concrète et détaillée, comment sont structurées et gérées ces organisations qui démontrent qu’un autre management est possible, bien plus efficace, humain et porteur de sens.

Les systèmes d’évaluation permettant de mesurer l’innovation

Les systèmes d’évaluation permettant de mesurer l’innovation se sont multipliés ces dernières années à mesure que l’innovation est devenue de plus en plus stratégique pour un continent, un pays, une ville, une entreprise, etc. Comme toute évaluation, l’important est d’analyser en profondeur les éléments comparatifs. Par exemple, l’étude Global Startup 2019 sur les écosystèmes des start-up dans le monde analyse une centaine de villes à travers neuf critères. Les 25 villes les plus dynamiques de la planète sont alors : la Silicon Valley, New York, Londres, Beijing, Boston, Tel-Aviv, Los Angeles, Shanghai, Paris, Berlin, Stockholm, Seattle, Toronto, Singapour, Amsterdam, Austin, Chicago, Bangalore, Washington, San Diego, Denver, Lausanne-Bern-Genève, Sydney, Vancouver et Hong Kong. D’autres types d’évaluations comme le Global Innovation Index croisent plusieurs dizaines de critères ; les 24 pays en tête de liste dans l’index 2019 sont : Suisse, Suède, Hollande, États-Unis, Pays-Bas, Angleterre, Finlande, Danemark, Singapour, Allemagne, Israël, Corée du Sud, Irlande, Hong Kong, Chine, Japon, Canada, Luxembourg, Norvège, Islande, Autriche, Australie, Belgique. En croisant une dizaine d’évaluations planétaires construites à partir de critères différents, on peut arriver à une vision globale des courants dominants et faits majeurs. Il existe une littérature abondante sur les facteurs d’efficacité d’un écosystème d’innovation et aussi quelques tentatives pour établir une théorie générale. Il faut cependant remarquer que les écosystèmes innovants de la planète sont en rapide évolution et extrêmement complexes. Les boucles entre recherche fondamentale et application commerciale se raccourcissent. La recherche-action contemporaine échappe de plus en plus à l’analyse académique qui est trop déconnectée du terrain et trop lente. Le fossé se creuse entre les zones les plus avancées et celles qui prennent du retard. Le prix du foncier et le coût de la vie explosent dans les zones les plus dynamiques et implosent ailleurs : la dynamique d’innovation renforce les clivages sociaux.

Pourquoi et en quoi les EAK sont-ils un écosystème d’innovation ?

Les EAK ont été lancés en octobre 2012, ils sont un dispositif singulier à l’échelle départementale. Leur fondation peut s’expliquer pour plusieurs raisons. La volonté de Patrick Devedjian, président de l’époque, de réfléchir à l’avenir du département avec les élus de tous les partis, les agents et les partenaires du territoire. L’inspiration donnée par l’héritage d’Albert Kahn, grand visionnaire de son époque et convaincu de l’importance de la culture, de l’éducation et des voyages. Le désir de favoriser le décloisonnement de la pensée et la transversalité de l’administration départementale. Mais aussi tout simplement le plaisir de rassembler dans un même lieu des personnes qui ont envie de partager, d’échanger et de se cultiver. Les EAK constituent un écosystème de personnes qui se rencontrent autour de sujets stratégiques pour le territoire, de manière à réfléchir ensemble et d’améliorer la gouvernance de la politique publique. On s’informe et ce travail d’élaboration est synthétisé dans les fameux cahiers des EAK qui permettent une diffusion au sein de l’administration, dans les collectivités territoriales et auprès d’une variété de publics. Plus de 55 thématiques ont été abordées, discutées et synthétisées dans les cahiers des EAK. Le tout est mis à disposition en ligne. Les EAK sont un espace de réflexion prospective, mais ils sont aussi un lieu d’expérimentation favorisant les approches intellectuelles et scientifiques.

L’inspiration donnée par l’héritage d’Albert Kahn, grand visionnaire de son époque et convaincu de l’importance de la culture, de l’éducation et des voyages.

Ces expérimentations font souvent appel à de nouveaux protocoles qui mêlent le savoir, le savoir-faire et le savoir être, car les postures managériales sont importantes. C’est un écosystème innovant, car il favorise la circulation de connaissances au sein du département et harmonise les points de vue entre les élus et les agents. Espace d’innovation, il permet de créer une meilleure appréhension des enjeux sociétaux, de clarifier les leviers à activer et d’élaborer les postures à adopter pour faciliter la prise de décision. Les politiques publiques nécessitent de renforcer la transversalité et l’inscription dans la durée, ce que permet ce laboratoire d’innovation publique depuis dix ans !

  1. Saloff-Coste M., Le management systémique de la complexité, 1990, Aditech, CPE Études.
  2. Acher R., “Match Your Innovation Strategy to Your Innovation Ecosystem”, Harvard Business Review avr. 2006.
  3. Tsujimoto et al., “A Review of the Ecosystem Concept. Towards Coherent Ecosystem Design”, Technological Forecasting and Social Change nov. 2018, vol. 136, p. 49-58.
  4. Granstrand O. et Holgersson, “Innovation Ecosystems : A Conceptual Review and a New Definition”, Technovation févr.-mars 2020, vol. 90-91.
  5. Notre traduction de : “An innovation ecosystem is the evolving set of actors, activities, and artifacts, and the institutions and relations, including complementary and substitute relations, that are important for the innovative performance of an actor or a population of actors.
  6. Freeman C., Clark J. et Soete L., Unemployment and Technical Innovation : a Study of Long Waves and Economic Development, 1982, Burns & Oates, et Lundvall B.-A., National System of Innovation : towards a Theory of Innovation and Interactive Learning, 1992, Pinter publishers.
  7. Breshi S. et Malerba F., “Sectoral Innovation Systems : Technological Regimes, Schumpeterian Dynamics, and Spatial Boundaries”, in Edquist C. (dir.), Systems of Innovation : Technologies, Institutions and Organizations, 1997, Thomson learning, p. 130-156.
  8. Jacobines M. G., Cennamo C. et Gawer A., “Towards a Theory of Ecosystem”, The Strategic Management Journal 2018, p. 2255-2276.
  9. Laloux F., Poireaux G.-N. et Blanchard P., Reinventing organizations. Vers les communautés de travail intégrées, 2015, Éditions Diateino.
×

A lire aussi