Revue

Dossier

Les influenceuses et expérimentatrices des comptabilités écologiques

Le 20 mai 2022

Nicole Alix, présidente de la Coop des communs, pilote des chantiers de transformation des organisations, dont « CARE et communs », depuis près de deux ans. Véronique Blum, enseignante-chercheuse au laboratoire du centre d’études et de recherches appliquées à la gestion (CERAG) de Grenoble encadre, à partir de cette année, avec le dispositif de la convention industrielle de formation par la recherche (CIFRE), une thèse d’implémentation du comprehensive accounting in respect of ecology (CARE)1 dans une organisation municipale. Marie Le Texier, experte-comptable, a décidé d’abandonner les anciens paradigmes des grandes entreprises pour lesquelles elle travaillait pour se mettre au service d’entreprises vertueuses souhaitant mesurer différemment. Entretien croisé.

Pourquoi vous être engagées (vous et votre organisation) vers les nouvelles comptabilités ?

Véronique Blum – Professeur de finance d’entreprise et de comptabilité d’entreprise, j’ai élargi mon champ de compétences et mes domaines de prédilection aux ressources naturelles dans le cadre de ma thèse de doctorat. En effet, quand on s’intéresse à la comptabilité des ressources naturelles, on comprend qu’il est impossible de traiter les ressources à huis clos, c’est-à-dire dans le cadre restreint de l’organisation et en supposant un approvisionnement constant. Or, le défaut des formations et des théories standard en gestion est justement de considérer l’organisation à huis clos comme si elle était isolée de l’extérieur et sans lien avec lui. Les seuls éléments externes examinés sont ceux qui apportent des fonds, les autres entités non commerciales sont ignorées.

Nicole Alix – Je pense qu’il faut en finir avec « l’externalisation des externalités » (positives ou négatives). La comptabilité telle que conçue aujourd’hui ne tient pas compte des externalités. Deuxième raison : il est nécessaire aujourd’hui de prendre en compte les communs dans la façon de compter. La comptabilité dite « CARE » modifie le calcul du résultat d’exploitation et traduit dans ce résultat même ce que l’entreprise fait de « bien » ou de « mal ».

Marie Le Texier – Après vingt ans en finance d’entreprise et comptabilité, je percevais de plus en plus la dissonance entre les résultats toujours en croissance, toujours positifs des entreprises que j’accompagnais et l’état de la planète qui se dégradait. Je sentais mon impuissance en tant que financière devant la tragédie des horizons… et je n’étais absolument pas convaincue par la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), les mesures d’impact, etc., qui me semblaient trop « manipulables ». La lecture du livre de Jacques Richard, Comptabilité et développement durable2 a été une révélation : il me permettait de prendre du recul sur la technique financière et de remettre en cause la neutralité du paradigme dans lequel nous baignons tous, mais encore plus nous, les techniciens de la comptabilité et de la finance, quel que soit le niveau auquel nous travaillons.

Après vingt ans en finance d’entreprise et comptabilité, je percevais de plus en plus la dissonance entre les résultats toujours en croissance, toujours positifs des entreprises que j’accompagnais et l’état de la planète qui se dégradait. Je sentais mon impuissance en tant que financière devant la tragédie des horizons…

Quels sont les défis que pose cette démarche ? À titre individuel auprès de vos homologues, des partenaires, des financeurs, etc. ?

Véronique Blum – Cette démarche pose d’abord des défis conceptuels : CARE fait partie d’un ensemble de réflexions relativement modernes qui reconnaît que l’organisation est ouverte sur son environnement et qui tient compte de la complexité. Premier défi : nous devons opérer des changements d’échelle : comment, par exemple, décliner le défi du changement climatique à l’échelle organisationnelle ? Par quelle traduction ? Deuxième défi conceptuel : la conviction que tout ne peut pas être mesuré ou monétisé par des indicateurs. Ces défis plus complexes bouleversent les paradigmes imposés par les économistes de la théorie dominante selon laquelle la complexité n’est pas intégrée. Ils emploient des indicateurs qui convergent vers la mesure monétaire, la rentabilité et la réduction de l’incertitude. Or, il faut apprendre à « faire avec les incertitudes ».

