Chronique : Is there life on mars ?

Par exemple, quarante ans après la publication du classique de H. G. Wells sur les voyages dans le temps⁴, Albert Einstein et Nathan Rosen modélisaient mathématiquement des raccourcis à travers l’espace-temps (on parle aujourd’hui de « trous de ver »). Plus tard, René Barjavel nous racontait le périple temporel de son voyageur imprudent⁵ et aujourd’hui des scientifiques travaillent sérieusement l’envoi de particules subatomiques dans le passé⁶.

Cet exemple montre bien que, parfois, ce qui relevait de la science-fiction hier s’avère bien réel aujourd’hui. J’ai repéré pour vous quelques illustrations plutôt bluffantes.

Dans une publication américaine⁷ relayée par le médium Korii, on apprend que de nombreuses demandes de brevets ont été déposées par le Pentagone pour protéger des modèles d’armes aux noms futuristes comme « arme de modification de l’espace-temps » ou encore « avion hybride aérospatial sous-marin ». Bon, il faut quand même nuancer ; selon le rapport de Korii toujours, on estime que l’armée dépose des demandes de brevets qu’elle n’espère pas vraiment faire fructifier, afin de brouiller les pistes sur ses recherches scientifiques réelles. Pourtant l’analyse d’autres documents officiels (notamment budgétaires) semble indiquer que des agents travaillent effectivement sur de tels projets. Le mystère reste quasi entier.

Selon plusieurs sources concordantes (selon Wikipédia surtout), en tant qu’activité humaine, la pêche est une pratique qui remonte au moins à 40 000 ans. Aujourd’hui, nous consommons plus de poissons issus de la pisciculture que de la pêche⁸. En général, la pisciculture se fait en étang ou en bord de mer. Rien de bien impressionnant et pourtant, bientôt, une étrange inauguration aura lieu à Singapour : un immeuble à poissons. Haut de huit étages (tout de même !), cette ferme verticale produira (selon le porte-parole de l’entreprise à l’origine du projet)⁹ 3 000 tonnes de mérous, truites et crevettes par an. Plus qu’à espérer que les truites n’ont pas de tendance acrophobe.

On entend souvent parler de l’informatique quantique comme étant la prochaine révolution du monde numérique¹⁰. Alors que je pensais que c’était encore un peu expérimental, que lis-je ? Une start-up chinoise sur le point de commercialiser un ordinateur quantique de bureau pour (seulement) 5 000 dollars¹¹. A priori, on est loin des prototypes expérimentaux d’énormes firmes comme Google ou IBM qui mesurent plusieurs mètres cubes et qui coûtent plusieurs millions de dollars. Mais quel est le secret de cette start-up ? En fait, derrière ce titre accrocheur se cache une subtilité : cet ordinateur quantique n’est qu’un tout petit prototype qui permet surtout d’observer le fonctionnement de l’informatique quantique, à des fins principalement pédagogiques. En l’état, cette machine n’est donc pas capable d’effectuer des tâches aussi impressionnantes que ce qui pourrait être espéré en la matière. Ainsi, contrairement à la révolution 5G qui commence bien à être déployée sur le territoire, l’ordinateur quantique n’est pas tout à fait pour demain.

Ce qui est remarquable c’est que malgré les progrès quotidiens des sciences des technologies de l’information et de la communication (TIC) et le caractère indispensable de l’outil informatique, on continue à apprendre aux enfants à écrire à la main. Il paraît logique de continuer à apprendre l’écriture, mais vous êtes-vous déjà demandé « pourquoi » ? La réponse se trouve peut-être dans une trilogie de courts podcasts intitulée « Apprendre, la révolution des écrans » ¹².

En attendant que vous approfondissiez la question, peut-être peut-on supposer que cet attachement à l’écriture manuscrite fait écho à l’attachement à ce qui fait de nous des hommes. Après tout, l’écriture ne nous distingue-t-elle pas des animaux ? Mais, qu’est-ce qui fait de l’être humain un animal si spécial d’ailleurs ?

