Revue
Ils nous étonnentLhyfe à l’assaut de la révolution de l’hydrogène vert
Start-up nantaise créée en 2017, Lhyfe est devenu en quelques années un acteur de premier plan en France dans la production d’hydrogène 100 % écologique pour la mobilité et l’industrie. Avec l’inauguration de sa première usine de production reliée directement à des éoliennes à Bouin en Vendée, la jeune pousse tricolore a pour ambition d’avancer vite et fort. Son pari est de produire de manière industrielle de l’hydrogène renouvelable, à l’échelle locale et en circuit court, à partir de l’eau de mer et du vent alors que plus de 95 % de l’hydrogène est aujourd’hui produit à partir des énergies fossiles.
« Le rêve devient réalité aujourd’hui : créer une énergie propre qui ne rejette que de l’eau et de l’oxygène », s’enthousiasme Matthieu Guesné, le président fondateur de Lhyfe, ce 30 septembre 2021, à Port-du-Bec en Vendée, à quelques mètres de l’océan, le jour de l’inauguration officielle de sa première usine de production d’hydrogène renouvelable en France. Un moment historique pour ce spécialiste de la technologie de l’hydrogène et ancien responsable de recherche du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) à Nantes.
À la manière des keynote d’Apple, devant un parterre d’élus locaux, de partenaires institutionnels, de représentants de la filière française et de journalistes, le jeune entrepreneur confie sa vision de l’avenir :
« Nous vivons un moment de bascule et un changement de paradigme. Nous n’avons plus que dix ans pour agir face à l’urgence climatique. La décennie qui s’ouvre sera celle de l’hydrogène renouvelable, assure-t-il, avant d’annoncer fièrement : nous sommes les seuls au monde à produire de l’hydrogène vert à l’échelle industrielle à partir de l’eau de mer et du vent ! »
Un site de production unique au monde
C’est sur une parcelle de 4 000 m², située au cœur des marais vendéens et à moins d’un kilomètre des éoliennes du parc de Bouin, que le bâtiment industriel de 700 m² est sorti de terre en un temps record (moins d’un an). Antoine Hamon, le directeur du site et membre de l’équipe fondatrice de Lhyfe, fait visiter les installations flambantes neuves, qui ont coûté 10 millions d’euros : « Nous produisons 300 kilos d’hydrogène vert par jour, la production à la fin de l’année 2021 sera d’une tonne par jour », confie-t-il aux visiteurs.
De quoi alimenter une cinquantaine de véhicules lourds (bus, bennes à ordures ménagères, chariots élévateurs) via un réseau de distribution de quatre stations-service de l’ouest, à La-Roche-sur-Yon (Vendée), Le Mans (Sarthe) et Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Le procédé consiste à récupérer l’eau de mer, à la désaliniser et la déminéraliser, avant d’extraire l’hydrogène grâce un électrolyseur alimenté directement par trois éoliennes du parc :
« Le site de Bouin fait aussi office de centre de recherche et développement. Il offre les conditions idéales pour tester la production offshore (eau puisée dans l’océan et désalinisée, environnement salin corrosif, etc.) », explique Antoine Hamon.
VHyGO, produire un hydrogène renouvelable accessible à tous dans le Grand Ouest
Le projet VHyGO (Vallée Hydrogène Grand Ouest) porté par Lhyfe vise à démocratiser l’accès à l’hydrogène renouvelable dans le grand ouest en accompagnant tous les territoires, quelle que soit leur taille, dans leur transition vers une mobilité verte. Son objectif à l’horizon 2024 : déployer dix sites de production, vingt stations de distribution et 500 véhicules hydrogène sur les régions Bretagne, Normandie et Pays de la Loire. L’objectif du consortium est de faire en sorte que toute entreprise, toute collectivité intégrée au projet VHygo se situe à moins de 100 kilomètres d’un site de production d’hydrogène renouvelable disponible à moins de 10 euros le kilo à la pompe d’ici 2030.
En effet, la start-up s’intéresse déjà au potentiel de production d’hydrogène vert à partir d’éoliennes offshore, qui produisent plus d’électricité que les éoliennes terrestres, avec une première expérimentation dès 2022 en France, au large du Croisic.
Fort de la réussite de ce démonstrateur, Lhyfe a levé le jour de l’inauguration 50 millions d’euros auprès de Swen Capital Partners, de la Banque des territoires et de ses partenaires historiques. La jeune pousse nantaise a aussi signé avec l’américain Plug Power, spécialiste des piles à hydrogène, pour passer à la vitesse supérieure, à l’occasion du salon Hyvolution le 28 octobre 2021.
Alors que la France prévoit d’investir 7,2 milliards d’euros d’ici à 2030 dans le cadre de son plan de relance pour faire émerger cette filière destinée à l’industrie et les mobilités lourdes, Lhyfe se positionne déjà comme l’un des pionniers français de l’hydrogène vert, à condition d’arriver à faire bouger les lignes notamment sur la question du coût de production. Ce pari d’un hydrogène vert accessible sera-t-il tenable ?