Gilles Franchetto, responsable du service Mécénat et innovation à l’Eurométropole de Metz

Gilles Francheto
©DR
Le 3 août 2022

Gilles Franchetto est le responsable du service Mécénat et innovation à l’Eurométropole de Metz. À ce titre, il est responsable du M’Lab, le laboratoire d’innovation interne de la métropole. Pour Horizons publics, il nous plonge dans son actualité, des différents temps de la transformation publique aux nouveaux métiers à développer au sein des collectivités territoriales.

1 – Le temps de la transformation publique

En matière de transformation publique, j’ai le sentiment qu’il y a une certaine forme d’ambiguïté : la sagesse du temps long et la nécessité du temps court. Il faut savoir changer de rythme en permanence. Qu’on s’intéresse à la conduite d’un projet ou à la transformation des pratiques d’une organisation, il faut garder en tête la question du temps long et en même temps des moments où il faut savoir accélérer et « aller vite ». Prenons le cas de la gestion de projets : dans notre méthode de travail, il y a deux grandes séquences – celle où l’on creuse le problème, puis celle où l’on recherche des solutions. La première phase est trop souvent minimisée ou tout du moins on a tendance à la réduire à un diagnostic assez « froid » et chiffré. Il faut constamment se rappeler et réussir à se poser la question de ce que l’on cherche à résoudre ou à améliorer. Car cette phase de diagnostic doit nous appeler, à terme, à formuler une bonne problématique, du type « comment pourrions-nous faire pour… ». Nous n’avons peut-être pas assez l’habitude de prendre du temps sur cette partie. Il faut travailler autour du problème, identifier les vrais irritants, les besoins et la problématique : aller chercher des données quantitatives, mais aussi du « qualitatif » lié aux usages. Au passage, il ne faut pas confondre problème et problématique. Cela passe par de l’immersion et de l’écoute, des enquêtes auprès des parties prenantes. Il faut trouver les bonnes modalités pour le faire. Cela prend du temps… Les gens doivent être disponibles, il faut aller sur le terrain… Parfois deux, trois ou quatre fois pour reposer toutes les questions et cerner les bonnes questions, celles qui libéreront la parole et iront chercher les raisons profondes. La partie benchmark aussi prend du temps. Cette séquence, où l’on se concentre sur le diagnostic, a tendance à vouloir être toujours réduite. Mais elle est essentielle !

Cette phase de problématisation est invisible. Il n’y a rien à montrer si j’ose dire. Elle ne fait pas forcément rêver ! Il n’y a pas de livrables. Cela peut gêner des donneurs d’ordres ou des commanditaires. Je pense souvent à cette célèbre citation d’Albert Einstein que nous avons affichée dans nos bureaux : « Si j’avais une heure pour résoudre un problème, je passerais cinquante-cinq minutes à définir le problème et cinq minutes pour trouver la solution. » On peut aller trop vite sur une solution qui ne correspond pas au problème posé. Une solution donne tout de suite une image mentale facile à se représenter. Mais si le problème a été mal défini, cela ne sert à rien.

Sur la question de la transformation des pratiques d’une organisation, je fais le constat que c’est un peu la même chose : pour refondre des process, envisager d’autres fonctionnements le tout en mode co-construction (et pas simplement en mode concertation) il faut se donner du temps sur la phase de problématisation pour s’entendre collectivement et de manière fine sur ce que l’on cherche à améliorer ou résoudre. Par la suite, lorsque l’on est en phase de solution et que l’on rassemble beaucoup de personnes en atelier, où le temps de chacun est précieux, il faut aller vite, en préparant des séances d’intelligence collective efficaces.

