Camille Peugny : «Une véritable politique publique de la jeunesse doit être pensée et conduite par l’État»

Camille Peugny
Selon le sociologue Camille Peugny, le modèle qui consiste à faire reposer sur les familles l’aide aux 18-25 ans via les allocations familiales et la fiscalité ne fait que perpétuer les inégalités entre les jeunes à travers un système scolaire basé sur l’élitisme et une société basée sur une pseudo méritocratie.
©Hermance Triay
Le 5 novembre 2022

Sociologue, Camille Peugny est professeur à l’université Paris-Saclay (UVSQ) et chercheur au laboratoire Professions, institutions, temporalité (PRINTEMPS) sous la tutelle de l’UVSQ et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Ses travaux portent sur la mobilité sociale et les inégalités, ce qui l’amène à s’intéresser aux politiques éducatives et celles dédiées à la jeunesse.

 

Dans ces champs, il étudie plus particulièrement deux thématiques à savoir la stratification sociale et la manière dont les inégalités font évoluer et fracturent les sociétés contemporaines ainsi que les politiques publiques en direction de la jeunesse en Europe.

 

Nous l’avons longuement interviewé sur son dernier essai, Pour une politique de la jeunesse1, dans lequel il plaide pour des dispositifs universels protecteurs et émancipateurs pour la jeunesse, garantis et portés par l’État. Le sociologue estime que l’État doit aider les jeunes à trouver leur voie et les accompagner vers l’autonomie par un financement universel des études ou des formations. Comme c’est le cas au Danemark qui a mis en place un dispositif universel d’autonomie les jeunes et une politique de la seconde chance pour les décrocheurs.

BIO EXPRESS

2009
Chercheur et maître de conférences en sociologie à l’université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis et publication de Le déclassement3

2013
Publication de Le destin au berceau. Inégalités et reproduction sociale4

2016
Habilité à diriger des travaux de recherche qui porte sur les transformations des classes populaires en France et en Europe

2018
Professeur des universités à l’UVSQ

2022
Publication de Pour une politique de la jeunesse

Lors d’un entretien sur France Inter2, Imane Ouelhadj, présidente du syndicat étudiant, l’Union nationale des étudiants de France (UNEF), a attiré l’attention sur l’augmentation du coût de la vie pour les étudiants et ses répercussions notamment sur la réussite des études. La crise sanitaire n’aurait-elle donc servi à rien en termes de prise de conscience de la précarité de la situation des étudiants ?

Nous avons tous en tête les files d’attente devant les restaurants universitaires qui offraient des repas gratuits, car, en raison des confinements, les étudiants qui travaillaient en étaient empêchés et donc n’avaient plus de revenus. La France a découvert cette situation en écarquillant les yeux. Mais après ? Elle a bien vite oublié qu’un grand nombre d’étudiants n’est pas boursier et doit travailler pour financer les dépenses du quotidien, à commencer par le logement, qui est cher, alors que le parc de résidences universitaires n’est pas assez important.

Or, lorsque vous devez travailler vingt-cinq heures par semaine et suivre des cours, vos chances de réussite sont forcément moindres que ceux qui n’y sont pas obligés, ce qui a pour effet de perpétuer les inégalités sociales.

Quant à la prise de conscience de la classe politique, j’observe deux choses : d’une part, durant la crise sanitaire, il n’a jamais été fait mention de la situation des universités et de leurs 1,6 millions d’étudiants sur les 3 millions que compte notre pays, d’autre part, l’université demeure un univers assez étranger à la nouvelle génération de la classe politique plutôt issue des grandes écoles, ou des moins grandes d’ailleurs. Là encore on retrouve le clivage des origines sociales : les jeunes des classes populaires qui entament des études se tournent davantage vers les cycles universitaires courts alors que les jeunes dont les familles ont les moyens peuvent s’orienter vers les classes préparatoires aux grandes écoles, onéreuses, pour lesquels l’État investit en moyenne 16 000 euros par an et par élève et où l’on ne dénombre qu’une trentaine d’élèves par classe alors que l’université n’est dotée que de 9 000 euros par an et par élève et voit s’entasser 250 étudiants dans un amphithéâtre !

L’aide aux étudiants en situation précaire que le Gouvernement a mis en place pendant la crise sanitaire n’a donc pas été utilisée comme tremplin pour réformer « un système d’aides sociales à bout de souffle », selon Imane Ouelhadj ?

