Les nouveaux récits et l'imaginaire comme clés de la transition territoriale

Polau
1024 Architecture / Chantier ouvert du Point H^UT - lieu de création urbaine, Saint-Pierre-des-Corps
©© Aurélien Dupuis
Le 29 novembre 2018

Et si les acteurs de l'innovation culturelle étaient une clé pour le développement territorial de demain ? C'était le sujet de la journée interprofessionnelle  « Ré-outiller les territoires par l'innovation culturelle », organisée le 11 octobre au POLAU-pôle arts & urbanisme à Saint-Pierre-des-Corps, avec le partenariat du Conseil régional Centre-Val de Loire. Une centaine d'acteurs du développement territorial et culturel étaient présents. Au cours de la matinée Maud Le Floc'h et Pascal Ferren du POLAU mettent en perspective la notion « d'urbanisme culturel ». Maud Le Floc’h souligne qu'il y a sans doute « Une intelligence parmi ces acteurs culturels », à transmettre à l'urbanisme et aux territoires. Non pour apporter des solutions miracles, mais pour : « Décaler le regard, réactiver des potentiels » du territoire et parfois « changer de lunettes ». En guise d'illustration concrète, Pascal Ferren présente une dizaine d'actions, extraites du Plan-guide arts et aménagement du territoire et la plate-forme Arteplan soutenus par le ministère de la Culture.

Une table ronde sur les « Enjeux et dynamiques du développement territorial en Région Centre-Val de Loire » s'ensuit. Les intervenants sont Charles Fournier, Vice-président délégué à la transition écologique et citoyenne et à la coopération de la Région, Bruno Marmiroli, directeur de la Mission Val de Loire dédiée à la valorisation de l'environnement et des paysages et Marie-Noëlle Pinson directrice-adjointe de Ville au Carré, structure spécialisée sur la politique de la ville.

Les échanges sont denses et donnent la mesure des enjeux : l'urgence de la transition écologique, la fracture entre les territoires urbains et ruraux, l'importance des paysages, la mobilité, la revitalisation des centres-bourgs. Face à ces derniers, il est question d'avoir des « outils pour mieux voir » et pour faire « systématiquement avec les gens », de « réinventer la proximité » et dépoussiérer la notion « d'attractivité ».

Les ateliers de l'après-midi sont consacrés à la revitalisation des centres-bourgs, à l'accompagnement des changement d'échelles de projet dus aux nouvelles intercommunalités, aux relations entre nature et projets culturels. Les vertus mais aussi les limites des innovations culturelles sur l'aménagement et de la planification territoriale sont soulignées. On note au passage que ces actions participent à « créer du collectif », faire venir « de nouveaux publics », installer un « rapport au temps » différent du temps politique, produire de « l'enchantement », réactiver des imaginaires et potentiels du territoire. Les participants s'interrogent sur la nécessité d'intégrer ces projets en amont des projets, sur leurs modèles de financement et d'accompagnement sur la durée, leur impact sur les territoires. 

On comprend au fil des échanges que la notion d'« innovation culturelle » sur les territoires nous sort des modèles traditionnels de la commande artistique et du festival. Qu'il s'agisse de la mise en valeur des berges de La Bièvre (Bièvre*Imaginaires), d'une randonnée/d’un sentier métropolitain autour de Marseille (GR 2013), « d'augmenter » la concertation sur un SCOT (Objectif SCOT Vallée du Loir), de mettre en valeur avec des œuvres plastiques, une commune millénaire comme Beaulieu-lès-Loches, ces approches plus immersives et de long terme, travaillées avec les populations, contribuent à remettre en perspective les territoires et surtout travaillent leurs imaginaires.

Jean-Patrick Gilles, conseiller régional, souligne justement en conclusion de la matinée, qu'une commune ou région, c'est « un territoire + un récit ». La capacité à produire de « nouveaux récits » sur et à partir d'un territoire serait un outil clé du développement territorial, de la revitalisation et de la transition.

D'ailleurs la projection du film La glace à la Fourme, mettant en scène un village se pliant en quatre pour convaincre un potentiel acheteur, illustre tout à fait comment la mise en scène d'un possible autour de ce qui n'est au départ qu'un désir ou un rêve, contribue à sa manière à relancer une dynamique territoriale. Les plasticiens et designers, compagnies et poètes, auront leur part à apporter aux défis de la transition, de la revitalisation et de l'équilibre des territoires. À condition de trouver leur juste place et que les acteurs des politiques publiques de territoire acceptent le défi des changements de postures et de regard.

×

A lire aussi