Je vais prendre un exemple : pendant la préfiguration du laboratoire, avec La 27région, où nous travaillions sur des cas d’usages réels pour identifier les apports d’un laboratoire d’innovation, une collègue est venue nous voir sur une question de « boîte à clés » [dispositif d’accès aux clés de véhicules de service]. Au sein de la collectivité, les agents se plaignaient, car il n’y avait pas assez de véhicules disponibles ou pas rendus en temps et en heure, et donc pas de clés disponibles. On nous a dit : « La boîte à clés, ça ne fonctionne pas, il faut trouver une autre solution. » Le vrai sujet derrière tout cela était beaucoup plus large. La problématique tenait plus du « comment faire pour encourager d’autres pratiques de mobilités professionnelles ? » Comment encourager d’autres modes de transport pour les courts trajets pour libérer la pression sur le parc de véhicules ? Alors on s’est intéressé à la manière dont les agents venaient jusqu’au bureau. À pied ? À vélo ? Non, en voiture. Et ils prennent tous massivement l’habitude de réemprunter une voiture de service alors que c’est possible pour certains de gagner du temps en prenant le bus, le vélo ou en y allant à pied. Quel était leur frein à utiliser le bus ou le vélo : le regard des autres collègues ou de leur hiérarchie, la méconnaissance des bons trajets sécurisés, l’impression de perdre du temps, la disponibilité de carte de transport, etc. Le sujet avait été décalé. L’objet technique ne répondait pas aux attentes mais le besoin était de prendre la hauteur. Une solution technique, c’est un cahier des charges avec des préconisations, des spécificités fonctionnelles, et ensuite, des prestataires livrent l’objet ou le produit. Mais on a oublié tout ce qui va autour : l’humain, et la manière d’appréhender l’objet.

2 – Les laboratoires d’innovation internes

Quand on prend le temps de bien définir le problème, on peut ensuite passer à la recherche de solutions. Ce sera sûrement une combinaison de plusieurs solutions plutôt qu’une solution unique. C’est là qu’un laboratoire d’innovation interne est intéressant, car c’est une équipe habituée à réfléchir différemment qui vient apporter une nouvelle vision à un service parfois trop centré sur son quotidien. Nous ne sommes experts en rien, nous sommes les garants d’une méthode.

Un autre exemple intéressant : nous travaillons actuellement sur un projet d’installation de bornes numériques en mairie de quartier. Un collègue nous a sollicités pour réfléchir sur la forme et l’implantation de ce type d’équipement. Nous avons très tôt voulu comprendre quel problème il voulait résoudre avec ces bornes et dans quelles conditions elles seraient utilisées. Quel type d’usagers allaient les utiliser et pour quelles fonctionnalités ? Finalement et après une phase d’observation et d’écoute qui a pris plusieurs mois, nous travaillons aujourd’hui sur la manière dont cette borne va être utilisée par les conseillers numériques des mairies de quartier et par les agents d’accueil. Imaginer comment ils vont interagir avec cet objet pour amener progressivement les usagers à les utiliser en autonomie. On a décalé le problème. Cependant, ce qui est compliqué, c’est que le temps politique n’est pas toujours en accord avec ce temps long. Les élus ont une durée de mandat. Les résultats doivent être visibles. C’est un des freins avec cette méthode. Le temps médiatique n’est pas non plus adapté…

Pour revenir sur le sujet du fonctionnement d’un laboratoire d’innovation, on en définit deux grands types. Les laboratoires intégrés, d’une part, et les laboratoires facilitateurs1, de l’autre. Les intégrés se saisissent des projets, puis les mènent. Les facilitateurs vont plutôt prendre des commandes auprès de leurs collègues et des services puis les accompagner. Au niveau de la métropole de Metz, nous agissons plus comme des facilitateurs, pour l’instant. Nous sommes donc dépendants parfois de leur rythme et de leur charge de travail pour avancer.

À l’échelle nationale, et même si le mouvement va croissant, il n’y a pas encore de mission innovation ou de laboratoires d’innovation dans toutes les grandes collectivités. Le fait que certaines administrations avancent dans ce domaine et pas dans d’autres peut amener à une certaine forme de « décalage » ou de retard entre les collectivités. À Metz, notre laboratoire est certes récent, peut-être encore fragile, mais doté d’une vraie équipe et d’un soutien fort de notre hiérarchie et j’ai ainsi la conviction que nous sommes dans le « sens de l’histoire » des administrations. Dans d’autres collectivités, j’observe que c’est plus souvent une personne seule et un peu isolée. Il leur est alors beaucoup plus difficile de changer les habitudes de fonctionnement en silo. Un laboratoire, ce sont des compétences, des méthodes et une légitimité qu’il faut asseoir. Il faut donner confiance aux personnes qui souhaitent s’investir là-dedans. Certaines collectivités risquent de rester au bord du chemin.