Absolument pas. Rien de plus normal d’ailleurs au vu de l’aide en question. Les quelques centaines d’euros d’aide versés aux étudiants en situation de précarité ont été improvisés sur un coin de table et ne relèvent en rien d’une volonté de mettre à plat le système pour en bâtir un autre radicalement différent. Les professionnels de l’aide sociale, pourtant rompus aux dispositifs complexes, mettaient ainsi plusieurs heures à comprendre celui de l’aide en question, par exemple pour cerner qui y était éligible !

À une politique lisible et universelle d’aide aux étudiants et aux jeunes en général, nous préférons bâtir des mille-feuille au gré des dispositifs mis en place par les gouvernements successifs. Or, avec le retour de l’inflation se profile un nouvel enjeu pour les franges les plus précaires des étudiants.

Jusqu’où cela sera-t-il supportable ? En outre, de telles conditions économiques ne vont-elles pas finir par éloigner des études supérieures d’autres catégories sociales alors qu’elles y accédaient auparavant ? Si la crise économique se prolonge, faudra-t-il mettre en place de nouvelles aides improvisées ? Reverra-t-on d’autres images d’étudiants faisant la queue devant les centres régionaux d’œuvres universitaires et scolaires (Crous) ? Aux images et à leurs éphémères émotions, je préfère la neutralité des statistiques et des chiffres. De ce point de vue le taux de poursuite des études dans l’enseignement supérieur5 sera une donnée très intéressante à suivre pour tenter de répondre aux questions que je viens d’évoquer.

Que préconisez-vous pour sortir enfin de ces questions récurrentes sur le revenu des étudiants, sur leurs chances de réussite et au-delà peut-être sur l’attractivité, voire la pérennité de l’université en France ?

La mise en place d’un salaire étudiant, le même pour tous, ou d’une allocation d’autonomie, comme on voudra nommer un tel dispositif, cumulable avec une allocation logement, afin d’enlever les freins financiers à la poursuite des études, de permettre ainsi à toutes les classes sociales d’avoir accès aux études supérieures et de donner à tous les étudiants les mêmes chances de réussite en n’obligeant pas les plus précaires à travailler pour se nourrir. La jeunesse est un âge fragile de l’existence. Je considère donc que c’est à l’État, comme il le fait pour la vieillesse avec l’allocation d’autonomie qui, soit dit en passant, n’a jamais été remise en cause depuis sa création, de donner un signal fort aux jeunes, étudiants ou pas, sur la confiance qu’ils peuvent avoir dans un système considéré dans son ensemble. Le modèle qui consiste à faire reposer sur les familles l’aide aux 18-25 ans via les allocations familiales et la fiscalité ne fait que perpétuer les inégalités entre les jeunes à travers un système scolaire basé sur l’élitisme et une société basée sur une pseudo méritocratie. En outre, la fiscalité avantageuse via la demi-part fiscale pour les parents qui ont des enfants qui poursuivent des études a pour effet d’accentuer les inégalités entre classes sociales.

Pourquoi faire reposer l’aide aux jeunes sur les familles ?

Il faut faire appel au temps long pour répondre à cette question et notamment à la fin de la Seconde Guerre mondiale avec, en 1945, la création de la sécurité sociale. La protection contre l’insécurité sociale a été attachée au travail. Pour ceux qui sont en dehors du monde du travail, donc les jeunes, c’est à la politique familiale qu’a échu leur protection. Cela a donc été un choix en négatif. Car à l’époque de la création de la sécurité sociale, la massification scolaire n’avait pas encore véritablement commencé. Il aurait donc fallu étendre la protection des actifs à ceux qui poursuivaient leurs études, et ce faisant, assuraient aussi l’avenir du pays. Pourtant les gouvernements successifs n’ont jamais remis en cause ce postulat. Du coup entre la fin de l’âge légal de l’école obligatoire, 16 ans, et l’âge de 25 ans, auquel les jeunes accèdent à la protection sociale dans les mêmes conditions que le reste de la population (par exemple, pour le revenu de solidarité active [RSA]), c’est le règne du flou et des dispositifs improvisés

Le frein à l’instauration d’une politique publique garantissant un revenu aux étudiants et plus largement aux jeunes serait donc d’ordre idéologique ?

