Le manager public à l’épreuve

Le manager public à l'épreuve
Selon Thierry Le Goff, directeur général de la DGAFP, la nouvelle culture managériale doit s’appuyer sur deux leviers majeurs : l’évolution des normes et la co-construction de la politique RH avec les agents publics.
©Compte Twitter officiel @DGAFP (Direction générale de l'administration et de la fonction publique, DRH de l'État)
Le 15 octobre 2020

L’École du management et des ressources humaines (EMRH, un réseau interministériel de professionnels des ressources humaines et de la formation, créé en 2007 sous le nom de « l’École de la GRH »),  organisait en juin 2020 un webinaire consacré au manager public face à l’épreuve « Nouveaux défis et nouvelles compétences ». Au-delà des enjeux d’équipement informatique et numérique, la crise provoquée par cette pandémie interroge la capacité des organisations à développer de nouvelles postures managériales.

Cette situation inédite a donné l’occasion de dresser un bilan et de mener une réflexion prospective sur les failles, les difficultés mais aussi de mettre en lumière l’adaptation immédiate des agents pour garantir la continuité du service public. C’était en substance le message introductif du webinaire adressé par Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, chargé des Comptes publics à l’Assemblée. Il a souligné ensuite l’importance de trois compétences clés particulièrement importantes pendant cette période : la coordination ministérielle très dense, nourrie par des échanges réguliers ; la responsabilisation des acteurs de terrain, engagée avec la réforme de la fonction publique ; la nécessité d’avoir des profils divers dans le respect du cadre républicain.

Après le discours d’ouverture s’est déroulée une table-ronde sur l’impact de la crise actuelle sur les méthodes managériales. Nadi Bou Hanna, directeur interministériel du numérique (DINUM), a partagé les enseignements d’une enquête menée auprès de plus de 1 000 managers. Cette enquête relève que 60 % de l’encadrement supérieur considérait, pendant la période du confinement, avoir les moyens de mobiliser ses équipes à distance ce qui a permis de maintenir une forme de continuité du service public. En revanche seuls 24 % d’entre eux se disaient préparés à une culture du télétravail contre 50 % s’estimant insuffisamment préparés et 25 % manquant totalement de préparation. Autre information importante, 34 % des encadrants n’ont pas su identifier si, dans leurs services, des agents se sentaient en rupture.

Le manager public à l'épreuve

Vers une logique moins bureaucratique ?

Thierry Lambert, délégué interministériel à la transformation publique (DITP), a commencé par souligner la formidable énergie déployée par les managers de terrain qui n’ont pas hésité à prendre leurs responsabilités, nourris par l’engagement des agents publics, tout cela dans un monde complexe. C’est une logique moins bureaucratique, plus collaborative, axée sur le terrain et la capacité à mobiliser les citoyens et les entreprises qui a prédominé. D’ailleurs dans la mise en œuvre des solutions de déconfinement, le couple préfet-maire a bien fonctionné. Pendant la période, parmi les nombreuses innovations, Thierry Lambert a souligné l’importance de Covidom1, un outil de télésurveillance des Parisiens réunissant médecins, administratifs et citoyens engagés ainsi que des réseaux créés avec des laboratoires publics aidant les équipes à trouver des solutions sur des sujets très variés : dématérialisation, ressources humaines (RH), solidarité numérique, etc.

Selon Thierry Le Goff, directeur général de la DGAFP, la nouvelle culture managériale doit s’appuyer sur deux leviers majeurs : l’évolution des normes et la co-construction de la politique RH avec les agents publics.

Des bâtiments modulables à l’avenir

Alain Resplandy-Bernard, directeur général à la direction de l’immobilier de l’État, a rappelé, dans son intervention, la place de l’immobilier, deuxième centre de coût après la masse salariale. Selon lui, le défi consiste aujourd’hui à « aplatir » les organigrammes, à faire vivre la transversalité interne et externe, à développer le travail en mode projet. Or, les lieux de travail contribuent à accélérer ces transformations. On sort d’une période avec une conception uniforme du lieu de travail et des journées consacrées à une seule tâche. L’enjeu pour l’immobilier tertiaire consiste à être suffisamment « plastique » pour s’adapter aux nouveaux besoins des travailleurs. La crise n’a fait qu’accentuer l’actualité et la pertinence des questions liées au coût des espaces de travail, à leur empreinte carbone, à l’utilité du lieu collectif et enfin à l’organisation de ces espaces. Toujours est-il qu’elle renforcera des tendances de fond déjà présentes. La demande s’oriente vers des lieux divers en fonction des projets, des moments spécifiques de travail mais aussi de l’âge des collaborateurs. Tout le défi consiste donc à concevoir des bâtiments modulables tout en arrêtant de penser à l’échelle d’un bâtiment. L’État dispose d’un parc immobilier très divers. Parmi les solutions envisagées on peut, par exemple, imaginer de créer des tiers-lieux au sein de directions régionales.

Thierry Le Goff, directeur général de l’administration de la fonction publique (DGAFP) a conclu la table ronde en détaillant cinq points essentiels pour soutenir une nouvelle culture managériale : le développement de la marque employeur de l’État, le soutien à l’innovation RH et managériale, l’accompagnement de la formation initiale et continue, la diffusion d’outils d’accompagnement des managers de proximité, le développement de la prévention en matière de sécurité et de santé au travail. Pour diffuser cette culture Thierry Le Goff a indiqué deux leviers majeurs. D’une part, il faut faire évoluer les normes, changer l’état d’esprit qui y préside et donner davantage de marge de manœuvre aux managers. De l’autre, la politique RH co-construite avec les agents doit entraîner tous les acteurs et donc adopter un rôle de pilote.

  1. Covidom est une solution de télésuivi à domicile pour les patients porteurs ou suspectés covid-19, co-construite par l’AP-HP et nouveau e-santé.
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