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S’approprier la R&D sociale : les termes clés pour une culture commune ?

Le 29 novembre 2021

Nouveau concept apparu depuis quelques années seulement, la recherche et développement (R&D) sociale s’inscrit dans la dynamique de l’innovation sociale. Elle peut aujourd’hui contribuer utilement à trouver des solutions de sortie de crise et renouveler la fabrique de l’action publique locale. D’où vient-elle et comment une collectivité locale peut-elle se lancer dans cette démarche ?

L’innovation sociale conçoit et met en œuvre des solutions aux besoins sociaux, plus satisfaisantes que celles actuellement menées dans le cadre des politiques publiques ou disponibles sur le marché. Elle concerne des défis variés allant de la transition écologique, de l’inclusion professionnelle des personnes handicapées, de l’accès aux services de santé ou d’éducation, de l’autonomie alimentaire, etc. Dans un contexte de crise économique, sociale et écologique, l’innovation sociale s’est peu à peu imposée sur l’agenda politique comme dans les démarches entrepreneuriales.

Elle renvoie à une vaste typologie de solutions. Certaines prolongent des actions et initiatives déjà menées dans les territoires. D’autres, plus radicales ou novatrices, nécessitent la création de nouvelles connaissances théoriques et pratiques. En cela, elles relèvent de démarches de recherche et développement (R&D) sociale.

Nouveau concept apparu depuis quelques années seulement, la R&D sociale devient un sujet central pour les collectivités territoriales, associations, entreprises de l’économie sociale et solidaire ou celles dites « conventionnelles ». Il contient la promesse d’identifier les leviers pertinents de sortie de crise et d’amélioration des conditions de vie de la population.

Nous présentons ici les grands termes qui permettent de mieux comprendre la R&D sociale, de cerner sa genèse, d’en connaître les modalités, et d’en mobiliser les ressources.

Innovation sociale

Depuis la crise de 2008, l’innovation sociale connaît un intérêt croissant. Si elle occupe une place importante dans les programmes scientifiques, c’est surtout son inscription sur l’agenda des politiques publiques qui s’avère marquant, avec le développement de dispositifs de financement, de transfert de bonnes pratiques, de mise en place d’outils et d’indicateurs, développés à l’échelle nationale comme par les collectivités territoriales, au premier rang desquelles les conseils régionaux et les intercommunalités disposant de la compétence de développement économique, etc. Cette institutionnalisation de l’innovation sociale s’est incarnée en France, au travers de son inscription et de sa définition dans la loi de juillet 20141 sur l’économie sociale et solidaire (ESS)2. Deux logiques ont fortement imprégné les politiques publiques de l’innovation sociale depuis près de dix ans : d’une part, ont émergé des actions visant à mettre en lumière les entreprises ou organisations particulièrement actives ou marquantes au regard de leur impact social, à l’image de l’initiative présidentielle « la France s’engage » (2014-2017) ou du dispositif « Pionniers French Impact » (2017-2020). Les appels à manifestation d’intérêt, prix et appels à projets portés par les conseils régionaux ou intercommunalités opèrent dans le même sens ; d’autre part, on assiste également à une volonté de consolider des écosystèmes territoriaux et d’accompagner leur capacité, par la coopération, à générer, des dynamiques d’innovation. La démarche de labellisation des pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) ou le dispositif d’appui aux territoires French Impact témoignent de cette approche3.

Deux logiques ont fortement imprégné les politiques publiques de l’innovation sociale depuis près de dix ans : d’une part, ont émergé des actions visant à mettre en lumière les entreprises ou organisations particulièrement actives ou marquantes au regard de leur impact social ; d’autre part, on assiste à une volonté de consolider des écosystèmes territoriaux et d’accompagner leur capacité, par la coopération, à générer, des dynamiques d’innovation.

Ces deux approches se rejoignent toutefois pour retisser le lien existant entre innovation et R&D. L’innovation (sociale) apparaît ainsi comme la résultant d’une démarche visant à créer de manière concomitante une solution (pas seulement sous la forme d’un produit technologique) et des connaissances nouvelles (issues des sciences humaines et sociales, là où la R&D « classique » laisse la part belle aux sciences de l’ingénieur). On voit ainsi apparaître dans le sillage des politiques publiques d’innovation sociale des appels pour que les acteurs fassent reposer leurs démarches sur des logiques empruntant à la R&D.