Exactement. Or, ce type de frein est le plus difficile à lever. La plupart des politiciens estiment en effet que l’instauration d’un revenu garanti enverrait un signal d’assistance à la jeunesse, qu’une somme d’argent allouée sans contrepartie servirait à acheter des écrans plats et des cigarettes !

Pourtant il serait temps de mettre les actes en conformité avec les paroles et, outre l’instauration d’un revenu étudiant, d’étendre le RSA aux moins de 25 ans et de développer une véritable politique de la seconde chance. Mais le système élitiste et la méritocratie font que le diplôme obtenu a une forte emprise sur l’ensemble de la carrière et que, par conséquent, les décrocheurs se retrouvent de facto exclus de ce système, sans que celui-ci ne ménage une seconde chance pour eux, alors que le temps de formation d’une personne ne devrait pas être limité à sa formation initiale. Par malheur, on retrouve dans la formation professionnelle des adultes le même problème, à savoir qu’en pratique elle bénéficie davantage aux cadres qu’aux autres catégories de salariés.

Pour quelle(s) raison(s) développer une véritable politique de la seconde chance ?

100 000 jeunes sortent chaque année du système éducatif français sans qualification. C’est considérable. Dès lors que fait-on pour aider les décrocheurs ? Quelle politique de la seconde chance instaure-t-on ? L’Union européenne s’était emparée de cette question au début de la précédente décennie et avait demandé aux États membres de développer des politiques de la seconde chance. D’où l’instauration en France de dispositifs inspirés des pays nordiques comme en 2013 de la garantie jeune transformée sous l’ère Macron en contrat d’engagement qui alloue jusqu’à 500 euros/mois en contrepartie de l’acceptation de suivre un parcours de formation poussé sous l’égide des missions locales pour l’emploi. Mais le contrôle sur ce type de contrat, dont l’éligibilité pour le jeune ne va déjà pas de soi, a été renforcé et les missions locales ont été mises en concurrence avec Pôle emploi. Or, les financements publics de ces missions dépendent des résultats obtenus en matière de taux de retour à l’emploi. Chaque conseiller se retrouve avec des dizaines de jeunes à suivre et est débordé, voire pour certains au bord du burn-out, faute de moyens pour les accompagner. Si l’on exige des contreparties à une allocation encore faut-il donner à l’accompagnement les moyens de travailler. Pourquoi ne pas aller jusqu’au bout d’une démarche et ne faire porter l’effort que sur l’aspect contrôle ?

Quels sont les résultats directs ou indirects de cette conception idéologique et de l’absence d’une politique de la jeunesse réellement inclusive ?

La France figure tout en haut du palmarès des pays européens en matière de chômage des jeunes. Depuis le début des années 1980, le taux de chômage des jeunes actifs oscille entre 15 et 25 %, s’élevant ainsi à un niveau au moins deux fois plus élevé que celui observé pour l’ensemble de la population active. En outre, parmi les jeunes en emploi, la part des emplois précaires (contrat à durée déterminé [CDD], intérim, emplois aidés) a presque triplé au cours des trente dernières années pour atteindre près de 35 % au début des années 2010, selon l’Insee. Les pays nordiques, beaucoup plus inclusifs, affichent de leurs côtés, des taux de chômage des jeunes de l’ordre de 7 à 8 %.

Par ailleurs, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la mobilité sociale en France est l’une des plus faibles parmi les pays européens.

Quant aux enquêtes Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA), elles montrent que la France fait invariablement partie des trois pays au sein desquels l’origine sociale pèse le plus sur les résultats scolaires. Je pourrais vous citer des dizaines d’autres rapports qui vont tous dans le même sens. La Cour des comptes et le Conseil économique, sociale et environnemental (CESE) ont dressé des constats similaires sur le manque criant d’une politique publique dédiée à la jeunesse comportant des dispositifs universels et des conséquences de ce vide telles que je viens de les décrire.

Vous avez qualifié les pays nordiques de plus inclusifs. En quoi leurs approches diffèrent-elles de la nôtre en matière de politique publique de la jeunesse ?

