Revue
Ils nous étonnentLes innovateurs publics en mode cousinade

Faire de l’innovation un levier de la transformation publique, c’est ce qui rassemble les différentes communautés de l’innovation publique en France. À l’occasion de la troisième édition de La Cousinade1, le rendez-vous annuel qui a eu lieu le 2 avril à Paris, un nouveau dispositif de soutien aux communautés est lancé : le hub des communautés de la transformation publique.
Rencontre avec Benoît Landau, responsable du programme « Futurs publics », à la Direction interministérielle de la transformation publique (DITP), en charge d’expérimenter des nouvelles solutions innovantes et d’animer les communautés de l’innovation (La Cousinade, Semaine de l’innovation publique).
Quels sont les objectifs de la communauté Futurs publics ?
Futurs publics, c’est la communauté professionnelle ouverte à tous les agents publics qui innovent ou souhaitent innover dans leur travail, et partagent la vision d’une évolution souhaitable du secteur public dans notre pays. Elle rassemble plus de 600 personnes issues d’administrations centrales, de services déconcentrés, de collectivités territoriales et d’opérateurs publics.
Qu’attendez-vous de cette troisième édition de La Cousinade ?
« La transformation publique est une grande famille », c’est le sous-titre de cette troisième édition. Nous attendons 350 personnes à Paris, le double des deux éditions précédentes. Nous souhaitons élargir le cercle des participants et faire de cette cousinade le rendez-vous annuel des communautés qui s’inscrivent dans la transformation publique, et plus seulement des innovateurs. L’échange entre pairs et entre communautés sur des initiatives innovantes produit toujours des effets très riches auprès des agents publics qui y participent. La cousinade est un moment important pour s’enrichir les uns des autres sur des projets, partager les difficultés, les résultats et les méthodes, s’entraider et s’inspirer pour faire grandir cette dynamique d’innovation publique.
À l’occasion de cette troisième édition, nous lançons un nouveau dispositif de soutien aux communautés : le hub des communautés de la transformation publique. Ce sera à la fois un espace en ligne, sur le site de la DITP, pour permettre à tous les agents publics de connaître et rejoindre les communautés qui l’intéressent, et aussi un dispositif de soutien, de formation et de conseil pour les agents qui créent ou animent des communautés qui s’inscrivent dans la transformation publique au sens large.
Quelle est votre vision de l’innovation publique ?
L’innovation publique, c’est à la fois concevoir et améliorer des services publics mais aussi diffuser une culture de l’innovation dans l’administration. C’est utiliser des méthodes nouvelles pour trouver des solutions aux problèmes de l’administration et plus largement aux problèmes de notre pays. Innover, c’est un véritable état d’esprit, une vision et une culture partagée de ce vers quoi doit tendre l’administration : la co-construction des politiques publiques avec les usagers et les professionnels de terrain, et plus largement, l’ouverture à l’ensemble des parties prenantes, ce que certains appellent « l’open policy making ».
En quoi l’innovation publique peut-elle aider à trouver des solutions plus efficaces ? Ses méthodes peuvent-elles répondre en partie à la crise des gilets jaunes, par exemple ?
Les démarches d’innovation publique peuvent apporter quelques années d’expérience sur des méthodes de travail qui ont fait leur preuve, pour prendre en compte de manière efficace l’expérience et le point de vue des parties prenantes sur une problématique. Nous avons, par exemple, appliqué avec succès l’an dernier la méthode « Flash 360 » pour identifier des pistes d’amélioration du dispositif du RSA. Ce format, qui place le citoyen au cœur de la transformation de l’action publique, alternait séquences en plénière et petits groupes pour identifier, à partir d’un diagnostic, des pistes de solution et les tester immédiatement avec toutes les parties prenantes (dix allocataires du RSA, dix professionnels de terrain, cinq pilotes nationaux des dispositifs RSA)2. La DITP met également en œuvre sur les sujets de participation citoyenne « les ateliers citoyens », qui consistent à sélectionner un panel de citoyens représentatif de la diversité française pour produire un avis sur les politiques publiques (réforme des retraites, ouverture des donnes de santé, prévention des conduites addictives). C’est une approche nouvelle pour éclairer la décision publique. La DITP multiplie aussi les « immersions » sur le terrain type « Carte blanche » ou le projet en cours sur les services publics de proximité à partir d’immersions sur trois territoires (Béthune, Lyon, le Perche). L’idée est d’aller voir sur le terrain, avec des méthodes ethnographiques, comment la mise en œuvre concrète des services publics aux usagers peut être redéfinie en 2019. Ce sont encore des méthodes rares dans l’administration mais qui ne sont pas nouvelles. Notre rôle est d’imaginer des formats nouveaux de ce type pour co-construire les politiques publiques.
Pour aller plus loin
Le manifeste de Futurs publics, « L’innovation publique, concevoir autrement les politiques publiques », mars 2017
1. La Cousinade 2019 a lieu mardi 2 avril, de 9 h 30 à 16 h 30 au Pan Piper (Paris XIIe). Six ateliers sont prévus : « Success room », « Fail room », « Learning room », « Future room », « Community room » et « Open room ».
2. Sur les cinq propositions crash testées, trois ont été retenues dans le cadre du plan pauvreté de septembre dernier (le contrat d’engagement réciproque entre l’allocataire RSA et l’administration, la réduction des délais pour l’entretien d’orientation, le rapprochement des deux parcours d’accompagnement des allocataires du RSA).