Quand on passe au CARE, on reconnaît les relations multiples avec les partenaires et l’environnement externe. Comment décrire les risques que l’on a parfois nous-mêmes créés et comment va-t-on les gérer à différents niveaux d’échelle ? On n’imagine jamais la fin des ressources dans la comptabilité moderne, il devient urgent d’y intégrer, par exemple, les limites planétaires ! C’est bien sûr plus simple de les éluder. Pour parvenir à ce double changement d’échelle et de paradigme, un écosystème de chercheurs et de personnes sensibles (secteur de la normalisation, institutions y compris territoriales, nouvelles générations plus sensibles à ce thème que les générations qui nous précèdent dans les laboratoires de recherche, etc.) émerge et élabore de nouvelles hypothèses. La chaire Comptabilité écologique, dirigée par Alexandre Rambaud et Harold Levrel, accueille une jeune génération très active. Sur ce chantier de la comptabilité écologique, c’est la méthode des petits pas, chacun façonne sa brique.

Nicole Alix – Les défis sont énormes. Premièrement, la notion de capital n’est pas comprise de la même façon par les économistes (pour lesquels il est un moyen, voire une ressource ou un actif, comme l’écrit Jacques Richard) et les comptables (pour lesquels il est une dette, un passif). Le terme de « capital » n’est pas donc bien compris et il y a des confusions entre « capital » et « valeur ». Selon les disciplines académiques, y compris parmi les personnes tournées vers la transition écologique, des gens ne se comprennent pas forcément, il y a un besoin de clarification.

Deuxième registre : la comptabilité n’est pas sexy. Un exemple : je suis intervenue dans le master Sciences de gestion à l’université Paris Dauphine et je me suis aperçue que les étudiants n’ont jamais fait de comptabilité. Il y a un réel besoin de formation et de remise à niveau en matière de comptabilité générale et analytique. Il y a encore du flou autour de ces questions-là. Troisième défi : la mesure des externalités est un marché. Peu importe l’état des inégalités et/ou de la transition, les cabinets d’audit et d’expert-comptable se portent bien, en font commerce, et peu importe la couleur des pouvoirs politiques, il y a toujours des offres et des concurrences autour de ce marché de la mesure. Quatrième défi : les dispositifs financiers essentiels sont toujours fondés sur le système comptable actuel : les bases de données des fonds d’investissement n’ont pas recours à ces histoires du CARE, sans parler des impôts ; le système est verrouillé. Et dernière (énorme) difficulté pour la mise en œuvre de cette nouvelle approche, son coût. Il faut avoir de l’argent pour faire ça, la plupart des organisations qui militent pour CARE en sont dépourvues. La vraie question pour accélérer, c’est où trouver l’argent ? Les chercheurs sont là, mais ils ne peuvent pas travailler de manière isolée. Quand ils avancent, ils ont besoin d’être en contact avec des personnes du terrain qui pilotent les organisations. Par exemple, il y a encore une boîte noire à explorer sur le capital humain.

Marie Le Texier – Le plus grand défi, selon moi, est de résister à la mode des « méthodes » qui fleurissent actuellement en verdissant les bilans. L’approche du CARE est bien plus qu’une méthode, mais une volonté de repenser le cadre conceptuel (framework) dans lequel on va mesurer la performance de l’entreprise. Sa solvabilité écologique autant qu’économique et pour cela on doit traduire dans les états le besoin de régénération des ressources naturelles et humaines que l’on utilise. Le second défi est de clarifier les enjeux qui se cachent derrière les « méthodes ». Dans le domaine des comptabilités écologiques, on trouve beaucoup de « méthodes » peu robustes et qui ne permettront pas de changer véritablement les choses au niveau écologique : durabilité faible, volonté de communiquer sur les « bonnes actions » même si elles sont ridiculement négligeables par rapport aux enjeux, l’actualisation qui minimise aujourd’hui les impacts gigantesques a venir, donner un prix à la nature, la double matérialité, etc. Perdre notre temps en défendant des méthodes qui ne permettent pas de changer de paradigme vu la situation écologique me semble déplorable.

Ces défis plus complexes bouleversent les paradigmes imposés par les économistes de la théorie dominante selon laquelle la complexité n’est pas intégrée. Ils emploient des indicateurs qui convergent vers la mesure monétaire, la rentabilité et la réduction de l’incertitude. Or, il faut apprendre à « faire avec les incertitudes ».