Quand je me suis posé cette question, je me suis franchement dit que je trouverai bien facilement une réponse bateau dans n’importe quel mémento de révision du bac philo. Mais en réalité, et ça paraît évident quand on le dit, si autant de philosophes et assimilés ont passé toute leur vie à se poser cette question, c’est peut-être bien parce que la réponse n’est pas si évidente que ça !

Rassurez-vous, je ne vais pas vous faire un cours de philo : ça m’aurait demandé beaucoup trop de révisions et j’aurais surement dit pas mal de bêtises. Pour les plus motivés, je vous laisse vous refaire toute la saga en traversant les siècles de Platon à Midgley en passant par Darwin, Wittgensetin, Hobbes et tous les autres.

Pour les adeptes du raccourci comme moi, je vous invite à partir de la solution proposée par le paléoanthropologue Antoine Balzeau sur le site du musée de l’Homme. À la question « qu’est-ce qui différencie l’animal de l’homme ? », il répond : « Sur le plan physiologique, nous sommes extrêmement proches des autres primates […]. Néanmoins, les performances intellectuelles de l’homme sont différentes et c’est surement là la principale dissemblance entre nous et les autres primates. L’homme est capable de conceptualiser des choses complexes, de se projeter dans l’avenir pour anticiper certains problèmes. Son principal atout : le fait d’utiliser des outils complexes, qu’il sait transformer ou faire évoluer à volonté pour se confronter à tout type de situation. » ¹³

Il y a donc là un peu de sciences, un peu de conscience, un peu d’intelligence. Or, lorsqu’on veut parler de l’état de connaissances scientifiques dans des disciplines bien identifiées, on emploie facilement l’expression « l’état de l’art ». Et si l’être humain se différenciait dès lors à travers son art qu’il soit technique ou esthétique ?

Parfois, l’art peut être les deux : technique et esthétique. En tout cas, à mon sens, seul un cocktail aussi détonant pourrait expliquer la vente incroyable d’une œuvre numérique à 69,3 millions de dollars. Précisément, « l’original de l’œuvre numérique The First 5000 Days de l’artiste crypto Beeple s’est envolé lors de la première vente aux enchères du genre organisée par la célèbre maison Christie’s. Cet original n’existe que sous la forme d’un “NFT” (pour “non fungible token”, en anglais), un objet numérique de collection dont l’authenticité et la rareté – ainsi que la propriété et l’échange de valeur qui y sont liés – sont rendues possibles par la technologie blockchain », nous dit le Figaro¹⁴. Allez jeter un œil à l’article, mais surtout à l’œuvre, c’est plutôt passionnant.

Désormais, l’art peut donc être « crypto », mais même dans sa forme la plus classique, l’art est touché par le numérique.

C’est, par exemple, l’informatique qui a permis à l’Institut du monde arabe de Paris de ressusciter en 3D Mossoul, Alep et Palmyre le temps d’une exposition. Cette initiative témoigne de l’intérêt grandissant pour la sauvegarde numérique du patrimoine en danger. Pour en savoir plus sur le sujet, rendez-vous sur le site de l’Institut du monde arabe¹⁵.

Même lorsqu’il n’a pas besoin d’être reconstitué, l’art existant peut encore être compris et décrypté par les sciences et notamment l’informatique. C’est ainsi que récemment, une analyse infrarouge a permis d’attester que l’artiste Edvard Munch est bien l’auteur original de l’inscription qui peut être lue sur son tableau le plus célèbre (Le Cri, 1893) : « Kan kun være malet af en gal Mand ! » (du norvégien vers le français, comprendre « Ne peut avoir été peint que par un homme fou ! »)¹⁶. On en apprend donc vraiment tous les jours !

Pour apercevoir l’écriture de l’artiste, deux solutions : se rendre à Oslo pour admirer l’original ou espérer que le musée national de Norvège se mette à tirer profit de l’outil numérique pour diffuser sa collection, autre grande tendance, notamment depuis ces longs mois de fermeture des musées (oui, je sais on avait dit qu’on ne parlait pas de crise sanitaire, mais c’est quand même difficile¹⁷).