Transformation sociale

Au-delà du débat entre lecture entrepreneuriale, insistant sur le projet et l’impact, et lecture institutionnaliste, focalisée sur les processus et l’ancrage territorial, l’innovation sociale a été rapidement tiraillée par une controverse autour de sa contribution réelle à la résolution des problématiques de société4. La promesse de l’innovation sociale est ainsi attaquée par ceux qui dénoncent sa participation au démantèlement de l’État-providence, l’innovation sociale aboutissant à réintégrer dans le champ commercial des actions relevant auparavant du service public et des compétences de l’acteur public, par exemple, en matière d’habitat ou de mobilité des personnes en situation de précarisation. Accusée alors d’être au service d’une vision (néo)libérale et capitaliste, elle est aussi dénigrée par son incapacité à changer radicalement la société et à faire face avec succès aux défis posés par les nouveaux besoins sociaux : incarnée par une myriade d’initiatives certes intéressantes mais aux effets limités, elle est alors suspectée de n’engager que des actions à « faible impact » 5.

Les tenants d’une transformation sociale entendent, quant à eux, de mettre le doigt sur les innovations sociales structurantes, disposant d’une contribution forte et réelle à l’intérêt général. La mise en avant du concept d’« innovation sociale de rupture » participe de cette vision : il renvoie à une combinaison dynamique d’innovations de services, de produits, de politiques publiques, de modèles économiques et organisationnels, qui rompent avec l’existant ainsi qu’à un changement radical et durable des cadres culturels, institutionnels, cognitifs et des pratiques sociales6. Surtout, l’innovation (sociale) de rupture renvoie à la fois à un changement de paradigme, reposant sur une volonté de modifier fondamentalement l’appréhension d’une problématique de société ou des solutions qui doivent y répondre, et à une perspective d’intérêt général, permettant à partir d’éléments objectivables et repérables de s’assurer que la solution ainsi envisagée est plus satisfaisante que celles actuellement proposées par le marché ou les politiques publiques7.

C’est bien dans une approche de l’innovation, comme vecteur de transformation sociale, qu’intervient principalement la R&D sociale, à la fois parce qu’elle implique ce besoin de création de connaissances nouvelles, mais aussi parce qu’elle nécessite ce travail d’objectivation des effets produits par l’introduction des innovations dans la société.

C’est bien dans une approche de l’innovation, comme vecteur de transformation sociale, qu’intervient principalement la R&D sociale, à la fois parce qu’elle implique ce besoin de création de connaissances nouvelles, mais aussi parce qu’elle nécessite ce travail d’objectivation des effets produits par l’introduction des innovations dans la société.

Recherche et développement

La recherche renvoie au processus général de création de connaissances nouvelles. Elle est généralement associée à la recherche universitaire, menée par des professionnels de la fonction publique exerçant le métier de chercheurs (à temps plein ou en complément d’une activité d’enseignement). La R&D fait plutôt référence à une activité de création de connaissances associée à son application effective, opérée dans un cadre privé, ou du moins mené par l’acteur qui est « intéressé » au déploiement de cette application.

Tout comme l’innovation, la R&D, a longtemps été appréhendée à partir du seul prisme technologique : elle s’intégrait alors aux démarches entrepreneuriales visant à proposer des produits (technologiques) à des clients, dans le but de disposer d’un avantage concurrentiel et de conquérir des parts de marché. Pour cette raison, elle ne relevait ni du vocabulaire ni des pratiques de l’acteur public et des collectivités territoriales. De même, elle était étrangère au monde des associations, et plus globalement de l’ESS. L’apparition d’une vision plus large de l’innovation, et son repositionnement au regard des besoins sociétaux, vient changer la donne et, à l’inverse, intégrer ces acteurs au cœur des processus de recherche-développement sociale.

Nous pouvons définir celle-ci de la manière suivante : « La R&D sociale est un processus qui est déterminé par sa finalité, à savoir la génération d’innovations sociales. Ce processus s’inscrit dans une démarche scientifique alliant recherche fondamentale et développement expérimental, et vise à contribuer à la résolution d’une problématique sociétale identifiée dans un objectif d’intérêt général. La R&D sociale aboutit à la conception et l’expérimentation de services, produits, méthodes, politiques publiques, modes d’organisations ou modèles économiques, généralement en les combinant au service d’un même objectif. Cette démarche se déroule dans une logique de coopération entre divers acteurs, parmi lesquels les entreprises, les organisations publiques et collectivités territoriales, le monde de la recherche universitaire, les associations ou encore les acteurs de l’ESS et les collectifs de citoyens. » 8

Au regard de cette définition, il est important de bien distinguer la R&D sociale de ses faux amis. Premièrement, elle se distingue de la seule recherche fondamentale qui a pour objectif de produire des connaissances nouvelles mais sans envisager une application ou une utilisation particulière. À l’inverse, la R&D est directement liée à une application définie et anticipée, que ce soit un service (par exemple, activités d’un garage solidaire), une politique publique (règlement d’intervention d’une collectivité dans le champ de la mobilité inclusive), un produit (voiture écologique et low tech à bas coût, pouvant être facilement accessible pour des ménages à faible revenus).

