Intelligence artificielle et action publique : où en sont les administrations ?

Le 10 septembre 2022

Le Conseil d'État a répertorié de très nombreuses expérimentations de l’intelligence artificielle (IA) dans les administrations, les opérateurs publics et les collectivités locales. Il encourage le gouvernement à aller plus loin pour exploiter pleinement le potentiel de l'IA, mais aussi à adopter une doctrine administrative pour une IA de confiance, dans un rapport remis le 30 août 2022 à Elisabeth Borne, la Première ministre.

 

À l'occasion de la parution de cette étude « Intelligence artificielle et action publique : construire la confiance, servir la performance », nous sommes allés à la rencontre de Thalia Breton et Alexandre Lallet, les deux co-rapporteur.e.s. Nous leur avons demandé de répondre à quatre questions :

 

- Quelles sont les grandes familles de cas d’usages des systèmes d’intelligence artificielle (SIA) dans les administrations publiques ?

 

- Quels sont les cas d’usages exemplaires dans les collectivités locales ?

 

- Les administrations françaises sont-elles prêtes à adopter l’intelligence artificielle ?

 

- Quelles sont les principales recommandations de cette étude ?

Automatisation de tâches répétitives ou fastidieuses (classement des mails, pseudonymisation des décisions juridictionnelles), amélioration de la relation à l’usager (chatsbots), aide à la décision pour les administrations (anticipation de l’évolution du niveau des nappes phréatiques, des sollicitations des services de pompiers, de la fréquentation des services d’urgences, cartographie de la délinquance…), activités de contrôle et de lutte contre la fraude fiscale (détection de constructions non autorisées sur des images satellites, ciblage des contrôles fiscaux et douaniers...), robotique (robots chirurgicaux, petites navettes autonomes de transport)... Les cas d’usages de recours à l'intelligence artificielle sont aujourd'hui très nombreux dans la secteur public. Cependant, « le déploiement de l'IA est encore très progressif dans les services publics, très inégal selon les administrations, et souvent expérimental», préviennent les rapporteurs.

Plus de ressources humaines et techniques pour accélérer le déploiement de l'IA

L'étude du Conseil d'État recommande surtout de doter la France des ressources nécessaires (humaines, techniques, financières, organisationnelles, juridiques) pour accélérer cet usage de l'IA. Une de ses priorités doit être de former les dirigeants publics, recruter des experts des données mais aussi de se doter des ressources techniques nécessaires. Un assouplissement du cadre juridique, notamment du partage de données au sein des administrations, devrait aussi être examiné.

Faire évoluer la gouvernance pour relever le défi de l'IA dans les administrations

La stratégie de l'IA publique reste encore largement à structurer et à formaliser pour les pouvoirs publics dans le sillage de la stratégie nationale pour l'Intelligence artificielle lancée en 2018. L'étude invite à adapter la gouvernance pour être la hauteur du défi de l'IA dans les administrations. Les sages du Palais Royal préconisent notamment un renforcement d'Etalab, qui joue le rôle de « Chief Data Officer » de l’État, et du coordonnateur national pour l’intelligence artificielle, en lien avec l’intervention de l’Agence nationale de la cohésion des territoires, permettant aussi de faire de l’État un possible prestataire de services et pourvoyeur de ressources, y compris humaines, pour les collectivités territoriales.

« L’étude préconise enfin une transformation profonde de la CNIL en autorité de contrôle nationale responsable de la régulation des systèmes d’IA, notamment publics, pour incarner et internaliser le double enjeu de la protection des droits et libertés fondamentaux, d’une part, et de l’innovation et de la performance publique, d’autre part».

 

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