Mais alors ces deux rapports à l’œuvre sont-ils comparables ? L’art peut-il s’accommoder du virtuel ? Tentative de réponse sur France culture avec Sébastien Allard conservateur général au Louvre et la philosophe de l’esthétique Danièle Cohn¹⁸.

C’est bien beau de parler d’art, qu’il soit technique ou esthétique, mais pour en revenir à la question de notre humanité, on pourra regretter de trop souvent faire le raccourci en disant d’un connaisseur d’art ou d’un grand lettré qu’il est cultivé. Parce que finalement, ça n’est peut-être pas l’art noble, mais bien notre culture qui fait de nous des êtres humains. Et alors que nous avions quelques difficultés à définir l’être humain, bon courage pour définir précisément la culture tant elle est omniprésente.

Et sans rentrer dans le casse-tête d’Inception¹⁹, une partie de la culture consiste à diffuser et expliquer notre culture dans des lieux culturels. C’est peut-être plus clair si on parle de civilisation ? Oh, justement, c’est au Mucem qu’une exposition retrace (déjà) une petite histoire du « premier confinement ». Intitulée « Vivre au temps du confinement » ²⁰, la collection participative recueillie par le musée marseillais nous fait revoir des centaines d’objets qui retracent cet événement qui paraît si proche et qui relève pourtant déjà de l’histoire.

On vient de parler d’histoire, parlons de géographie. Après tout, notre culture, c’est aussi un peu notre lieu de vie, notre habitat, notre terre, et donc nos campagnes. Encore plus précisément, sans se résumer à la terre ou à des coordonnées géographiques, la campagne est maintenant protégée dans sa dimension patrimoniale immatérielle.

En effet, adopté en un temps record, la loi visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises²¹ a été publiée fin janvier 2021. Concrètement, ce texte a inséré dans le Code du patrimoine la reconnaissance et la protection du « patrimoine sensoriel des campagnes ». Il n’est donc plus possible de se prévaloir d’un trouble anormal du voisinage pour se plaindre des bruits et effluves qui font partie intégrante de la vie rurale : chant du coq, tintement des cloches, braiment de l’âne, odeur du fumier ou des poulaillers, coassements d’amphibiens, etc.

Puisqu’on vient de parler de campagne et de confinement, je ne pouvais pas ne pas vous parler d’un article qui m’a beaucoup amusé. Pendant la crise sanitaire, une ferme britannique a décidé de réchauffer le cœur des urbains confinés en leur proposant des appels visio avec des chèvres de leur élevage ! ²² Alors que les exploitants tiraient une partie importante de leurs revenus de la location de locaux pour des événements du type mariage, le succès fulgurant de leurs « goat calls » leur a permis de conserver tous leurs employés.

Essayons de boucler la boucle. On a aussi parlé de la vie sur Mars et de notre culture. La majorité des scientifiques s’accorde à dire qu’un jour notre soleil mourra et que nous disparaîtrons avec lui. Qu’on se rassure, cette fin est estimée pour dans 5 milliards d’années. Mais pour autant, peut-on chercher à savoir ce qu’il restera de nous après tout ça ? En fait, on connaît déjà une partie de la réponse. En tout cas, on sait ce qui a été gravé sur le Voyager golden record embarqué dans les deux sondes spatiales Voyager lancées en 1977.

Je suis retombé dernièrement sur une petite vidéo qui explique ces projets²³. Si vous êtes curieux de savoir ce que les petits hommes verts savent de nous, allez y jeter un œil !

Et vous, qu’enverriez-vous aux extra-terrestres pour leur montrer qui nous sommes ?