En tout ! À commencer par la conception qu’à l’État du capital humain et la mise en cohérence avec la stratégie de croissance du pays. Au Danemark, par exemple, l’État investit beaucoup dans chaque citoyen en matière d’éducation, car il espère bien, plus tard, tirer profit de cet investissement : une population hautement qualifiée permettra en effet au pays de figurer en très bonne position dans la compétition économique mondiale et partant de soutenir les objectifs de croissance. Plusieurs études, notamment celle du politiste et chercheur Tom Chevalier6, ont précisément mis en lumière la grande cohérence existant dans les pays qui investissent dans l’éducation au nom de la théorie du capital humain avec leurs stratégies de croissance. Ensuite l’université au Danemark est totalement gratuite. En outre, dès 18 ans, le jeune est considéré comme un adulte à part entière qui a les mêmes droits sociaux et les devoirs que le reste de la population et va pouvoir à ce titre recevoir une allocation d’autonomie.

Comment fonctionne cette allocation ?

Chaque jeune parvenu au seuil des études supérieures voit s’ouvrir le droit à 72 bons mensuels de formation, soit pour six années possibles, sans condition de ressources7. L’allocation est d’un niveau élevé, proche de 800 euros, et peut être cumulée avec une aide au logement, de l’ordre de 200 euros. Point important : ces bons mensuels peuvent être « consommés » en plusieurs fois, ce qui favorise les allers-retours entre la formation et l’emploi et adoucit la transition entre la fin des études et l’entrée sur le marché du travail. Ce n’est toutefois pas le seul avantage de ce dispositif. Celui-ci favorise évidemment l’accès à l’autonomie des jeunes en permettant que leur trajectoire ne soit pas étroitement déterminée par le niveau de ressources de leurs parents. Il permet également aux jeunes de « se trouver » et de prendre leur temps en leur accordant le droit au doute et à l’erreur : ils peuvent bifurquer, se réorienter, aller travailler, revenir se former à l’université8.

En levant ainsi le frein financier, le Danemark affiche un taux de poursuite des études dans l’enseignement supérieur, pour une classe d’âge donnée, de 90 % alors qu’il est de 50 % en France. Les étudiants sont donc très majoritaires chez les jeunes au Danemark, car ils bénéficient d’un dispositif universel d’autonomie. Par ailleurs, contrairement à la France où la continuité des dispositifs publics est souvent malmenée, au Danemark le système d’aide à l’autonomie que je viens de décrire n’a jamais été réellement remis en cause depuis son instauration !

Qu’en est-il des jeunes qui sortent du système scolaire à 18 ans ?

Ils devraient eux aussi avoir le droit à l’allocation mensuelle de 800 euros afin de se réinsérer dans un parcours d’accompagnement de retour à l’emploi où les conseillers ne seraient pas submergés par le nombre de jeunes à traiter et auraient les moyens de mettre en œuvre cette politique de la seconde chance. La France pourrait s’inspirer de l’exemple danois en la matière en ouvrant, à ceux qui sortent du système scolaire sans qualification, un droit à la formation professionnelle pour une durée de cinq ans, par exemple, qui inclurait une allocation mensuelle d’autonomie. Certains de ces jeunes pourraient même reprendre des études s’ils le souhaitent alors qu’actuellement ils sont peu nombreux dans ce cas même si, à travers les trajectoires d’insertions, on observe une très légère hausse de la proportion de ceux qui optent pour cette voie. Un tel dispositif éviterait de creuser les inégalités entre les étudiants et les autres jeunes.

Peut-on parler de réussite de la politique danoise de la jeunesse ?

Il est toujours difficile d’associer un tel mot à une politique publique, car cela demande des travaux de recherches et d’évaluations tant sur le plan qualitatif que quantitatif. Néanmoins, des études réalisées par des chercheurs politistes font ressortir que les jeunes Danois sont plutôt confiants envers autrui et les institutions, et confiants dans l’avenir et ce, bien davantage que les jeunes Français !

À ces questions de revenu d’autonomie, outre l’aspect contrepartie déjà évoqué, le financement de ces mesures est souvent rétorqué. Quel serait le coût pour le budget de l’État sachant que ce qui peut être réalisé à l’échelle d’un petit pays tel que le Danemark ne l’est pas forcément pour la France ?