Deuxièmement, elle ne s’apparente pas à la recherche-action9, terme largement diffusé au sein des sciences humaines et sociales, qui met l’accent sur la contribution des connaissances produites au changement de l’environnement social étudié. En effet, la R&D sociale invite moins à chercher pour agir, qu’à agir pour chercher. Dans la recherche-action, le chercheur est placé au cœur du dispositif de création de connaissances en interaction étroite avec l’acteur social ou socio-économique ; dans la R&D, c’est l’acteur social ou socio-économique qui agit d’abord à partir d’expérimentation de terrain et qui en extrait des connaissances, en interaction avec le chercheur qui veille à la pertinence des protocoles scientifiques mis en place.

La R&D sociale se déroule dans une logique de coopération entre divers acteurs, parmi lesquels les entreprises, les organisations publiques et collectivités territoriales, le monde de la recherche universitaire, les associations ou encore les acteurs de l’économie sociale et solidaire et les collectifs de citoyens.

Enfin, la R&D diffère de la recherche participative qui a pour objectif de produire des connaissances scientifiques avec des acteurs non-scientifiques-professionnels, ces derniers pouvant contribuer à tout ou partie des étapes de la recherche comme la définition du problème, la collecte de données, l’analyse des résultats, la communication des résultats, etc.

Expérimentation

L’expérimentation est au cœur du processus de R&D. Elle n’en est pas le résultat (ce qui la distingue de la recherche fondamentale ou appliquée) mais la colonne vertébrale. Les démarches de R&D sociale vont ainsi s’attacher à la mise en expérimentation d’une « solution » innovante afin de l’éprouver, d’en ressortir des données, et de pouvoir la modifier. Cette solution « en devenir » constitue un pilote expérimental.

Ce pilote peut prendre des formes très différentes, comme un texte juridique (par exemple, la proposition de loi sur l’expérimentation du dispositif Territoire zéro chômeur de longue durée [TZCLD], présentée en 2015), un modèle d’entreprise (l’entreprise à but d’emploi du dispositif TZCLD), un modèle économique (le fonds d’expérimentation territoriale du chômage de longue durée créé en juin 2016), un mode d’organisation (les comités locaux pour l’emploi [CLE]) ou encore un service spécifique (une activité de conciergerie rurale), etc.

Les démarches de R&D sociale vont ainsi s’attacher à la mise en expérimentation d’une « solution » innovante afin de l’éprouver, d’en ressortir des données, et de pouvoir la modifier. Cette solution « en devenir » constitue un pilote expérimental.

Deux éléments essentiels distinguent radicalement la R&D sociale de la R&D conventionnelle. Premièrement, comme nous le soulignons plus haut, une innovation sociale peut s’incarner au travers de pilotes expérimentaux de nature différente, mais convergents vers une finalité commune et issue d’un même méta-concept (par exemple, le projet pour TZCLD, garantir le droit à l’emploi en mobilisant l’activation des dépenses passives). Deuxièmement, la R&D sociale ne dispose pas d’une capacité de prototypage en milieu fermé et maîtrisé, comme dans les laboratoires des sciences de l’ingénieur. Autrement dit, l’expérimentation est nécessairement in situ, et dans la société. Cette différence est radicale car elle implique généralement de modifier l’environnement (au niveau des représentations culturelles ou sociales, des conditions financières ou juridiques) pour assurer les conditions de l’expérimentation : il faut donc changer les cadres préalablement à l’expérimentation et non après celle-ci. Dans l’exemple de TZCLD, les modifications législatives incarnées par la loi d’expérimentation de 201610 ont ainsi constitué un préalable nécessaire à la mise en place, dans des conditions adéquates, du déploiement des expérimentation territoriales. Il est important de préciser que le dispositif TZCLD, se rapproche d’une démarche de R&D sociale mais n’a pas du tout formalisé le projet dans ce sens, et donc n’incarne pas totalement tout ce que peut recouvrir une dynamique de R&D sociale.