Ce n’est pas une question de taille d’ailleurs. Je vais prendre l’exemple du programme Petites villes de demain de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) qui est vraiment intéressant dans ce domaine. Ce programme finance de l’ingénierie d’animation et de pilotage pour conduire des projets de territoire transversaux pendant près de trente-six mois. Ne pas financer que de l’investissement c’est un bon progrès ! Lorsque je m’occupais de recherche de financement, j’entendais souvent dire : « On ne finance que l’équipement et la maîtrise d’œuvre. » D’accord, très bien, mais financer la matière grise qui, en interne, coordonne, pilote, organise et met en œuvre, et qui va amener des approches décloisonnées entre services est quand même une saine évolution !

Ce risque de décalage doit interroger la notion d’attractivité des collectivités en matière d’emploi. Sur certaines fonctions d’encadrement intermédiaire notamment, il est compliqué de recruter. Les personnes ouvertes à l’innovation vont aller vers des territoires déjà classés comme « innovants ». C’est un cercle vertueux, notamment pour la marque employeur. C’est là où le portage politique est très important.

3 – L’inclusion numérique au sein des administrations

La crise du covid-19 a joué un rôle d’accélérateur de digitalisation de nos administrations. De nombreuses choses que l’on pensait impossibles sont devenues envisageables par la contrainte. À notre échelle, nous avions, par exemple, relativement peu d’agents dotés d’ordinateurs portables, ou de système de visioconférence. Tout s’est développé très vite finalement pour assurer la continuité du service public. Mais ce qui est intéressant, c’est qu’en même temps, nous avons pu déployer massivement des outils et des solutions pour accompagner le travail en mode collaboratif. Le revers de la médaille, c’est que nous n’avons pas eu forcément le temps d’accompagner les agents et de les former. Il y a un décalage entre les agents qui sont à l’aise avec les outils collaboratifs de co-écriture, de partage d’informations ou de communication instantanée et puis d’autres, qui n’ont pas forcément pris le temps de s’y habituer ou qui n’y ont pas vu un intérêt. Dans une collectivité, on retrouve des tas de métiers différents qui ne sont pas connectés en permanence. Pour donner un exemple très concret, dans notre quotidien, nous misons sur l’intelligence collective. Au-delà des temps d’échanges en présentiel, le travail collaboratif est essentiel. Il est aujourd’hui très facile de travailler ensemble sur des outils de mise en commun : un document partagé évite de créer une boucle de mails où l’on va finir par perdre des informations ou la bonne version d’un fichier, etc., et pourtant, cette pratique s’est-elle vraiment développée dans nos équipes ? Et surtout pourquoi cela a du mal à prendre ? Cela peut paraître basique ou anecdotique, mais c’est une réalité de nos administrations. Au sein de notre DSI, nous avons deux personnes qui ont la charge de l’inclusion numérique des agents. Elles les accompagnent pour prendre en main les nouveaux logiciels. Mais il ne suffit pas de proposer des formations. Il faut aussi travailler autour des freins plus psychologiques et les lever l’un après l’autre. Ce n’est pas forcément intuitif ou évident pour chacun de créer un document qui puisse être ouvert à tout le monde. Il faut donc réussir à rassurer pour que la transformation de nos organisations soit positive.

Autre exemple : celui de la data. Une collectivité, par son activité et ses compétences, produit énormément de données. Les données peuvent arriver avec des objets connectés voire de l’intelligence artificielle, mais une part importante tient de la saisie manuelle régulière. Nous devons travailler avec les agents pour les convaincre de les renseigner de manière régulière pour fiabiliser nos données, et donner du sens à cela. In fine, ce sont grâce à ces données bien renseignées et facilement renseignables, puis analysées et croisées que nous pouvons automatiser certaines tâches d’un process et supprimer celles qui sont « sans valeur ». Tout le monde y gagnera !

Mais la crainte d’un outil, sa mauvaise compréhension, ou sa mauvaise ergonomie peut faire perdre du temps. Pour dépasser ces freins, nous essayons de miser sur l’humain. Et puis, il faut miser sur un management basé sur la confiance. Souvent, lorsque l’on évoque la question de l’inclusion numérique, on se projette tout de suite vers les habitants ou les usagers mais je crois qu’il est essentiel en parallèle de ne pas oublier l’interne… À l’Eurométropole ou à la ville, nos DGS sont très vigilants sur ce point et je crois qu’ils ont raison.

