Les innovations des entreprises facilitées par de nouvelles mesures

Simplification entreprise administration
Le constat a été fait que l'information publique destinée aux entreprises est répartie sur de nombreux sites publics, parfois denses, méconnus ou mal référencés. Afin de faire évoluer cette situation, un seul point d'entrée va être créé, d'ici la fin de l'année 2021, avec un nouveau site unique, hébergé par www.service-public.fr, concentrant l'information et l'orientation des entreprises.
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Le 19 avril 2021

Depuis plusieurs décennies, les efforts des pouvoirs publics n’ont pas manqué pour simplifier les formalités que les entreprises sont tenues d’accomplir auprès des administrations, depuis leur naissance ou leur disparition et pour leur action quotidienne. Des timides programmes gouvernementaux des années 1980 à l’impressionnante loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), en passant par de multiples ordonnances et des mesures règlementaires produites en continu, le processus de simplification - toujours à reprendre – évoque inévitablement le mythe de Sisyphe.

 

Mais des mesures récentes redonnent espoir. Le salut viendra-t-il d’une transformation de la méthode de simplification et du recours intensif au numérique ? Le 24 février 2021, Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, et Alain Griset, ministre délégué chargé des Petites et Moyennes Entreprises, ont installé une commission « Services Publics+ Entreprises » qui, tous les semestres, va réunir les représentants des entreprises et des administrations compétentes pour simplifier en continu les documents, procédures, et relations avec l'administration liés à la vie des entreprises.

 

Dans ce cadre, deux nouveaux outils viennent d’être présentés, le 13 avril 2021 : « France Expérimentation – Administrations » et un nouveau « site unique de référence » pour simplifier les démarches des entreprises auprès de l'administration. Décryptage de ce deux nouveaux dispositifs.

 

France Expérimentation – Administrations, un nouvel outil de simplification et d'innovation

Ce dispositif est destiné à apporter un appui aux services déconcentrés de l’État lorsqu’un projet structurant au niveau d’un territoire est bloqué pour des raisons administratives ou juridiques et qu’aucune solution n’a pu être trouvée localement. Il est mis à la disposition des services de l’État et prioritairement des préfets, sous-préfets à la Relance et services déconcentrés de l’État. En organisant un travail interministériel « en mode agile[1] », il s’agit de trouver rapidement le moyen de résoudre des blocages dont il est saisi. L’objectif est d’apporter une réponse dans le mois, ce délai pouvant être porté à deux mois pour les saisines les plus complexes. Selon les indications ministérielles, cinq types de solution peuvent intervenir :

  • une sécurisation juridique apportée par la direction d’administration centrale responsable de la réglementation problématique ;
  • une clarification ou une modification de doctrines administratives identifiées comme conflictuelles ;
  • la mobilisation du programme France Expérimentation  à destination des entreprises pour des projets économiques innovants nécessitant des dérogations expérimentales  législatives ou réglementaires ;
  • une proposition de changement définitif du cadre réglementaire ou législatif,
  • le lancement de missions d’appui et de simplification avec les équipes de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) ou la Direction interministérielle du numérique (DINUM).

Les propositions de modification du droit ou les éventuels désaccords entre administrations seront soumis à l’arbitrage du Premier Ministre.

Créé en juin 2016, le guichet unique « France Expérimentation » s’est attaché depuis à favoriser l'expérimentation et l'innovation économique, via des dérogations temporaires au cadre réglementaire en vigueur sont peuvent bénéficier, au-delà des entreprises, des associations, établissements publics ou collectivités territoriales dont un projet économique innovant est bloqué par des dispositions législatives ou réglementaires.

Piloté par des équipes de la Direction interministérielle de la transformation publique (DITP) et de la Direction générale des entreprises (DGE), le dispositif permet de concrétiser un projet en aidant les services déconcentrés de l'Etat à résoudre des blocages juridiques et procéduraux auxquels peuvent être confrontés les acteurs économiques locaux.

Lorsqu’une demande est retenue, une dérogation à la règle bloquante peut être autorisée pour une durée limitée (quelques années) et à l’échelle d’un territoire donné. En revanche, des dérogations ne peuvent être accordées à une norme émise par les institutions de l’Union européenne, ou à une réglementation édictée par une collectivité territoriale ou relevant d’une autorité administrative indépendante.

Comme illustration des effets de cet appui, on cite le cas d’une PME du département du Nord, spécialisée dans la collecte et le traitement des déchets d’activités de soins à risques infectieux, qui a pu réaliser une expérimentation portant sur un procédé innovant : recycler, pour la première fois à l’échelle mondiale, les masques usagés (qui devaient auparavant faire l’objet d’enfouissement ou d’incinération).