Coopération

Le principe de coopération est au cœur des démarches de R&D sociale. Il dépasse la simple nécessité opérationnelle de collaboration entre une entreprise et un laboratoire de recherche, que l’on retrouve dans les pratiques conventionnelles de la R&D. La coopération, comme action de se projeter ensemble, et pas seulement de travailler ensemble, est un prérequis méthodologique de la R&D sociale11. La raison en est la suivante. La résolution d’une problématique sociétale, quelle qu’elle soit, implique d’activer des leviers de « natures » différentes : faire évoluer la réglementation voire la législation ; proposer de nouveaux produits ou services ; garantir que ces services seront délivrés au travers de modèles économiques ou juridiques spécifiques ; assurer l’appropriation par les bénéficiaires visés, etc.

Or, une organisation ne dispose pas, à elle seule, de l’ensemble de ces leviers, mais est positionnée autour d’une compétence spécifique : une association peut proposer des services et mobiliser des citoyens ; une entreprise peut concevoir un produit spécifique et le mettre sur le marché ; une collectivité ou l’État peut transformer des normes d’action publique. C’est de la capacité à lier les initiatives de ces acteurs de différente nature et à les assembler de manière cohérente vers une même finalité que repose le succès d’une démarche de R&D sociale.

Cette nécessité de coopération, éclaire un point de difficulté de la R&D sociale. Elle implique que la valeur et la propriété (intellectuelle, matérielle, etc.) ne soit pas captée par un seul acteur, mais soit partagée entre toutes les acteurs contribuant à la démarche, voire qu’elle soit pleinement ouverte. De plus l’hétérogénéité nécessaire des acteurs implique de penser la constitution d’une communauté plus large que seulement circonscrite à une échelle locale, même si les expérimentations seront nécessairement territorialement situées. Le maître-mot de la R&D sociale est ainsi la dimension multiscalaire. Comme dans l’exemple de TZCLD, les innovations autour des entreprises à but d’emploi ont englobé à la fois les projets entrepreneuriaux ancrées territorialement et le cadre législatif issu de la loi du 29 février 201612 qui les a rendu possible. Par ailleurs, c’est sur la même logique que le développement des SCIC et des SCOP ont eu lieu, en s’ancrant territorialement tout en étant soutenu par la loi du 17 juillet 2001 relative aux SCOP et aux SCIC13.

Processus

La R&D emprunte un processus spécifique qui doit être appréhendé dans une logique itérative. Sur le plan des étapes opérationnelles, la mise en place d’un processus de R&D sociale implique quatre étapes principales :

  • un état de l’art des connaissances et solutions existante sur le sujet ;
  • la conception et la modélisation des projets, incluant la mise en évidence des conditions rendant possible l’expérimentation in situ de ces projets en conditions réelles ;
  • la phase de test effective par le biais de pilotes expérimentaux, une fois les conditions requises ;
  • la validation et l’ajustement des solutions conçues en fonction des résultats obtenus, incluant le passage à l’échelle.

L’enjeu des cadres d’expérimentation adaptés, n’est pas nouveau et a déjà été investi par les acteurs publics dans le passé. La loi organique du 1er aout 200314, relative à l’expérimentation par les collectivités territoriales, témoigne de la prise en compte de cet enjeu. C’est également le cas de la loi plus récente du 19 avril 2021 relative à la simplification des entrées et sorties d’expérimentations locales15. Néanmoins, le recours à ces pratiques demeure encore limité, seules quatre expérimentations ayant été menées depuis l’entrée en vigueur de la loi d’avril 2021, dont trois ont été généralisées (revenu de solidarité active [RSA], tarification sociale de l’eau et accès à l’apprentissage jusqu’à l’âge de trente ans)16.

Derrière toute démarche de R&D sociale, il y a nécessairement une prise de risque à travers la modification, parfois temporaire, des cadres en présence. Si les cadres n’évoluent pas, l’expérimentation ne peut pas être mise en place dans sa totalité, elle ne peut donc faire la preuve par l’exemple, et les résultats de la R&D sociale ne seront pas significatifs.

Les démarches de R&D sociale vont ainsi s’attacher à la mise en expérimentation d’une « solution » innovante afin de l’éprouver, d’en ressortir des données, et de pouvoir la modifier. Cette solution « en devenir » constitue un pilote expérimental.

Écosystème

La mise en place de démarches de R&D sociale, ne peut pas être réalisé sans la réunion de conditions de faisabilité autour d’un écosystème soutenant.

