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Transition agricole et justice sociale : tout un programme !

L’agriculture biologique gagne du terrain
Le 20 juin 2019

La transition écologique est en train de gagner la bataille des idées et d’occuper la place qui lui revient dans la sphère publique. La crise qui agite la société française est de ce point de vue riche d’enseignement : c’est moins un refus d’adaptation aux enjeux anthropocènes que la crainte d’un déclassement ou de l’exclusion que le nouvel ordre pourrait ajouter qu’il faut retenir. En fait, la question n’est plus de savoir si l’on va changer notre manière d’habiter le monde pour assurer notre subsistance, mais de savoir comment le faire, à quel rythme, avec qui et quelle exigence de justice socio-environnementale.

L’agriculture avec son changement de modèle et le développement du bio constitue un champ emblématique pour observer les réagencements culturels, sociaux et économiques qui se jouent. Nourrir 9 milliards de personnes dans le monde à l’horizon 2050 est déjà un défi. Les nourrir tous sainement et avec des pratiques agricoles et consuméristes qui ne détruisent pas les écosystèmes naturels et ne condamnent pas l’humanité à court terme est une autre paire de manches.

La conversion biologique de l’agriculture et les investissements nécessaires en matière de recherche, de formation, de production, d’organisation des filières et de reconception des chaînes de valeur, d’éducation des consommateurs, constituent donc un enjeu majeur. La question n’est plus de savoir si l’on est contre l’agriculture biologique mais comment, à quel rythme, avec et pour qui, des producteurs jusqu’aux consommateurs, équitablement, se fait la transition. En observant les seules situations européennes et françaises, on mesure l’ampleur de la tâche.

Le bio ne représente aujourd’hui que 6,2 % de la surface agricole utile européenne. Entre 2014 et 2015, le nombre de fermes et la surface bio de l’Union européenne (UE) ont progressé de 4,7 % et 9,0 %. La volonté des membres l’UE en la matière diffère : 64 % des surfaces bio de l’UE sont concentrées dans 6 pays : Espagne (17 %), Italie (15 %), France (13 %), Allemagne (10 %), Autriche (5 %) et Suède (5 %). En troisième position pour les surfaces agricoles bio, la France n’arrive cependant qu’au dix-huitième rang si l’on considère la part du bio dans la production agricole nationale.

Des disparités comparables apparaissent à l’échelle régionale. Ainsi en matière de surfaces agricoles bio plusieurs régions se distinguent comme PACA, Occitanie, Corse, Rhône-Alpes, Grand Est, Bretagne, Pays de la Loire. L’engagement des pouvoirs publics semble aussi déterminant que celles des acteurs locaux pour mener le changement lesquels ne disposent cependant pas des mêmes capacités, selon leurs types de production, leur modèle économique, leur lien à l’industrie agrochimique ou leur culture. La future politique agricole commune également sera décisive tant en termes des montants alloués que des priorités affichées : la transition a évidemment un coût. Il faudra pour qu’elle soit acceptée que ces coûts soient justement répartis en contribuant à diminuer les inégalités plutôt qu’à les renforcer. Tout un programme.

L’agriculture biologique gagne du terrain
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