4 – L’expérience utilisateur dans les services publics

Il faut toujours se rappeler que le service public se doit d’être universel. Pour autant, par la diversité des publics, certaines choses vont mieux fonctionner avec certains plutôt que d’autres. Il faut donc envisager d’autres ressorts pour les toucher et leur donner envie. Le design thinking est là pour se mettre dans la peau de l’utilisateur. Il faut penser avec lui en reprenant, ses caractéristiques, son histoire, son âge, son vécu, ses habitudes, ses capacités et ses attentes. Nous devons imaginer comment notre service va être appréhendé. C’est encore trop peu considéré.

C’est aussi une des forces des laboratoires d’innovation, de faire entrer la notion d’expérience utilisateur dans la conception des services. C’est essentiel. Si on sort du service public, énormément d’interfaces de notre quotidien sont pensées « utilisateur ». Si la collectivité ne fait pas de même, elle sera en décalage par rapport à notre monde. Aujourd’hui, c’est parfois plus simple d’acheter des produits inconnus à l’autre bout de la planète qu’avoir un service de proximité. C’est plus simple, car derrière il y a eu de l’expérience utilisateur, du design, des sociologues, un travail autour des biais cognitifs. Le service est presque immédiat. La puissance publique doit se mettre au niveau pour éviter un écart trop important avec le privé. Depuis plus de dix ans maintenant La 27Région, ainsi que la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) œuvrent pour promouvoir cette manière de voir les choses : cela bouge ! Il y a eu, par exemple, « Mes démarches simplifiées » ou encore « Mes-aides » 2 sur la plateforme beta.gouv.fr. Mais au niveau des collectivités, il nous faut accompagner cela massivement. Nous devons rendre les services plus simples. Tout doit paraître naturel et intuitif. Pour moi, les collectivités doivent se doter de nouvelles compétences en recrutant ou en formant leurs équipes.

Il ne faut pas partir du principe que, parce que le service public est un passage obligé dans certains domaines, il n’y aurait pas besoin d’aller plus loin en donnant envie d’utiliser un service, qu’il n’y aurait pas besoin d’inciter. Si j’exagère la chose, nous devons faire en sorte que notre public passe un bon moment en utilisant tel ou tel service ! Même s’il est vrai que quand on travaille dans le domaine public, il y a une évolution permanente des normes et des contraintes, auxquelles il faut s’adapter, tout en se protégeant du risque de recours.

Celles et ceux qui travaillent sur cette notion d’expérience utilisateur, ce sont les designers. Elles et ils jouent un rôle important. Ma collègue designer évoque souvent le terme d’« affordance3 des choses ». Prenons le cas basique d’un fascicule ou d’une brochure d’explication d’un service : comment faire en sorte qu’il soit facilement pris en main et compris ? Pour que, dès qu’on l’ouvre, on comprenne tout de suite de quoi il s’agit voire que l’on stimule l’envie de ce service. Ce n’est pas qu’un travail graphique. Il y a un travail de conception, sur le message le plus important à faire passer, sur le format ou l’utilisation d’une écriture plus positive… Là aussi les travaux de l’État vont dans le bon sens, pour encourager, notamment, une écriture beaucoup plus simple, plus inclusive et ne pas être dans un vocabulaire trop technocratique. Comme tous ces travaux sont bien documentés, on trouve facilement des guides ou des préconisations sur ces questions, mais il faut désormais que cela irrigue et infuse un maximum d’administration sur les territoires.

