L’Isère met à disposition une «salle sur demande»

Le 31 octobre 2023

Avec son nom tout droit issu d’un concept créé dans l’imaginaire d’Harry Potter, la « salle sur demande » permet aux associations du territoire de bénéficier de salles dans les collèges. Une innovation publique simple mais très utile, lancée par le département de l’Isère.

Son idée ? Offrir aux associations locales de nouveaux lieux pour leurs activités. Les agents ont travaillé avec la centaine de collèges du territoire pour proposer un accès aux salles quand elles sont inoccupées. Le dispositif propose une formule où chaque acteur est gagnant : les collèges reçoivent le montant versé par l’association pour la location et peuvent développer des projets avec les occupants. Cette initiative a reçu le soutien de l’Agence nationale pour la cohésion des territoires (ANCT) pour être dupliquée. Elle a également été récompensée par un prix Territoria en 2022. Entretien croisé de Séverine Battin, directrice générale des services, et Delphine Bouillon-Marillier, cheffe de projet au département de l’Isère.

De quel constat êtes-vous partis pour lancer ce projet ?

Séverine Battin (S. B.) – En Isère, nous comptons 97 collèges et nous avons un programme d’investissement de l’ordre de 500 millions d’euros. Le constat est donc tout simple : en soirée ou lors des vacances scolaires, beaucoup de salles de collèges sont très peu utilisées. L’idée était donc de mutualiser les usages de ces salles. Nous avions aussi un bon nombre d’associations du domaine socio-culturel qui ne trouvaient pas de salle pour proposer leur activité aux Isérois. Sachant que les 97 collèges sont répartis sur tout le département, on en trouve également en milieu rural, là où il n’y a pas toujours de salles mises à disposition des associations.

Comment l’idée s’est-elle construite ?

S. B. – Dans un premier temps, l’utilisation des collèges demande un partenariat solide avec l’Éducation nationale. Même si nous sommes propriétaires des murs, l’Éducation nationale assure le fonctionnement au sein des collèges. Il était de bon ton de pouvoir travailler avec les principaux de collèges et les gestionnaires en ayant des solutions de facilité. La mixité d’usages ne devait en aucun cas leur poser problème, ni en termes de charge administrative supplémentaire ni en termes de sécurité. Nous avons donc réfléchi à un référentiel avec des salles qui auraient une capacité d’autonomie et d’indépendance, par exemple, avec une entrée et des sanitaires séparés du reste du collège. Nous avons adopté une démarche incitative. Il n’était pas question d’imposer ce dispositif aux principaux de collège, mais de leur proposer une formule attractive. Nous cherchions vraiment de l’adhésion.

Quel type de salle est-il possible de réserver ? Et à quel prix ?

Delphine Bouillon-Marillier (D. B.-M.) – Cela regroupe des salles polyvalentes, de réunions, de pratiques culturelles, des gymnases ou des auditoriums. Un internat ouvre son établissement pendant les vacances d’été et accueille, par exemple, un festival de street art. Pour une utilisation basique, le tarif gravite en moyenne autour de quelques dizaines d’euros par heure. En parallèle, nous étudions la mise à disposition des maisons de territoire du département sur la plateforme. Cela aurait été un point de départ bien plus simple, puisque pour les collèges nous devons traiter avec deux autres interlocuteurs que sont l’Éducation nationale et les principaux.

Qui peut bénéficier du service de réservation d’une salle ?

D. B.-M. – Ce champ-là est fixé par le Code de l’éducation. Il englobe toutes les associations culturelles, sportives et d’éducation populaire ainsi que les organismes de formation. En revanche, les entreprises ne peuvent pas bénéficier de ce service. Le but premier est de permettre à des associations locales de disposer de salles pour mettre en place leurs activités à intervalle régulier. On se rend compte que cela constitue le meilleur rapport entre le travail et les recettes perçues. C’est avec la répétition que la confiance s’installe et que des projets pédagogiques communs peuvent naître entre les associations et les collèges.

Lorsqu’un usager réserve une salle, il doit signer une convention d’occupation. À quelles règles cette convention le soumet-elle ?

D. B.-M. – Quand le principal du collège accepte une demande de réservation de salle, une convention type d’occupation précaire et temporaire du domaine public est générée. L’usager s’engage à avoir pris connaissance des consignes de sécurité incendie, à n’occuper les locaux que pour l’activité déclarée et sur les créneaux réservés, à restituer le lieu dans l’état de base. C’est un simple rappel des obligations de chacun.

Les salles étant inoccupées à la base, pourquoi faire payer le service ?

D. B.-M. – C’est un véritable levier de motivation pour les collèges. Sachant qu’ils ne sont pas obligés de mettre les salles à disposition, cela relève d’un partenariat solide entre les différentes institutions. Il faut également prendre en compte les charges de fonctionnement hivernales avec le chauffage, l’éclairage. Cela occasionne des coûts supplémentaires pour les collèges qui doivent être compensés par cette cotisation. En fin de compte, cela fait partie de la reconnaissance du travail des établissements scolaires.

S. B. – D’un point de vue personnel, j’ajouterais que ce qui est gratuit n’a pas de valeur. Il est plutôt question d’une contribution symbolique afin de se dire qu’on loue une salle à laquelle on accordera le mérite et le respect escompté. Cela induit aussi une valeur d’engagement : si c’était totalement gratuit, des usagers pourraient louer sans venir, ou réserver un créneau régulier sans l’honorer à chaque fois. Ce serait la porte ouverte à certaines dérives.

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