Que, ou qui, manque-t-il autour de la table pour accélérer sur ce sujet et répondre aux défis écologiques et sociaux ?

Véronique Blum – Je suis d’accord avec Nicole Alix, ce qui manque ce sont des financements et des terrains d’expérimentation pour construire progressivement nos briques et afin d’éviter de répéter les erreurs du passé. Il faut se confronter à la réalité de la complexité et expérimenter des solutions sur le terrain. J’ai commencé ma carrière comme consultante en contrôle interne, c’est-à-dire de la gestion des risques, il y a trente ans : sur ce terrain, par exemple, rien ne semble avoir changé, les grands cabinets d’audit continuent à appliquer les mêmes méthodes, et emploient les mêmes indicateurs de performance à toutes les entreprises de tous les secteurs, sans réellement prendre en compte le capital naturel et le capital humain et les spécificités des activités (y compris la longueur des cycles de restauration/préservation).

Nicole Alix – Un autre enjeu aujourd’hui est d’élaborer des plans d’action plus largement partagés pour avancer sur cette question de la prise en compte de l’environnement dans l’approche comptable. Ce serait vraiment intéressant d’avoir une alliance ou un débat entre des économistes préoccupés par la transition écologique et solidaire et les militants de ces nouveaux systèmes comptables. La nouvelle génération est peut-être la mieux placée pour amorcer ce débat nécessaire.

Marie Le Texier – Il manque la volonté réelle de remettre en cause la vision néolibérale du capitalisme et notre façon de comptabiliser en conséquence. Remettre en cause ce qui semble neutre, les méthodes comptables en juste valeur, les International accounting standards (IAS) copie-conforme des International financial reporting standards (IFRS) que nous nous sommes laissé imposer en Europe par nos partenaires anglo-saxons (par un groupe aux intérêts privés de surcroît). Revenir à une comptabilité classique en coûts historiques déjà, où l’intérêt des actionnaires individuels ne prime pas sur l’intérêt général. Ce qui est en jeu ce n’est pas moins que cela…

Véronique Blum – On compte vraiment sur la jeunesse d’aujourd’hui, car elle a grandi dans un monde que nous avons peu connu. Parce que nous sommes tous sujets à des ancrages cognitifs forts, il est difficile pour les générations plus anciennes de changer leur vision du monde. Il y a des phénomènes nouveaux. La question du portage politique est aussi essentielle pour faire évoluer les pratiques comptables.

Quelles sont les spécificités de ces comptabilités écologiques, dites « intégrées » ou « multi-capitaux » ?

Véronique Blum – La concertation et la dimension délibérative font notamment partie des spécificités de cette approche. Nous sommes dans des schémas comptables dans lesquels il est primordial d’associer et d’impliquer les parties prenantes de l’organisation par le dialogue, qui sera propre à chaque institution. Il ne s’agit pas de reproduire une implémentation à l’identique dans chaque organisation. La sémantique est aussi un point d’attention, comme l’a précisé Nicole. Pour faire face aux glissements sémantiques ayant déjà eu lieu, il convient de préciser le lexique, d’y introduire des subtilités. Le lexique anglo-saxon tend à employer un même terme pour évoquer plusieurs idées, il y a un vrai travail de terminologie pour décrire de quoi on parle. Par exemple, la comptabilité écologique n’est pas synonyme de mesure des transactions comme dans la définition anglo-saxonne le laisse entendre, mais elle propose une représentation des relations de l’organisation avec le monde dans lequel elle évolue. Le terme « écologie » est lui-même mal compris. Au sens premier, il désigne une science dont l’objet est l’étude des interactions des êtres vivants avec leur environnement et entre eux au sein de cet environnement. Dans cette vision, l’entreprise, les échanges et la comptabilité sont des construits sociaux producteurs de structure facilitant ses relations.

Ces outils de gestion ne sont pas neutres, ils véhiculent une vision du monde. C’est un prérequis à bien avoir en tête avant de débattre. Il faut apprendre à discuter des chiffres : qu’est-ce qui se cache derrière les chiffres ? Quelles sont les conventions derrière les chiffres ? On en revient ainsi à cette question de l’appropriationet de l’éducation populaire autour de ces outils comptables.