1. « Au jaaardin de lumière et d’argeeeeeent », https://www.youtube.com/watch?v=ejNF9kV5fg4
2. Vidéo sur la chaîne YouTube de France culture, « Oumuamua est-il un vaisseau extra-terrestre ? », févr. 2021, https://www.youtube.com/watch?v=Mi6SzAHbHVY
3. Vidéo sur la chaîne YouTube de France Inter, « Avi Loeb : “La nature a une imagination qui dépasse de loin la nôtre” », févr. 2021, https://www.youtube.com/watch?v=gQiBjFRF3F0
4. Wells H. G., The Time Machine, 1895, Heinemann – aujourd’hui en poche et en français : La machine à explorer le temps, 1975, Folio.
5. Barjavel R., Le voyageur imprudent, 1973, Gallimard.
6. Il s’agit notamment de l’objet d’étude du physicien nord-américain Ronald Mallett. Pour aller plus loin, voir la vidéo (en anglais), “Black to the Future : This Scientist May Hold the Key to Time Travel / The Root”, sur la chaîne YouTube TheRoot févr. 2020, https://www.youtube.com/watch?v=xtQlQmWMxmg
7. Tingley B., “Navy ‘UFO Patent’ Documents Talk Of ‘Spacetime Modification Weapon’, Detail Experimental Testing”, The Drive janv. 2021, https://www.thedrive.com/the-war-zone/38937/navy-ufo-patent-documents-talk-of-spacetime-modification-weapon-detail-experimental-testing
8. Statistiques de la FAO, 2021, http://www.fao.org/fishery/statistics/global-commodities-production/fr
9. Tatum M., “Farming Fish in the Sky”, Hakai magazine févr. 2021.
10. Lire à ce sujet le rapport très complet de Paula Forteza, Quantique : le virage technologique que la France ne ratera pas, https://forteza.fr/wp-content/uploads/2020/01/A5_Rapport-quantique-public-BD.pdf
11. The Physics ArXiv Blog, “A Desktop Quantum Computer for Just $5,000”, Discover magazine janv. 2021, https://www.discovermagazine.com/technology/a-desktop-quantum-computer-for-just-usd5-000
12. Série issue de l’émission « In Extenso » du médium The Conversation, à retrouver sur le site Acast https://play.acast.com/s/in-extenso/apprendre-la-revolution-des-ecrans
13. Site du musée de l’Homme à Paris, un des 13 sites du muséum national d’histoire naturelle, http://lhommeenquestions.museedelhomme.fr/qu-est-qui-differencie-animal-homme
14. Vergara I., « Une œuvre d’art numérique vendue 69,3 millions de dollars chez Christie’s », Le Figaro mars 2021, https://www.lefigaro.fr/culture/encheres/revolution-du-nft-une-oeuvre-d-art-numerique-adjugee-pres-de-70-millions-de-dollars-chez-christie-s-20210311
15. Page de l’exposition « Cités millénaires » sur le site de l’Institut du monde arabe, https://www.imarabe.org/fr/expositions/cites-millenaires
16. Dönges J., “The Famed Painting The Scream Holds a Hidden Message”, Scientific American mars 2021, https://www.scientificamerican.com/article/the-famed-painting-the-scream-holds-a-hidden-message/
17. D’ailleurs si vous voulez l’avis de Bernard Pivot sur la fermeture des lieux de culture dans le cadre de la lutte sanitaire, c’est ici : https://www.franceculture.fr/emissions/linvitee-des-matins/linvite-des-matins-du-lundi-04-janvier-2021
18. « L’art peut-il s’accommoder du virtuel ? », France culture déc. 2020.
19. Le thriller de science-fiction américano-britannique écrit, réalisé et produit par Christopher Nolan, sorti en 2010.
20. Voir la présentation de l’initiative de collecte sur le site internet du Mucem, https://www.mucem.org/vivre-au-temps-du-confinement-la-collection
21. L. n^o 2021-85, 29 janv. 2021, visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises, https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043080343
22. Pour en savoir plus sur ce fait divers un peu insolite, Bhardwaj N., “Zoom calls with goats is the latest lockdown trend helping one farm struggling due to COVID-19 to net $68,000”, Insider févr. 2021, https://www.insider.com/goat-zoom-calls-raise-68k-for-farm-struggling-during-covid-2021-2
23. Vidéo sur la chaîne YouTube du Monde, « Les sondes Voyager : ce qu’il restera de l’humanité si la Terre disparaît », sept. 2017, https://www.youtube.com/watch?v=d3vcoO4tR8o