Afin d’envisager la pertinence de poursuivre, généraliser ou abandonner cette dérogation, les pouvoirs publics sollicitent le demandeur pour évaluer le projet et ses effets (en fournissant des éléments qualitatifs ou quantitatifs, en cours et en fin d’expérimentation).

Pour que davantage de projets innovants puissent être expérimentés dans les territoires, France Expérimentation vient de lancer un nouvel appel à projet, ouvert - jusqu'au 30 Juin 2021 – à de nouveaux porteurs de projets économiques bloqués par la législation, afin de solliciter des dérogations législatives expérimentales et temporaires.

Une audace procédurale doit être signalée : les demandes retenues pour faire l’objet d’une expérimentation pourront même donner lieu à un dépôt d’amendement les autorisant, dans le cadre de l’élaboration du projet de loi "4D" (différenciation, décentralisation, déconcentration et décomplexification[2]) qui vise à faciliter le recours aux expérimentations, tout en mettant en œuvre le principe de différenciation territoriale.

Un tel processus législatif particulier avait déjà été utilisé en 2018 : quatre expérimentations portées par des acteurs économiques (grande entreprise publique, association, PME) avaient été retenues pour être intégrées au projet de loi pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE). Elles visaient notamment à :

- permettre d’ouvrir le marché du recensement en agissant sur la réglementation concernant le recrutement des agents recenseurs,

- dynamiser la réhabilitation de logements vacants pour faciliter l’insertion en agissant sur le bail à réhabilitation,

- faciliter la recherche sur les microorganismes en France métropolitaine,

- favoriser les projets d’autoconsommation électrique collective à l’échelle locale, en élargissant le périmètre géographique de l’autoconsommation.

porte d’entrée de l’entreprise dans l’administration

La création d'un site unique de référence pour faciliter les démarches des entreprises auprès de l'admnistration

La seconde innovation annoncée le 13 avril est la création d'un « site unique de référence » pour une information et un accompagnement de l'environnement administratif numérique des entreprises. Le constat a été fait que l'information publique destinée aux entreprises est répartie sur de nombreux sites publics, parfois denses, méconnus ou mal référencés.

Afin de faire évoluer cette situation, un seul point d'entrée va être créé, d'ici la fin de l'année 2021, avec un nouveau site unique, hébergé par www.service-public.fr, concentrant l'information et l'orientation des entreprises. Il s’appuiera sur l’expérience « utilisateur » acquise par l’Etat, personnalisée, simplifiée et ergonomique, au plus près des besoins concrets.

Ce site doit aussi permettre aux entreprises de transmettre directement les difficultés qu’elles peuvent rencontrer dans les procédures administratives, ce qui peut déclencher le processus de simplification de la part du gouvernement. Le site est ainsi une porte d’entrée de l’entreprise dans l’administration, pour ses recherches, ses questions et ses démarches.

La démarche est ambitieuse mais nécessaire quand on constate que plusieurs institutions ont déjà agi dans cette voie pour mieux coordonner l’information vers les entreprises. Ainsi, « Place des entreprises », un guichet unique pour orienter les TPE/PME, expérimenté en Région Hauts-de-France, lancé par l’Etat, les Régions et les organismes d’accompagnement publics et para publics. Dans le Grand Est, toujours avec l’appui de l’État, de la Région et des Chambres de commerce et d’industrie, une plateforme unique propose déjà de traiter rapidement les demandes des entreprises confrontées à la situation sanitaire actuelle.

Comme le soulignait la ministre Amélie de Montchalin, l’intérêt pour l’Etat est de voir remonter en temps réel les blocages et les difficultés rencontrées pour « mener en continu l’effort de simplification ».

Au total, le processus de simplification des formalités des entreprises semble désormais résolument s’inscrire dans la durée et emprunter des circuits courts et directs.

Si les méthodes et les moyens varient en fonction des priorités gouvernementales, le recours accru au numérique peut faire évoluer la méthode pragmatique associant les ministères, les représentants des entreprises et les élus pour faire émerger plus rapidement des simplifications concrètes.

Un processus qui toutefois ne ménage pas les instances représentatives du monde économique et social.

 

[1]  Progressivement en vogue depuis deux décennies d’abord dans le secteur privé puis dans les structures publiques, le mode « agile » se focalise sur quatre priorités : - besoins du client, - individualisation, - développement itératif, - intégration continue.

[2]  Transmis au Conseil d’Etat en mars, le texte n’avait pas encore été adopté par le Conseil des ministres le 20 avril 2021

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