Il faut encourager l'audace des managers du secteur public

Nicolas Bouzou et Julian de Funès
Le 31 janvier 2019

Accumulation de process, réunions interminables, injonctions paradoxales, séminaires infantilisants type « escape game », religion du « bonheur au travail » : l’entreprise serait-elle devenue le lieu de l’absurde ? Dans La comédie (in)humaine. Comment les entreprises font fuir les meilleurs ?, l’économiste Nicolas Bouzou et la philosophe Julia de Funès1 pointent les nombreux dysfonctionnements du management moderne et proposent des solutions simples pour redonner du sens au travail. Une source d’inspiration et d’action pour le secteur public.

La « comédie (in)humaine » dans les entreprises que vous dénoncez, et qui est aussi le titre de votre ouvrage, est-elle encore plus forte dans le secteur public ?

Le secteur public importe souvent les méthodes managériales du privé, qui ne marchent pas forcément. Les indicateurs de performance sont un bon exemple. Dans les entreprises, ces indicateurs ont généré beaucoup de process et diminué la capacité d’initiative des collaborateurs. Les hôpitaux publics et les administrations centrales ont adopté ces indicateurs de performance, mais les résultats ont été encore plus désastreux que dans le privé. Les mêmes problèmes se sont posés mais en pire.

Est-ce possible selon vous de faire évoluer le management dans les administrations où la hiérarchie est encore très présente ?

Oui, c’est possible, tout repose sur la capacité d’innovation, l’intelligence émotionnelle et l’audace des managers du secteur public (directeurs, sous-directeurs, chefs, sous-chefs, etc.). Il ne s’agit pas de remettre en cause la verticalité de l’organisation administrative, car elle nous semble incontournable tant les effectifs sont nombreux. Il s’agit d’assouplir le management, de mieux valoriser les compétences plutôt que le statut des agents publics, de favoriser la créativité mais aussi le courage et l’audace de celles et ceux qui veulent changer les choses !

Parmi vos propositions pour travailler mieux dans le privé, vous évoquez notamment la destruction des silos dès qu’ils se forment, de rendre les intitulés de poste plus compréhensibles, de développer le télétravail ou encore de remplacer les formations inutiles par des formations en humanités, etc. Autant de solutions défendues aussi par les acteurs de l’innovation publique… Quelles sont vos préconisations pour transformer le secteur public ?

La taille de l’organisation, qu’elle soit publique ou privée, constitue le vrai problème. Plus la structure est importante, plus les procédures ont tendance à se multiplier. En fait, il faut se battre contre la bureaucratisation qui gagne les organisations. Il faut aller vers plus de flexibilité et de souplesse. Nous sommes encore dans une période de transition, cela est encore possible !

1. Rencontre avec les auteurs le 20 novembre 2018 à l’occasion de la conférence USI Connect « Management : construire l’entreprise du xxie siècle » : https://blog.usievents.com/usiconnect-management-construire-entreprise-du-xxie-siecle-avec-julia-de-funes-et-nicolas-bouzou/

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