L’exemple, ancien maintenant, mais souvent cité, lorsque l’on parle d’expérience utilisateur, c’est la conception du système Vélib. Le schéma de pensée de l’utilisateur a été finement observé. Comment réserver son vélo, appréhender les stations, l’utiliser, puis le laisser n’importe où ? C’est très concret. On parle ainsi du parcours utilisateur. Mais pour y arriver, cela demande des compétences. Il est possible pour les collectivités de les avoir en interne ou de faire appel à de la prestation externe. Mais il y a un invariant : il faut s’autoriser le droit à l’expérimentation ainsi qu’à l’erreur. Si on ne tente rien, on n’avance pas ! Je crois qu’il est nécessaire de se laisser la possibilité de livrer une solution non aboutie puis de la faire évoluer. Pour gagner du temps, ce que nous essayons de pousser c’est le temps d’expérimentation. Il faut se rendre en capacité de très vite tester une solution, pour observer comment le public va s’y projeter. Par exemple, avec une maquette ou un prototype. Lors de la crise du covid-19, certains territoires se sont lancés dans l’urbanisme tactique avec des « coronapistes » ou de l’occupation temporaire. Il y a eu une grande accélération de phase de test stimulée par la contrainte. Pour cela, c’est important de pouvoir dire que ce n’est pas un projet immuable, qui ne bougera plus. C’est aussi ça, les différents temps de l’innovation publique. Le temps long puis une accélération avec des phases de test et de correction. Mais encore faut-il pouvoir bénéficier du « temps de cerveau disponible » de la part de nos collègues. Car bien souvent, chacun travaille dans l’urgence, pas de manière volontaire évidemment mais souvent du fait de contraintes externes. C’est là où un laboratoire d’innovation a du sens. On peut lui confier un projet et se dire que lui, il nous obligera à prendre ce temps.

5 – Les nouveaux métiers de la fonction publique

Aujourd’hui, nous avons une fonction publique dans laquelle il va falloir faire entrer des métiers qui n’entrent pas dans les cases habituelles des statuts et des fiches de postes. Des designers, des facilitateurs, des AMO numériques intégrés, des personnes chargées des relations publiques, du marketing, des vidéastes, etc. Dans mon poste aujourd’hui, je gère le laboratoire d’innovation et je pilote l’activité mécénat de la collectivité. J’ai recruté ce type de profils. On m’a souvent demandé pourquoi. Mais obtenir du mécénat demande d’avoir des projets marketés sur leur valeur, leurs objectifs ou leurs impacts, puis mis en résonance par rapport à ce que cherchent les entreprises. Il faut aussi de vraies compétences en matière de relations publiques pour entretenir un réseau et nouer des partenariats solides. De la même manière, sur le numérique, il y a des besoins très variés. Un community manager doit savoir gérer les réseaux sociaux mais aussi créer des contenus vidéos de manière rapide ou écrire des post à la volée. Un chef de projet numérique doit être en capacité à la fois de requestionner le besoin en misant sur l’intelligence collective, tout en ayant de bonnes bases en matière de développement et de gestion de projets.

Il y a également tous les métiers qui tournent autour de l’analyse des données ou de la data visualisation. Au-delà des métiers, il y a des compétences qu’il va falloir faire entrer dans les organisations publiques. Après, on peut aussi se poser la question du recours à des prestations externes versus internalisation. À quel moment cela devient intéressant d’internaliser la compétence, car le besoin est devenu systémique ou très récurrent ! Ce que je crois aujourd’hui, c’est que ce type de compétences, cette aisance du numérique, du réseau, du collaboratif est présente sur le marché de l’emploi, notamment chez les jeunes, mais la vraie question est celle de l’attrait de la fonction publique pour pouvoir les développer. Si je peux me permettre un parallèle, lorsque j’étais étudiant, nous étions quelques-uns à opter pour les premières formations supérieures dans les métiers de l’environnement. On allait vers ces filières, avec bien souvent pour objectif de passer des concours nous permettant de nous engager ensuite dans les collectivités ou dans les agences de l’État et agir concrètement. Aujourd’hui, les jeunes diplômés qui veulent s’engager sur la transition écologique ont beaucoup plus d’ouverture : ils peuvent se tourner vers les structures de l’économie sociale et solidaire, sur des structures associatives, des ONG, dans des fondations, des entreprises autant d’organisations où l’action est synonyme d’innovation. Alors si nous ne renvoyons pas une image de collectif qui innove, qui ose, qui teste, qui avance, qui fonctionne en réseau et de manière ouverte, ce potentiel de ressources humaines nous échappera.

  1. https://www.modernisation.gouv.fr/publications/les-laboratoires-dinnovation-publique-bilan-et-referentiel-devaluation
  2. https://beta.gouv.fr/startups/mes-aides.html
  3. L’affordance est la capacité d’un objet ou d’un système à évoquer son utilisation, sa fonction.
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