Biodiversité : le Muséum national d’Histoire naturelle renforce ses actions en direction des collectivités locales

Le Muséum s'engage pour la biodiversité
De gauche à droite : Romain Julliard, professeur au Centre d’Ecologie et des Sciences de la Conservation (CESCO), Gilles Bloch, président, Jérôme Gestin, directeur général adjoint et Nirmala Séon-Massin, directrice de l’expertise, le 28 novembre 2023 au Muséum national d'Histoire naturelle.
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Le 7 février 2024

Fort de son expertise scientifique et de ses équipes pluridisciplinaires, l’établissement public a annoncé le 28 novembre 2023 de nouveaux outils et dispositifs pour les décideurs publics afin de les former et de les aider à évaluer l’impact de leurs actions sur la biodiversité.

Décrypter la complexité du vivant fait partie des missions historiques du Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) depuis près de quatre cents ans, connu du grand public pour la richesse et la diversité de ses collections, avec comme vitrine la grande galerie de l’évolution située dans le Jardin des plantes à Paris.

Après avoir « émerveillé pour instruire » des générations entières, l’établissement public qui regroupe douze sites en France et emploie 610 chercheurs s’est fixé un nouvel objectif : « Émerveiller pour agir. »

Pour son nouveau président, Gilles Bloch, arrivé à la tête du MNHN le 1er septembre 2023, il y a désormais urgence à agir face au déclin de la biodiversité : « Les chiffres consolidés au niveau de la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES)1 – l’équivalent, pour la biodiversité, de ce que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est pour le climat – sont réellement alarmants. À l’horizon 2070, dans la zone intertropicale, il n’y aura plus de mammifères ni d’oiseaux de plus de 10 kg si l’on ne fait rien », met en garde le nouveau président du Muséum.

Disparition des espèces en France - Observatoire nationale de la biodiversité

Les collectivités locales, la bonne échelle pour agir

Les facteurs à l’origine du déclin de la biodiversité sont bien connus des scientifiques. Le changement climatique, la fragmentation et la destruction des habitats, la pollution, la surexploitation des ressources et les invasions biologiques sont les cinq principaux facteurs impactant la biodiversité. Les collectivités locales, du fait de leurs compétences, périmètres d’action et fines connaissances du territoire, constituent la bonne échelle pour agir contre le déclin de la biodiversité. Encore faut-il que les élus locaux et les décideurs à la tête des administrations soient accompagnés, financièrement, mais aussi sur le plan scientifique :

Il y a une demande des élus d’être formés. On doit pouvoir faire basculer ces décideurs dans notre camp, car ce sont eux qui à la fin délivrent les permis de construire et d’aménager », a expliqué Gilles Bloch en conférence de presse au lendemain de l’annonce de la Stratégie nationale biodiversité 2030 pour stopper puis inverser l’effondrement de la biodiversité.

Une stratégie qui prévoit notamment de renforcer l’accompagnement des collectivités, avec un programme dédié « Érable. Raconter le vivant pour agir », pour faire germer dans les territoires la mise en récit de notre rapport au vivant, et « inventer ensemble nos solutions pour préserver la biodiversité » 2.

Une boîte à outils pour préserver la biodiversité

« Le Muséum se positionne dans la mise en œuvre de cette stratégie nationale de biodiversité. Il faut sensibiliser, informer, mais aussi et surtout déclencher des actions », explique Nirmala Séon-Massin, la directrice de l’expertise au sein du Muséum. Sa direction joue un rôle de premier plan pour fournir un appui scientifique aux politiques publiques de transition écologique, mais aussi aux collectivités. Une direction qui s’appuie notamment près de 200 expert·es aux profils variés en prévenance du Conservatoire botanique national du bassin parisien (CBNBP) et du centre d’expertise et de données sur le patrimoine naturel, baptisé « PatriNat » 3.

Parmi les outils déjà disponibles pour mieux connaître et comprendre la réglementation des espaces et espèces protégés, il y a, par exemple, les cartes thématiques du CBNBP, comme la carte d’alerte d’Île-de-France et de Bourgogne, qui permet aux décideurs locaux de prendre en compte les enjeux flore et végétation avant de lancer un projet d’aménagement4 ; l’indice de qualité écologique (IQE), « un petit diagramme en radar qui permet de visualiser le diagnostic écologique » d’un site, ou encore Persicaire (pour « pressions État réponses des sites en contexte anthropisé : inventaire rapide et évaluation ») qui vise à caractériser la biodiversité à l’échelle d’un site d’étude d’une superficie inférieure à 10 hectares : « Cet outil permet de visualiser les pressions (pollution atmosphérique ou lumineuse, dépôts sauvages, etc.) sur un site », explique Nirmala Séon-Massin.

Au début de l’année 2024 devrait aussi être lancée une boîte à outils biodiversité (BOB), un diagnostic en amont destiné aux décideurs : « BOB permettra à l’utilisateur d’accéder facilement à des informations de synthèse à jour sur l’occupation du sol, les zonages d’inventaire et de protection (espaces protégés, zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique [ZNIEFF], sites Natura 2000), les réservoirs de biodiversité, les continuités écologiques ou encore des données d’observations d’espèces (faune, flore et fonge) et d’habitats naturels », explique le dossier de presse remis lors de la conférence de presse.

BOB, un diagnostic en amont pour les décideurs Muséum national d'histoire naturelle

Parallèlement à ces actions, le Muséum a lancé un programme de recherche pour plancher sur la mise au point d’un « indicateur unique sur la biodiversité » pour évaluer l’impact d’une entreprise sur la biodiversité, l’équivalent à « l’indicateur carbone » pour mesure l’impact carbone.

  1. La plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a été créée en 1992.
  2. https://www.ecologie.gouv.fr/strategie-nationale-biodiversite
  3. PatriNat est une unité d’appui et de recherche (UAR) placée sous quatre tutelles : l’Office français de la biodiversité (OFB), le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et l’Institut pour la recherche et le développement (IRD) ().
  4. https://cbnbp.mnhn.fr/cbnbp/observatoire/cartes.jsp
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