Nicole Alix – Un autre point important, c’est l’enseignement, l’éducation, le travail d’acculturation : les nouvelles générations ont besoin de cet éclairage dans leur formation initiale. Véronique a bien mis l’accent sur la nécessité d’avoir des clés pour relier les deux : l’outil technique et la vision du monde que l’on veut servir. Il est indispensable de transmettre et d’apprendre le sens critique, de prendre du recul, d’apprendre à « monter en généralité ». Ce sont des éléments importants dans l’enseignement, et la comptabilité n’y échappe pas. Il faut apprendre aux plus jeunes ce que signifie l’emploi de méthodes comme la mesure d’impact social, le calcul des externalités, etc. Sur la question de la délibération, il faut avoir des outils pour réfléchir, et les outils comptables en font partie. J’ajoute que ces outils de gestion ne sont pas neutres, ils véhiculent une vision du monde. C’est un prérequis à bien avoir en tête avant de débattre. Il faut apprendre à discuter des chiffres : qu’est-ce qui se cache derrière les chiffres ? Quelles sont les conventions derrière les chiffres ? On en revient ainsi à cette question de l’appropriation et de l’éducation populaire autour de ces outils comptables.

Il manque la volonté réelle de remettre en cause la vision néolibérale du capitalisme et notre façon de comptabiliser en conséquence. Remettre en cause ce qui semble neutre, les méthodes comptables en juste valeur, les International accounting standards (IAS) copie-conforme des International financial reporting standards (IFRS).

Véronique Blum – L’instrument comptable existe depuis que l’humain s’est sédentarisé, c’est-à-dire il y a environ dix mille ans. Elle repose sur les plus anciens instruments de l’humanité, destinés à compter pour mieux vivre ensemble et datant de plus de soixante-dix mille ans. Voici l’histoire de la comptabilité à garder en mémoire : la comptabilité a été inventée pour vivre plus intelligemment et permettre notre « convivance » 3. Mais très vite, ces outils sont devenus spéculatifs et ont été dévoyés pour devenir vulnérables. Il faut revenir sur la raison d’être de l’approche comptable.

Marie Le Texier – Je ne parlerai que du CARE, car c’est la seule approche qui, personnellement et après étude, me semble vraiment pertinente et aussi la seule assez ambitieuse face à la situation tragique dans laquelle nous sommes. Le modèle CARE-TDL reprend les bases de la comptabilité classique en coûts historiques en intégrant les enjeux sociaux et environnementaux. Cette approche ne tombe pas dans l’évaluation erronée de services rendus par la nature (donner un prix à la nature), elle quantifie au contraire les coûts de conservations, régénération, aggradation nécessaire au bon état écologique défini de façon scientifique.

Cette approche ne se limite pas aux impacts positifs et négatifs que l’environnement (et notamment le changement climatique) font peser sur l’entreprise (vision dite « extérieure-intérieure »), mais prend bien en compte les impacts de l’entreprise sur l’environnement (vision dite « intérieur-extérieur »). C’est la double matérialité qui est essentielle pour une méthodologie robuste.

Le pivot de la méthodologie est l’élargissement de la notion capital aux entités naturelles à préserver avec comme prérequis de s’obliger à la préservation de ces entités sans substitution possible des différents capitaux (on parle de soutenabilité forte).

Quels sont les terrains d’expérimentation de la méthodologie CARE ?

Nicolas Alix – Dans notre groupe de travail « CARE et communs », nous suivons plusieurs expérimentations qui mobilisent chercheurs et praticiens et nous les mettons en interaction : une expérimentation sur les territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD) à Actypoles Thiers dans laquelle le CARE est confrontée à la réalité ; l’approfondissement de travaux dans des coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA). Ces sociétés ont pour objet l’utilisation en commun par des agriculteurs de tous moyens propres à faciliter ou à développer leur activité économique, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité. Le cabinet Audies et la ville de Grenoble participe à notre groupe de recherche-action. Il y a aussi des organisations type tiers-lieux intéressés par CARE.