Contrairement à ce que l’on peut penser, le coût pour le budget de l’État n’est pas exorbitant. Le versement direct aux jeunes d’une allocation d’autonomie va tout d’abord permettre de faire des économies, car l’État cessera d’aider les familles via la demi-part fiscale et les allocations familiales. En outre, des jeunes mieux formés, notamment à travers la politique de la seconde chance, entraîneront à terme une baisse des dépenses consacrées à l’indemnisation des chômeurs ou aux aides de type RSA, puisqu’ils seront bien mieux armés pour trouver des emplois qualifiés et stables. Sur le coût proprement dit de l’allocation d’autonomie pour l’État, le think tank Terra Nova avait, en novembre 2010, en se basant sur une allocation d’un montant de 500 euros sur quatre ans, estimé son montant à 4 milliards d’euros par an9. Un chiffre moins élevé que le coût de la baisse de la TVA pour la restauration adoptée durant le mandat de Nicolas Sarkozy.

Toutefois, le problème de l’acceptation de cette mesure est peut-être à chercher ailleurs : que diraient les électeurs si on leur enlevait le bénéfice de la demi-part fiscale et les allocations familiales ? Les politiques devraient faire preuve de beaucoup de pédagogie pour expliquer aux parents que l’autonomie de leurs enfants passe peut-être par des hausses d’impôts sur les contribuables qu’ils sont aussi !

Autres acteurs publics, les collectivités territoriales ont également pris des initiatives en matière de revenu garanti. Comment voyez-vous leurs rôles ?

Voilà plus de dix ans que certaines collectivités territoriales ont effectivement mis en place des dispositifs de revenu garanti. Certes, ce sont des expérimentations intéressantes, mais, d’une part, c’est créateur de disparités entre collectivités, car elles n’ont pas toutes pas les mêmes moyens, et d’autre part, les collectivités chercheraient peut-être à former ainsi les jeunes aux besoins du marché local de l’emploi, ce qui les enfermerait dans certains métiers. Selon moi, il est clair qu’une politique publique de la jeunesse, inclusive, dotée de dispositifs universels d’autonomie des jeunes, doit être pensée et conduite par l’État qui doit envoyer un signal fort en ce sens, d’autant plus en période de crise économique.

Pour une politique de la jeunesse

De nombreuses réformes sont menées au nom de l’avenir des « jeunes », qu’il s’agisse de financer les retraites ou de réduire la dette. Pour autant, la France n’a aucune politique en direction de la jeunesse. Les dispositifs qu’on empile s’adressent à telle ou telle catégorie, sans jamais être arrimés à une réflexion d’ensemble. Une vraie politique de la jeunesse doit répondre à deux objectifs. D’abord, dans une société vieillissante, combler le fossé entre les jeunes, confrontés à une précarité grandissante, et les plus âgés, mieux protégés. Surtout, réduire les inégalités qui fracturent la jeunesse et, plus que jamais, menacent la cohésion sociale. Camille Peugny est professeur de sociologie à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines (Paris-Saclay). Il a notamment publié Le Déclassement et Le Destin au berceau. Inégalités et reproduction sociale.

  1. Peugny C., Pour une politique de la jeunesse, 2022, Seuil, La République des idées.
  2. Debs M. et Vasseur V., « Le coût de la vie étudiante augmente de 428 euros sur l’année, d’après l’Unef », France Inter 15 août 2022 (https://www.radiofrance.fr/franceinter/le-cout-de-la-vie-etudiante-augmente-de-428-euros-sur-l-annee-d-apres-l-unef-3701885).
  3. Peugny C., Le déclassement, 2009, Grasset.
  4. Peugny C., Le destin au berceau. Inégalités et reproduction sociale, 2013, Seuil, La République des idées.
  5. Sur 100 bacheliers en 2022, nombre d’inscrits à l’université pour l’année 2022/2023.
  6. Chevalier T., La jeunesse dans tous ses états, 2018, PUF, Le lien social.
  7. Sur ce sujet, voir aussi la contribution : Allègre G., « Pour un capital formation », in Maurin L. et Schmidt N. (dir.), Que faire contre les inégalités ? 30 experts s’engagent, 2016, Observatoire des inégalités. Ce dispositif s’adressant de fait aux jeunes qui entreprennent des études, il est important qu’il aille de pair avec l’extension du RSA aux moins de 25 ans, mesure à destination des plus fragiles de la classe d’âge.
  8. Van de Velde C., Devenir adulte. Sociologie comparée de la jeunesse en Europe, 2008, PUF, Le lien social.
  9. Allègre G., Marceau A. et Arnov M. (coord.), L’autonomie des jeunes au service de l’égalité, rapport, 2010, Terra Nova.
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