En matière de financements, la R&D sociale, ne bénéficie pas de dispositifs spécifiques, mais elle peut mobiliser des dispositifs génériques de la R&D, notamment opérés au bénéfice des entreprise, comme le crédit impôt recherche (CIR), le statut Jeune entreprise innovante (JEI) ou les dispositifs de réalisation de thèses universitaires en entreprise avec la convention industrielle de formation par la recherche (CIFRE). L’accès à ces dispositifs dans un objectif d’innovation sociale demeure limité, à la fois pour des raisons culturelles, mais aussi parce qu’ils excluent généralement une partie des acteurs engagés dans ce type de démarches, en premier lieu les associations non fiscalisées.

En matière de cadre juridique, il existe des dispositifs mobilisables, comme la loi sur l’expérimentation législative locale ou les dispositifs spécifiques de la commande publique comme les marchés publics de R&D. Une nouvelle fois, ces dispositifs novateurs demeurent encore trop peu utilisés.

Le monde de la recherche universitaire est également peu outillé pour répondre aux besoins d’appui des acteurs socio-économiques dans leur processus de validation scientifique des expérimentations sociétales qu’ils mènent. Le positionnement des chercheurs demeure encore confiné à la simple évaluation qui intervient, qui plus est, après la réalisation des expérimentations. À cette étape, soit les expérimentations ont souvent été « empêchées », les conditions de leur faisabilité n’ayant pas été remplies, soit elles sont pleinement consacrées et institutionnalisées, peu importe l’analyse scientifique qui leur est apportée a posteriori, en termes d’impact limité notamment.

Enfin, il manque encore à ce jour une réelle capacité d’accompagnement à grande échelle de ces projets de R&D sociale, qui se limite à quelques acteurs au niveau national17.

La R&D sociale : vers un partenariat public-communs ?

La R&D sociale constitue une opportunité féconde pour les collectivités de s’inscrire dans des trajectoires de construction de communs, en lien avec les acteurs socio-économiques. Objet nouveau des politiques publiques, elle trace de nouvelles perspectives pour imaginer des pistes d’actions pertinentes face aux défis des territoires menées dans un cadre réellement coopératif. Si la R&D sociale n’en est qu’à ses débuts, gageons que la promesse qu’elle porte lui assure un bel avenir.

  1. L. n2014-856, 31 juill. 2014, relative à l’économie sociale et solidaire.
  2. Douchet L., Être une entreprise et servir la société. Analyse du processus d’institutionnalisation de l’innovation sociale en France au début du xxie siècle, thèse, 2019, université de Bordeaux.
  3. Gianfaldoni P. et Lerouvillois P., « Le pôle territorial de coopération économique : une nouvelle conception du développement local », in Gardin L. et Jany-Catrice F. (dir.), L’économie sociale et solidaire en coopérations, 2016, PUR, p. 57-68.
  4. Juan M., Laville J.-L. et Subirats J. (dir.), Du social business à l’économie solidaire. Critique de l’innovation sociale, 2020, Erès.
  5. Douchet L., Être une entreprise et servir la société. Analyse du processus d’institutionnalisation de l’innovation sociale en France au début du xxie siècle, op. cit.
  6. Cette définition est portée par le LabCom Destins, formé par la maison des sciences de l’Homme et de société (MSHS), sous tutelle de l’université de Poitiers et du Centre national pour la recherche scientifique (CNRS), d’une part, et l’agence coopérative en innovation sociale Ellyx, d’autre part (www.labcom-destins.fr).
  7. Omer J., Palluault O., Palluault S. et Bourgeois C., « De l’institutionnalisation des dispositifs d’appui aux dynamiques de transformation de la société : penser les innovations sociales de rupture », 2021, communication colloque du CRISES.
  8. Cette définition est portée par la SCOP Ellyx.
  9. Pour plus d’informations sur la recherche-action : Bonny Y., « La recherche-action et la question de l’institution », Forum oct. 2014, n142.
  10. L. n2016-231, 29 févr. 2016, d’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée.
  11. Sur la différence entre coopération et collaboration : Laurent E., L’Impasse collaborative. Pour une véritable économie de la coopération, 2018, Les Liens qui libèrent.
  12. L. n2016-231, 29 févr. 2016, op. cit.
  13. L. n2001-624, 17 juill. 2001, relative aux SCOP et SCIC.
  14. LO n2003-704, 1er août 2003, relative à l’expérimentation par les collectivités territoriales.
  15. LO n2021-467, 19 avr. 2021, relative à la simplification des expérimentations mises en œuvre sur le fondement du quatrième alinéa de l’article 72 de la Constitution.
  16. Rapport de la commission des lois sur les propositions de loi constitutionnelle et organique pour le plein exercice des libertés locales, adoptées par le Sénat le 20 octobre 2020.
  17. Notamment la SCOP Ellyx ou l’Institut Godin.
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