Véronique Blum – Il y aussi des viticulteurs intéressés par l’application CARE, toujours en lien avec les ressources naturelles. Ces entreprises cultivent les mêmes sols depuis plusieurs siècles sans jamais les avoir épuisés. La chaire Comptabilité écologique recense toutes ces nouvelles expérimentations.

Marie Le Texier – Dans le cabinet de mon partenaire, Audies à Toulouse, le terrain d’expérimentation est l’émission des gaz à effet de serre (GES). Comment intégrer la dette carbone réelle, pas par le biais erroné de la compensation (évidemment) dans les bilans de plusieurs entreprises du cabinet. Ce travail est mené dans le cadre d’une thèse CIFRE supervisée par Alexandre Rambaud. Ce travail de recherche reçoit un écho très favorable des clients qui sont déjà, pour la grande majorité, très engagés dans la mutation écologique.

La France a toujours joué un rôle important en matière de normes comptables. Alors que les inégalités explosent et que les conflits liés au climat pourraient s’exacerber, la comptabilité doit se mettre au service du vivre ensemble. Pour l’instant, nous en sommes encore loin, mais ce modèle du CARE est une piste d’action possible. Les collectivités locales doivent se saisir de cette approche.

Nous aimerions aussi mener des expérimentations plus larges avec l’ensemble du cadre conceptuel du CARE, notamment sur une fabrique de territoire du pays de Dol-de-Bretagne, avec la société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) Le Ruisseau, dans lequel je serai directement impliquée. Nous sommes un petit cabinet d’expertise et nos clients sont déjà largement sensibilisés aux enjeux à venir, mais c’est notre façon de « faire notre part ».

Face à l’urgence écologique, pensez-vous que cette approche va passer de l’expérimentation à la pratique courante ?

Véronique Blum – La comptabilité écologique a une force pour s’imposer, ses concepts sont très pertinents, très forts et très bien articulés avec la comptabilité d’entreprise existante. Je rejoins l’engouement pour la révolution comptable de Jacques Richard et Alexandre Rambaud4. L’initiative de penser au-delà du modèle économique standard est une idée européenne. C’est peut-être nous qui avançons le plus vite en lançant la nécessité d’une communication extra-financière.

Nicolas Alix – La France a toujours joué un rôle important en matière de normes comptables. Alors que les inégalités explosent et que les conflits liés au climat pourraient s’exacerber, la comptabilité doit se mettre au service du vivre ensemble. Pour l’instant, nous en sommes encore loin, mais ce modèle du CARE est une piste d’action possible. Les collectivités locales doivent se saisir de cette approche.

Véronique Blum – C’est une approche vertueuse pour réduire les inégalités, allouer des ressources qui se raréfient ou encore améliorer le vivre ensemble, et maintenir les processus créatifs et innovants.

Marie Le Texier – Il est difficile d’imaginer quand la bascule aura lieu et si elle se fera avant qu’il ne soit trop tard ou nous allons continuer la politique des petits pas alors que l’urgence climatique devrait être notre priorité à tous. L’apparition des comptabilités en coûts historiques date de la fin du xixe siècle, les prémices théoriques de la juste valeur du début xxe, changer de cadre conceptuel, changer de paradigme est complexe et prend du temps, mais c’est aussi une opportunité incroyable de créer une façon de penser plus inclusive du vivant et des enjeux sociaux. La tâche est immense et complexe certes, mais j’espère vraiment que nous, professionnels du chiffre, nous allons nous inscrire dans cette dynamique et soutenir par de multiples expérimentations ce travail de recherche remarquable d’Alexandre Rambaud, de Jacques Richard et la chaire Comptabilité écologique pour nous l’approprier et la diffuser.

Pour aller plus loin :

À lire en complément sur horizonspublics.fr : Guichardaz P., « La comptabilité CARE-TDL au service de l’agroécologie ».

  1. Pouvant être traduit en français par « comptabilité globale respectant les principes de l’écologie ».
  2. Richard J., Comptabilité et développement durable, 2012, Economica, Gestion.
  3. « Capacité de groupes humains différents à cohabiter harmonieusement au sein d’une entité locale, nationale, fédérale, communautaire » (Larousse, 2022).
  4. Richard J. et Rambaud A., Révolution comptable. Pour une entreprise écologique et sociale, 2020, Éditions de l’atelier, Sciences humaines.
×

A lire aussi